
Adrien de saint-Alban
Je me souviens qu'en sortant du lycée, je passais presque toujours par la librairie du père Giard. Il avait l'oeil aux aguets, le père Giard. Dès qu'il me voyait arriver, il redoublait de vigilance: il savait que j'étais un voleur de livres.
Je faisais pivoter le tourniquet. Les Garnier Flammarion brillaient de mille feux. Ils étaient là, comme une proie facile. Il y en avait pour tous les prix. Je les ouvrais, les feuilletais, les rangeais en oubliant parfois d'en rendre un à César. A l'affût, toujours en embuscade, le père Giard se méfiait. Il savait la réputation de prédateur dont j'affichais fièrement les traits. Le regard en coin, l'oeil sévère. Il me surveillait. Cependant, j'arrivais toujours à sortir de la librairie avec un livre sous le bras ou sous le manteau, sans payer.
Je me souviendrai toujours du père Giard. Il était petit et trappu.
A la mairie, il s'occupait de la culture avec cette passion débordante de ceux qui sont habités par une foi que nul ne peut ébranler, excepté la mort.
Quelques années plus tard, j'ai appris qu'il avait cassé sa pipe, il avait succombé à une crise cardiaque.
Le père Giard était un brave homme et un fougueux.
Les passionnés meurent souvent d'une crise cardiaque.
Un homme ordinaire meurt dans son lit.
Les génies meurent sur scène. Le père Giard était un génie. A sa façon.
Adrien de saint -Alban
Œuvres
Profitez de votre famille. Quant à moi je penserai à vous. Mon esprit est lié au votre. Mon âme ne saurait se satisfaire de l'absence d'une femme telle que vous mais je prends acte de votre doute. Pourtant, je vous le répète, avec vous je suis dans les fers, dans les fers brûlants d'un amour dévorant.
Adrien , quelqu'un qui pense à vous et vous désire de toute son âme