Seth

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La peste soit de ces noblillons et de leur suite qui croient toujours que tout leur est dû. Son Maître l’avait succinctement informé de la teneur de son entretien avec la Favorite du Légat. Cette dernière voulait le voir sur le champ, l’entrevue ne pouvait soi-disant souffrir aucun délai. Foutaises ! La nuit était déjà tombée, en quoi cela n’aurait-il pu attendre demain ? Il suivait maintenant un majordome obséquieux jusqu’à une porte ouvragée flanquée de deux gardes.

— Attendez là !

Le majordome entre et revient aussitôt.

— Elle vous attend.

Seth franchit les lourdes portes. Son Maître avait vaguement évoqué la tenue négligée de la Favorite. Peut-être aurait-il autant de chance et dans ce cas, cette visite importune pourrait bien ne pas être si désagréable. L’homme s’avance. Personne. Une voix féminine le hèle et le prie d’avancer. Il se laisse guider, franchissant deux rangées d’un tissu léger et vaporeux. Il parvient dans une salle d’eau au milieu de laquelle trône une grande baignoire. Seule une tête dépasse de l’abondante mousse. Elle le détaille comme s’il se fût agit d’un jambon sur l’étal d’un boucher. Deux yeux d’un bleu lumineux, à l’intensité presque surnaturelle, le fixent avec autorité. Derrière la baigneuse, une jeune servante s’applique à soigner les cheveux de sa Maîtresse.

— Fille, voici Seth. C’est lui qui va t’entraîner.

L’assistant Maître d’arme peine à masquer sa surprise. Ainsi, c’est donc cette gamine qui a terrassé Bullor et Shakhan ? Elle n’a pourtant pas l’air bien dangereuse. Bullor doit faire au bas mot deux fois son poids et la domine probablement de plus d'une tête. Seth laisse courir son regard sur la jeune fille. Depuis la nuque délicate, il dévale la courbe de ses reins et vient rebondir sur deux petites fesses joliment bombées, campées sur une paire de jambes bien dessinées. La petite est fort mignonne, très mignonne.
Il chasse ces pensées, s’il doit l’entraîner, elle ne devra rester pour lui qu’une élève comme les autres. Elle est de toute manière bien trop jeune. La jeune fille, toute à sa tâche, le salue d’un signe de tête.

— Bien, fait l’homme. Nous commencerons dès demain, au lever du jour.

Mais Layna intervient :

— Non. Elle reste à mon service et continue d’organiser mon lever et les préparatifs de la journée, et d’assurer mon bain. Tu devras te contenter de l'après-midi.

— C’est impossible ma Dame. Si vous voulez qu’elle soit prête au printemps, il me faudra l’entraîner deux fois par jour. Au moins.

— Eh bien fais donc.

— C’est bien la raison pour laquelle vous devrez me la confier l’avant midi et l’après-midi.

Il a insisté sur le « et ».

— Ce n’est pas discutable. Durant la matinée et les vêpres, elle restera à mon service.

— Bien ma Dame. Nous commencerons donc très tôt, à matines ou plus tôt si nécessaire. Elle sera de retour avant votre lever. Nous poursuivrons du déjeuner au dîner et elle pourra dès lors pourvoir au rituel du bain.

— C’est très bien. Tu peux aller, Seth, laisse-nous.

L’homme s’incline devant la Concubine et adresse un signe de tête à Fille.

— Nous nous verrons donc dès matines, dans la basse-cour.

Fille opine du chef, toujours silencieuse.

***

Une fois seules, la petite servante ne manque pas d’assaillir de questions sa Maîtresse.

— Aurai-je le droit de sortir ?

— Tu iras à ta guise dans la haute et la basse cour du château. Tu seras autorisée à quitter l’enceinte extérieure pour te rendre en ville ou ailleurs, mais toujours accompagnée de Seth.

Un chaperon, pense Fille. Mais au moins pourra-t-elle aller et venir à sa guise.

- Tu aurais pu plus mal tomber. Il est plutôt bel homme, ne trouves-tu pas ?

C'est vrai qu'avec ses allures de gentilhomme et ses larges épaules, sa chevelure brune au désordre savament orchestré, Seth ne manque ni de prestance, ni de charisme. Même à quelque distance, ses yeux marrons laissaient entrevoir des reflets verts et dorés. Fille n'avait jamais vu ça auparavant. Elle avait du se faire violence pour ne pas planter son regard dans le sien.

- Bof, répond-elle, arrachant un sourire à Layna.

— Et pourquoi dois-je être prête au printemps ? Il y a fait allusion.

— Ca, se sont mes affaires. Seth t’enseignera l’usage de l’Acier, je t’enseignerai la Chair. Toi, tu te contenteras d’apprendre.

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