Les belles journées de juin avaient succédé à celles de mai. Les enfants voyaient arriver avec impatience la période des vacances. Cette année, Killian allait partir pour deux semaines en Irlande, chez Lawra et John. Il se faisait une joie de les revoir et de passer du temps avec Kévin et Matt, le deuxième garçon de Lawra. En âge, il se situait juste entre les deux. Ewan prévoyait d'aller passer du temps chez John, le cousin d'Ingrid, avec Sven, son fils, car il aimait beaucoup participer au travail de la ferme. Souvent, Sven l'emmenait avec lui quand il partait dans la montagne, pour surveiller les moutons. Quant à Erin, si elle ne manquait pas d'amies avec lesquelles elle allait pouvoir jouer, elle voulait aussi suivre les travaux de sa mère et de son arrière-grand-mère quant à la traduction du journal d'Héloïse.

Ingrid et Henry n'avaient pas pu retourner à Edimbourg et Maureen projetait un petit voyage là-bas, sur deux jours. Elle en profiterait pour s'arrêter à Stirling où vivait le papa d'Henry. Quand elle parla de ce projet à Mickaël, à son retour du restaurant, en pleine nuit, celui-ci décida de l'accompagner.

- Je n'ai pas vu mon grand-père depuis de longs mois, dit-il. Et s'il ne va pas très bien...

- Je comprends. Mais comment vas-tu faire ? lui demanda Maureen. Il commence à y avoir des touristes... et je ne voudrais pas laisser Mummy toute seule avec les trois enfants.

- On va demander à Jenn de les prendre pour deux jours. On pourrait partir dimanche prochain, après le déjeuner et rentrer mardi. On peut aller directement à Edimbourg dimanche soir, y dormir et y passer la journée de lundi pour les recherches. Et lundi soir, on dort à Stirling et on va voir mon grand-père. En repartant mardi pas trop tard dans la matinée, je pourrai reprendre le travail au restaurant pour le soir.

- Cela va te faire de la fatigue, s'inquiéta Maureen.

- Mais non, ça ira. C'est maintenant qu'il faut le faire. Après, en effet, on aura plus de monde. Là, ça va encore, la rassura-t-il en lui caressant le bout du nez. Et puis, cela ne nous ferait pas de mal de nous retrouver juste tous les deux...

Maureen sourit doucement.

- Je n'ai rien contre...

- Mais moi, je te veux tout contre moi... lui murmura-t-il à l'oreille.

Et il la fit basculer sur lui, savourant la caresse de ses cheveux sur son visage et la douceur de ses seins sur son torse. Puis il l'embrassa longuement et l'emmena vers ce monde où ils ne faisaient plus qu'un.

**

Quand, le lendemain, Maureen évoqua ce projet avec Mummy et les enfants, ils s'enthousiasmèrent rien qu'à l'idée d'aller passer deux jours chez Jenn et Sam, avec les jumelles. Maureen profita d'un moment tranquille dans la soirée pour appeler Jenn qui ne refusa pas de prendre les trois petits, pour les deux jours prévus. Il leur arrivait de temps en temps de se rendre ce genre de service, et Enora et Arwen étaient toujours contentes de jouer avec ceux qu'elles considéraient comme leurs cousins : elles n'en avaient aucun, Sam étant fils unique et Claudia, la sœur de Jenn, n'ayant pas eu d'enfants. Quand il apprit le projet d'escapade de Mickaël et de Maureen, Sam leur demanda ce qu'ils comptaient faire et quand ils lui répondirent qu'ils se rendaient à Edimbourg pour les recherches, il précisa : "N'oubliez pas de nous ramener la preuve que Micky descend bien d'un laird ! Sinon, c'est un voyage sans aucun intérêt..."

Durant les quelques jours les séparant du départ, Maureen prépara au mieux différentes affaires : celles des enfants pour aller chez Jenn et Sam dès le dimanche midi, des courses pour que Mummy ne manque de rien durant leur courte absence (Jenn avait promis de passer la voir le lundi et le mardi matin, une fois les enfants déposés à l'école), leurs propres bagages, mais aussi toutes les notes qu'elle avait prises autour du journal d'Héloïse et, bien entendu, les travaux déjà réalisés sur l'arbre généalogique par Ingrid et Henry. Elle adressa aussi un nouveau courriel au professeur MacGuiness pour lui parler de leur visite aux Archives et ce dernier s'empressa de lui répondre qu'il serait très heureux de les rencontrer à l'occasion de leur venue. Ils convinrent de se voir le lundi midi.

Le dimanche midi, après le repas, Sam vint chercher les enfants et il en profita pour saluer Mummy. Il s'extasia aussi sur les portraits nouvellement accrochés et qu'il n'avait pas encore eu l'occasion de contempler.

- Y'a pas à dire, mais ça a de la gueule. Je suis impressionné, fit-il d'emblée.

- Tu arrives à être impressionné par quelque chose ? interrogea Maureen.

- Faut pas croire, Princesse, mais j'ai une grande capacité d'émerveillement... Non, sincèrement... Déjà que c'est totalement incroyable d'avoir retrouvé ces portraits, sans compter le journal, mais les voir...

Il hocha la tête avec assentiment, puis ajouta, en fronçant légèrement les sourcils :

- Dis donc, il portait le kilt, Kyrian, à cette date ?

- Tu fais la même remarque que Mickaël, dit Mummy. Oui, il portait le kilt...

- Bel homme, de la prestance et en plus, du courage. Hum, ça ne m'étonne pas, au fond, précisa-t-il.

- Ah, maintenant, tu n'es plus étonné, dit Maureen.

- Non, je ne suis plus étonné. Surtout, si c'est bien un ancêtre de Micky. Tu ne lui trouves pas un petit air de ressemblance, là ?

- Les yeux, si. Mais comme son grand-père, fit simplement remarquer Mummy.

- Viens donc par là, Micky, que je regarde bien.

Et il obligea Mickaël à poser à côté des portraits, s'amusa à aller et venir de l'un à l'autre, comparant, fermant un œil, comme pour prendre des mesures précises.

- Ouais, l'arc du sourcil d'Héloïse aussi...

Et là, tout le monde éclata d'un grand rire.

Alors que les enfants montaient dans la voiture après avoir embrassé leurs parents et leur aïeule, Maureen rangea leurs dernières affaires et vérifia que Mummy n'allait manquer de rien. La femme de Sven, Naig, avait promis de passer également dans la soirée, au coucher de la vieille dame qui avait toujours besoin d'un peu d'aide à ce moment-là.

Puis Mickaël et Maureen prirent la route pour Edimbourg. Mickaël avait choisi de partir par la route qu'il appelait "la route du nord", car elle les faisait remonter un peu dans cette direction, vers la vallée de la Spey, mais leur permettait de redescendre quasiment en ligne droite jusqu'à Edimbourg, en passant par Perth. Au retour, ils prendraient la route centrale à partir de Stirling. Maureen avait réservé la chambre d'hôtes où ils descendaient à chaque fois qu'ils allaient dans la capitale et où ils avaient dormi lors de leur tout premier séjour là-bas.

- Ca fait toujours un peu pélerinage, fit remarquer Mickaël en arrivant en vue de la ville.

- C'est vrai. Mais je me souviens d'une fois, avant la naissance d'Erin, où j'avais proposé que nous allions ailleurs et tu avais refusé...

- Ah oui ? dit-il d'un air faussement dubitatif, mais le regard pétillant.

Maureen se tourna vers lui et sourit en retour.

- Oui, oui, parfaitement...