Nous l’avons trouvée, errant seule sur la route d’Azur, alors nous l’avons emmenée avec nous. Cette route a beau être relativement sûre, qui sait ce qui peut lui arriver une fois la nuit tombée. J’ignore d’où elle vient et ce qui lui est arrivé, mais elle était sale, fatiguée et tâchée de sang lorsque nous lui avons proposé de l’emmener. Quoi qu’elle ait vécu, cela n’a pas dû être une partie de plaisir. Elle n’a d’abord prononcé aucun mot. Elle laissait musarder son regard dans le paysage défilant. Mais les histoires que lui inventaient les gars ont rapidement eu raison de sa rêverie, elle les a écoutées avec attention plusieurs heures durant. Ces sanglants récits de bataille semblaient la passionner plus que l’effrayer, elle en réclamait inlassablement, encore et encore. C’est parce que nous avons décidé de monter le campement pour la nuit qu’elle a lâché prise, sinon elle aurait encore insisté.

Nous avons fêté la présence de notre invitée, et elle mangea et but avec nous. Trop, peut-être, mais qu’importe, si cela peut lui permettre d’oublier ce qu’elle a pu vivre. Apprenez-moi à me battre, avait-elle soudain lancé. J’ignore si c’était l’alcool ou les récits, ou bien la mixture que cela créa dans son esprit, qui fit germer en elle pareille idée. Je lui ai expliqué que ce n’était pas une affaire de filles, mais bien d’hommes, et elle n’a pas insisté. Qui sait ce qu’elle fera, une fois dans les rues d’Azur.

La nuit est bien avancée, à présent. La Lune est majestueuse dans le ciel. La petite a enfin cédé au sommeil. Elle a veillé longtemps après la tombée de la nuit, mais la fatigue a finalement eu raison d’elle. Demain, nous reprendrons la route. Quelques heures nous suffiront à atteindre Azur, où siège l’Académie. Ce que la petite y fera ne dépendra plus de nous.