Riot

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La nuit porte conseil, mais comment fait-on lorsque nous ne fermons pas l'oeil de la nuit ? Lorsque notre pensée n'arrive plus à s'arrêter, qu'elle ne nous laisse aucun répit. Je suis le genre de personne à me remettre en question. Je suis le genre de personne à me poser mille et une question auxquelles je trouve des réponses, mais pas une réponse.

Le cinéma et les restaurants n'étaient plus notre quotidien, nous l'avions laissé à de nouveaux amoureux, Lola et Félix. Ils en avaient mis du temps à officialiser leur relation, mais ils avaient fait les choses bien, sans précipitation avec beaucoup de tendresse. Nous aussi nous avions fait ainsi.

Nous ne sortions plus pour se balader ou faire les magasins que tous les deux, ou que très rarement. Il ne s'agissait plus qu'une histoire de temps. Lequel de nous deux osera s'affirmer face à l'autre. Ni lui, ni moi pourtant ma place n'était plus dans ses bras. Je m'y sentais désormais oppressée et ils m'étaient inconfortables. Cela faisait des nuits que nous n'avions pas dormi dans le même lit, que nous rentrions chacun de son côté, que nos messages restaient sans réponse.

Il était tard et j'étais fatiguée. Lola n'était pas là, ils étaient sortis en amoureux ce soir-là. Je m'étais assoupie dans ses bras entendant les quelques bribes de conversation. J'avais déjà suggéré à Jules de rentrer à la maison, mais il n'était pas fatigué et souhaitait profiter de ses amis et de la venue de son cousin un peu plus âgé que lui qui vivait à Londres. J'étais restée éveillée jusqu'à leur arrivée. Lola, Félix, Adrien et Nico s'étaient pointés à notre table. Je m'étais redressée surprise de les voir ici, tous ensemble.

- Lola: On peut se joindre à vous ?

Le groupe leur fit une petite place à notre table. Par chance, nous n'étions que 5 et la table étaient assez grande surtout que c'était un vendredi calme, car le bar était pratiquement vide.

- Moi: Mais votre soirée en amoureux ?

- Lola: Oh, on est allé voir notre film puis Nico nous a écrit et comme je savais que tu serais ici, j'ai proposé de vous retrouver !

Mon regard se posa timidement sur lui qui regardait le bar.

- Moi: Trop gentil !

Lola avait rapidement fait les présentations, mais Jules les avait déjà rencontrés auparavant. Très vite, les garçons avaient créé des liens entre eux. Seul Adrien, fidèle à lui-même ne disait rien. Il me fixait d'un air interrogateur du bout de la table comme s'il voulait me parler. Jules avait resserré son étreinte autour de moi tandis que je me dandinais pour ôter habilement ses bras en lui indiquant que je voulais me lever afin de ne pas éveiller de soupçon. J'avais réussi à me délivrer et m'étais éclipsée un court instant. Lola m'avait accompagné pour me faire un petit débriefing de sa soirée en amoureux qui me donnait les frissons tant c'était beau à imaginer. A notre retour, j'avais pu remarquer le regard sévère que Jules portait sur Adrien et lorsque j'avais repris place près de lui, il m'avait murmuré à l'oreille.

- Jules: Il se passe quoi ?

J'avais feint de ne pas comprendre sa question, mais mon regard ne m'avait pas couvert. Impossible de combattre ses yeux bleus. Il n'avait pas insisté sur le moment, mais comme nous étions rentrés ensemble, nous en avions malheureusement parlé. Il était assis sur le bord du lit pendant que je coiffais mes cheveux lorsqu'il avait relancé le sujet.

- Jules: Il te plaît ?

- Moi: Pardon ?

- Jules: Ce type...

Mon regard fixa un instant son reflet dans la glace avant que je ne le rejoigne sur le bord du lit en glissant délicatement mes mains dans les siennes.

- Jules: Il te plaît, n'est-ce pas...

Non. J'aurais pu le lui dire mais le voulais-je. Il soupira lourdement en me regardant.

- Moi: Je suis fatiguée...

- Jules: Ouais...Dormons...

Il s'était levé, avait lâché mes mains puis éteint les lumières avant de me rejoindre dans les draps froids. Je m'étais couchée dans un bout et lui dans l'autre, mais nous nous étions retrouvés au petit matin comme si tout allait bien. Lorsqu'il était reparti aux alentours de midi, il y avait quelque chose de différent entre nous. Peut-être que nous nous étions dit définitivement au revoir ce matin en partageant une toute dernière fois notre amour.

