Chapitre 10

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Nas attendis que Fukume sorte de la grotte. Il inspira un grand coup et sortit à son tour, espérant que la chasseresse ne le remarque pas. Elle trottinait à une allure soutenue, si bien que le rouquin peinait à la garder en vue. Dans la nuit, la forêt était bien plus menaçante que la journée. Chaque bruit, chaque ombre la faisait sursauter. Il se sentait épié par les grands arbres, et les lianes étaient semblables à un filet.

La chasseresse semblait plus vivante que jamais, sautant par dessus les racines, se faufilant entre les branches, traversant les cours d’eau. Un sursaut d’excitation montait dans la poitrine du jeune garçon. Il s’apprêtait à élucider le mystère qu’il avait sous les yeux depuis des semaines.

Il s’appliquait à faire bruisser le moins possible les feuillages de la végétation environnante. Pas question de gâcher cette occasion bêtement. Il accéléra la cadence, de plus en plus essoufflé.

Ils avaient passés le secteur de forêt que Nas connaissais. S'il perdait la jeune fille de vue, il retrouverai difficilement son chemin. Malgré lui, le rouquin haletait. Il couraient depuis au moins trente minutes, et le jeune garçon avait les articulations douloureuses. Il espérait ne pas être trahis par son souffle court. Fukume quand à elle ne semblait pas le moins du monde affectée par sa course, sa respiration était normale.

Enfin, elle ralenti l’allure et se mit à marcher. Soulagé, Nas fit de même. La jeune fille semblait comme… En transe. Différente.

La brettelle gauche de sa combinaison était tombée, dévoilant sa marque. Malgré la pénombre, on distinguait parfaitement la peaux boursouflée formant une faux sur son omoplate gauche.

Nas plissa les yeux. Le paysage semblait différent. Les arbres étaient moins denses, et une clarté artificielle semblait provenir de l’endroit où ils se dirigeaient. Fukume avança encore un peu avant d’arriver à la lisière de la forêt.

Il observait la scène caché derrière un tronc d’arbre. Devant eux, s’étendait la ville de Cayenne. Des rues étroites, irrégulières. Des grandes routes. Des lumières allumées de part et d’autre, défiant l’obscurité nocturne. Le grondement des moteurs de véhicules roulants à une heure tardive. Les rires de quelques jeunes traînants sur les places après quelques verres d’alcool en trop.

La fureur s’empara du garçon roux. Elle lui avait caché tout ce temps qu’elle savait où trouver la ville. Elle l’avait empêché de rentrer chez lui. Elle lui avait refusé de revoir sa famille, ses amis. La journée, elle lui apprenais à survivre, elle chassait pour deux. La nuit, elle allait en ville. Sans lui. Il se sentait trahis. Comme si elle le poignardait dans le dos depuis tout ce temps mais qu’il ne le remarquait que maintenant, et que la douleur lui arrivait d’un coup. Il serra les poings. Il allait pouvoir rentrer chez lui. Mais ce « rentrer chez lui » portait le goût amer de la trahison. Tout ce temps, il lui avait été reconnaissant. Il lui avait fait confiance. Mais il ne ressentait à présent plus que du dégoût à l’égard de la jeune fille. Quand il lui avait demandé si elle savait comment rentrer chez lui, elle n’avait eu aucun scrupule à lui répondre par la négation. Par sa faute, il était resté à l’écart de ses proches plusieurs semaines durant. Il leur avait certainement causé beaucoup de peine, et… L’abattement s’immisça en lui. Quels proches ? Qui l’attendait ? Sa mère ? Lui avait elle réellement montré l’amour d’un parent ? Ces embrassades, ces jeux, cette relation qu’avaient ces camarades avec leur famille, il l’avait perdu depuis longtemps. Elle avait dû penser à lui entre deux coup de téléphone tellement importants, mais lui avait il réellement manqué comme un enfant à sa mère ? Une larme roula sur la joue du jeune garçon. Evan ? C’était un garçon sociable, ils se seraient de toute façon éloignés à la fin de leur scolarité. Il c’était certainement refait des amis. Son grand-père ? Il n’était plus que l’ombre de lui même. Il n’avait lus rien du vieil homme blagueur avec qui il avait partagé tant de choses. Il retînt un sanglot. Qu’avait il à perdre ? Il regarda l’ombre de la jeune fille qui s’engageait dans les ruelles tortueuses, et s’élança derrière elle.

Nas aurait pus simplement la laisser et se rendre au poste de police le plus proche. Il aurait donné son nom et son adresse et on l’aurait raccompagné chez lui. Mais la curiosité repris le dessus. C’était comme si cette curiosité était tout ce qui lui restait. Comme si il venait de perdre ce qu’il n’avait jamais eu. Il voulait savoir ce qu’elle faisait en ville toute les nuits.

