26.2

4 minutes de lecture

Hello tout le monde !

Si vous avez lu l'épisode précédent hier, sachez qu'il a changé depuis (j'ai réorganisé l'ordre du dialogue) xD

Bon week end :D

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– Remonte te coucher, ordonnai-je fermement. Je rentrerai d'ici quelques heures.

Il me regarda de haut en bas.

– Mais oui, elle boude.

– Après... Après tout ce que tu as dit la nuit dernière, tu te demandes si je boude ? éclatai-je. C'est tout ce que tu retires de ton comportement, Auroq ? Tu as offensé ma mère... tu l'as effrayée ! Étais-tu seulement sincère lorsque tu t'es excusé ? Je ne crois pas.

Son assurance le quitta. Il ne répondit rien.

– Moi aussi, j'ai eu peur, mais pas de toi, poursuivis-je à contrecœur. J'ai eu peur que tu partes. Que tu t'en ailles et que tu ne reviennes pas.

– Je ne serais jamais parti comme ça.

Sa voix était un peu rauque.

– Vraiment ? Mais comment puis-je savoir ce qu'il se passe dans ta tête, Auroq ? Comment ? Si tu étais parti, je n’aurais jamais su ce que tu étais devenu. Mort ou vivant, je n'aurais jamais su ! Toute ma vie, j’aurais vécu avec cette incertitude : est-ce qu’il va bien ? Est-ce qu’il est libre dehors, quelque part ? Ou est-ce qu’il s’est tué en tentant de s’enfuir ? Je me serais encore posé cette question dans vingt ans, dans trente ans ! Tu crois peut-être que tout disparaît avec le temps, mais tu te trompes.

– Je ne partirai jamais sans te le dire, dit-il tout bas.

– Comme quand j’étais petite ? relevai-je. Tu m’avais dit que tu ne m’abandonnerais pas, que tu resterais toujours avec moi. C’est pour cela que je t’avais aidé à retrouver ton frère !

– Picta…

Il ébaucha un geste, mais j'évitai sa main.

– Mais en réalité, tu pensais déjà à t'enfuir. Alors pourquoi fais-tu des promesses si c’est pour ne pas les tenir ? À cause de cela, j’ai toujours l’impression que tu mens. Que tu mens en permanence !

– Je ne t’ai plus menti depuis ce jour-là.

– Comment savoir si c'est la vérité ? cinglai-je. J’ai bien vu ce que valait ta parole. Je ne peux pas vivre comme ça, Auroq ! J’en ai assez d’avoir peur chaque fois que tu es en colère !

Il détourna les yeux. Ce minuscule aveu de regret me procura une satisfaction étrange.

– Ma Dame, intervint la voix rocailleuse d'un vieil Ours dans mon dos. Pardonnez-moi de vous interrompre, mais est-ce que tout va bien ? Est-ce que ce branquignol vous importune ? Non, parce qu'on le connaît bien, ici. Sauf votre respect, c'est une vraie tête de caillou.

Je me retournai vers trois ouvriers inclinés, et ressentis aussitôt une grande gêne à l'idée qu'ils aient entendu mon éclat de voix.

– Non, je vous remercie, bredouillai-je. Vous pouvez... vaquer à vos occupations.

Ils jetèrent des regard suspicieux vers Auroq avant d'obéir. Goliath aussi nous jetait des coups d'œils fréquents, occupé du côté des monte-charges.

– Une vraie tête de caillou, répétai-je sans regarder Auroq. Tes collègues t'ont bien cerné.

Quand je me retournai vers lui, il s'était incliné, le poing sur le cœur, comme seuls le faisaient Felenk et Asteior. Je le dévisageai, muette.

– Je déteste devoir m'excuser pour avoir dit la vérité, grogna-t-il.

– Tu détestes t'excuser tout court, dis-je sèchement.

– C'est ça, remue bien le couteau dans la plaie. Je m'excuse. Voilà. (À son visage tendu, je vis à quel point cet simple phrase lui coûtait.) Je ne regrette pas ce que j'ai dit. Mais je ne voulais pas te... te blesser. Ni ta mère. Elle était en droit de me faire fouetter, mais elle ne l'a pas fait.

Sa voix baissa encore, jusqu'à presque disparaître dans le brouhaha de l'entresol.

– Et toi non plus.

Mon sang ne fit qu'un tour.

– Je ne te ferai jamais fouetter, Auroq ! Jamais ! (Je lui mis une tape sur la tête.) Goliath et les autres ont raison. Tu n'es qu'une espèce de branquignol si tu peux t'imaginer pareille chose !

J'ignorais ce que ce terme voulait dire, ni quel en était le degré de grossièreté, mais il fit sourire Auroq. Puis il sembla hésiter, si peu sûr de lui que cela m'interpella. Je ne m'attendais pas aux mots qui allaient suivre. Lui non plus, d'après son expression.

– Je suis fier que tu sois ma Dame.

Mon cœur exécuta un saut périlleux dans ma poitrine.

Au même instant, Maya passa devant nous en courant, son seau brinquebalant à la main, en me lançant un regard qui voulait dire : « Il y en a une ici qui fait tout le sale boulot, et ce n'est pas toi ! »

– Il faut que je me remette au travail, dis-je en regardant mes pieds. Si la Maison prend feu à cause de moi, j'aurais l’air maligne. Tu n'as qu'à... rester ici toi aussi, si tu en as envie.

Il lâcha ma main et s’inclina dans une courbette moqueuse.

– À vos ordres, petite taupe.

Et il s’éloigna en riant. Avant qu’il ne disparaisse dans les fumées, je ne pus m’empêcher de le dévorer des yeux. Il se déplaçait dans l’entresol avec aisance, d’une démarche nonchalante. Parfaitement adapté à ce lieu, comme tous les ouvriers.

Seules les quarante-quatre cicatrices qui zébraient son dos noir rappelaient qui il était vraiment.

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