20 ᗰαi 2025
« Arrête de pleurer et sèche tes larmes de crocodile. »
Un souvenir fort, une phrase brute. Année 1995. Trente ans après elle se souvient de ce visage, de cette infirmière qui lui a dit mot pour mot cette annonce.
« Arrête de pleurer et sèche tes larmes de crocodile. »
Le 20 mai 2025 - Jour J de cette observation. Je ne souhaite pas déjeuner au boulot et je décide d'aller m'acheter de la malbouffe dans la grande surface la plus proche. Sandwich triangle, saucisson, chips, et pour alléger ma conscience tout autant que j'adore ça, du melon. Je passe à la caisse et je perçois l'hôtesse silencieuse. Elle se mord les lèvres, regarde les articles qu'elle passe et relève son regard jusqu'à la la cliente qui me précède. Cette dernière fixe également l'hôtesse. Un silence grondant se crée entre elles jusqu'à ce que la première commence.
— Vous vous souvenez de moi ?
Un ton tremblan, un regard insistant, un visage inquiet, ce qui s'annonce fait tembouriner mon cœur.
— Vous étiez l'infirmière présente quand mon père est décédé. Je me souviens de vous, je ne peux pas vous oublier, vous avez été dure et je m'en souviendrai toute la vie. Je me souviens de votre visage, de votre voix mais surtout de ce que vous m'avez dit ce jour là.
La cliente semble hébétée. Curieuse, le regard vif, elle ose poser la question.
— Si ce n'est pas indiscret, qu'est-ce que je vous ai dit ?
« Arrête de pleurer et sèche tes larmes de crocodile. » Fut la réponse.
La voix de l'hôtesse de caisse tremble néanmoins elle poursuit le passage des articles, elle semble calme.
— Vous aviez l'habitude de côtoyer la mort mais ce n'était pas mon cas. Vous n'auriez pas dû dire ça.
— Je me souviens de vous mais je ne me souviens pas d'avoir dit ça…
Le spectacle s'arrête là. Je scrute la cliente qui part avec une démarche mal assurée. Elle semble troublée par cet échange. La caissière regarde la cliente qui me succède et moi, elle est légèrement chamboulée. J'ai le cœur lourd, lorsque le sujet évoqué parle d'un père, je suis toujours fébrile. Dans un premier temps, je me suis dis que l'hôtesse se souvenait mal, que de telles paroles n'étaient pas pensable. Puis, si c'était vraiment le cas… Je me suis demandé comment, en tant qu'infirmière, on pouvait dire ce genre de choses.
Je suis retournée dans ma voiture, j'ai noté les phrases dont je me rappelais en pensant : « Ça ferait un bon texte dans un jour, une histoire. »
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Bonjour,
J'ai vraiment été touchée par la réaction de l'hôtesse. Je sentais en elle cette espèce d'envie revanchard et en même temps cette douceur et ce professionnalisme digne d'une personne qui côtoie des gens chaque jour.
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