La chasseresse slalomait entre les avenues, son ombres dansait à la lumière des lampadaires. Ses pas semblaient ne faire aucun bruit sur les vieux pavés, malgré la grandes résonances des petites rues de la ville.. Elle s’arrêta devant une petite maison à la façade peu entretenue.

Sans aucune hésitation, elle grimpa à la gouttière et se hissa sur le toit avec une agilité qui ne cessait de surprendre le jeune garçon. Il se plaqua au mur, renonçant à la suivre en hauteur. Elle serait partie bien avant qu’il n’atteigne les tuiles du bâtiment. Il la suivit en longeant les bas de toiture. Sans l’obscurité de la forêt, il lui était difficile de passer inaperçu. Mais il n’avait jamais progressé avec autant de facilité depuis qu’il s’était perdu dans la forêt. Son champ de vision était élargi, il avait l’impression qu’on lui retirait un handicap.

Ses yeux étaient rivés sur la silhouette silencieuse de la jeune fille. Soudain, elle se figea en regardant la rue croisant celle dans laquelle Nas se tenait. En se penchant, il aperçu se qu’elle avait remarqué. Un passant. La suite fut très rapide.

Fukume sortis des lames de ses avants bras. Le métal refléta la lumière des éclairages urbains en un éclat bref. Elle fondit sur le passant. Tout ce passa en un éclair. Il n’y eu aucun combat, aucun son. Juste la surprise et la mort. Le yeux gris de la jeune fille luisaient d’une lueur menaçante. Quelques mouvements brefs et précis. Le sang gicla, la chaire se déchira en silence. Avant d’avoir pu prononcer un mot, l’homme était au sol, la gorge tranchée. Les dernières lueurs de lucidités disparurent de son regard tandis qu’une flaque rouge s’étendait au sol. Sans un mot, celle qui venait de devenir un assassin aux yeux de Nas rentra ses lames. Sans jeter un regard à sa victime, elle remonta sur les toits comme si rien ne s’était passé, laissant derrière elle l’odeur sinistre de la mort.


___


Nas courait dans les rues. Le plus vite possible. Le plus loin possible. Celle avec qui il avait passé les dernières semaines était une tueuse. Son cœur battait à tout rompre. Quelles étaient ces lames ? Comment pouvait elle les sortir de ses bras avec tant de naturel ? Combien de personnes avait elle tué ? Pourquoi l’avais t’elle épargné ? Elle allait sûrement en finir avec lui maintenant qu’il connaissais son secret. Il devait mettre le plus de distance possible entre lui et elle. Il ne voulait plus la voir. Plus jamais. Sa course était tremblante sous le coup de l’effroi et de la rage qui brûlait en lui.

Il l’avait considérée comme une camarade. Elle ne lui inspirait plus que du dégoût. Il voyais la gorge du passant s’ouvrir encore et encore, soulevant un haut le cœur dans sa poitrine. Cette scène ne s’effacerait jamais de sa mémoire. Peut être avait il une famille, des amis, un travail. Des gens allaient le pleurer, des vies allaient s’effondrer.

Un monstre. Il avait vécu avec un monstre. Il la haïssait. Elle s’était faite passer pour quelqu’un de bien. Elle lui avait mentis tout ce temps. Il ne voulait même plus savoir pourquoi elle ne lui avait pas dit comment rentrer chez lui. Il ne voulait plus la voir. Il ne pourrait plus la considérer comme une personne. C’était un assassin. Ce soir, elle avait emporté une vie sans le moindre scrupule.

Même en mettant fin à la vie de quelqu’un, son expression était restée de marbre. Il courait. C’était finit. Il ne parlerait d’elle à personne. Il quittait la forêt.


___


Ânko emplit ses poumons de l’odeur humide de la canopée. Perchée dans les branches, elle scrutait patiemment le sol, les sourcils froncés.

— Elle sait qu’on est là n’est-ce pas ? Demanda son partenaire dans la pénombre.

Pour toute réponse, la combattante rousse sauta au sol. Les sabres suspendus à sa ceinture émirent un tintement métallique à l’atterrissage.

— Bien sûr. Ce ne serait pas drôle sinon, répondit elle enfin.

Elle se lécha la lèvre supérieure avec un sourire énigmatique.

— Ce serait trop facile si on effaçait nos trace derrières nous.

Son coéquipier la rejoint. Ils se jetèrent un regard entendu et se dirigèrent droit devant eux. Ils se trouvaient devant une cavité. L’entrée était couverte d’un rideau en peaux de bêtes. Les partenaires entrèrent l’un derrière l’autre. Ils plissèrent les yeux pour distinguer ce qui se trouvait autour d’eux dans le noir. Vide. Il n’y avait personne

— Le gamin a dû la suivre, supposa l’homme au nez cassé. Elle a enfreint le règlement mais elle poursuit sa mission.

— Je n’en attendais pas moins d’elle, fit la jeune fille rousse.

Elle se retourna vers son camarade.

— La chasse est ouverte. Que le meilleur gagne.

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