Le week-end est vite passé et je n'avais eu aucune de ses nouvelles. Je n'en avais pas demandé non plus et je n'en attendais pas forcément. Ana avait passé le sien chez ses grands-parents et elle semblait ressourcée. Lola était rayonnante encore plus qu'avant et moi, j'avais cette impression d'être absorbée par quelque chose de sombre. En cours, c'est facile de donner le change, mais à la maison, c'est une autre histoire. Heureusement mes parents, peintre et journaliste ne sont pas souvent présents, ils ne m'accordent plus autant de temps qu'avant, mais je ne leur en veux pas. Ils ont toujours été très carriéristes. Ma grande soeur est partie à l'étranger pour étudier les langues dès ses 18 ans alors j'ai l'habitude d'être seule. Je le suis encore plus depuis Jules. Je ne le croise plus dans les couloirs, je ne reçois plus tant de ses messages et de ses appels comme si cela se faisant naturellement, nous nous éloignons. Une main amicale m'accola doucement, Félix.

- Félix: Alice, ça va ? T'as l'air ailleurs... Me questionna-t-il calmement.

- Moi: Oui... et toi ? Le rassurai-je.

-Félix: Oui j'allais à la répète et Lola doit sûrement m'attendre dehors. Tu te joins à nous ?

Me voyant un peu hésitante, il enchaîna.

- Félix: On va pas faire tard et on se mangera un truc rapide au studio.Tu viens ?

J'allais lui répondre lorsque Lola prit une décision à ma place.

- Lola: Elle vient, c'est clair !

Elle me souri tendrement et embrassa Félix avant de se retourner et de nous prendre tous les deux par le bras en nous menant à l'extérieur, direction le studio. Pendant que les garçons répétaient, nous révisions et discutions tout en les écoutant.

- Lola: Tes parents sont absents jusqu'à quand?

- Moi: Durant deux semaines à compter d'aujourd'hui.

- Lola: Tu peux venir chez moi ou chez Ana si vraiment, tu trouves le temps long...

Mon regard croisa par hasard le sien et Lola me mit un léger coup de coude en me fixant bouche bée.

- Moi: quoi?

- Lola: Vous flirtez où je rêve `?

- Moi: Tu rêves... Dis-je calmement en continuant de maintenir mon regard dans le sien.

- Lola: Il te plaît et tu lui plais, je crois bien...

- Moi: Pas du tout. Il est...étrange...

- Lola: Il est surtout tombeur... Je préfère te prévenir.

- Moi: Pas étonnant... typique son style.

- Lola: et avec Jules ?

- Moi: Silence radio.

- Lola: Et toi ?

- Moi: Sincèrement, je ne sais pas.

- Félix: LOLA, TU PEUX VENIR VITE FAIS ? L'appela-t-il du bout du studio.

J'avais rangé mes affaires en son absence et ils avaient mis fin à leur répétition. Adrien m'avait rejoint en prenant place sur le fauteuil, j'avais sorti mon téléphone pour éviter tout contact, mais il avait engagé la conversation.

- Adrien: Tu me reproches quelque chose ?

Mes yeux quittèrent mon écran pour les siens.

- Moi: Non...

- Adrien: Alors quoi ?

- Moi: Quoi... répétai-je doucement.

- Adrien: Tu seras là ce week-end ?

- Moi: Je ne sais pas...

- Adrien: Prends ton mec, mais viens.

J'étais restée silencieuse et il avait passé une main gênée dans ses cheveux sans rien ajouter. J'entendais Lola rire au loin avec Félix.

- Adrien: Ca donne presque envie...

- Moi: C'est clair!

Il me fixa suspicieux et je fixai mes mains timidement.

- Adrien: C'est pas ça en ce moment ?

Non, c'est pas ça en ce moment et pourtant lorsque je te vois, je n'ai qu'une envie, c'est t'embrasser. Je ne te comprends pas et te trouve terriblement agaçant, mais secrètement, je rêve de nous. Une lueur s'alluma dans ses yeux foncés et un léger sourire se dessina sur son doux visage. Alice, reprend toi. Tu craques.

- Alice: Tout va bien.

- Adrien: Tant mieux.

Il se rapprocha un peu plus près avant de s'apercevoir que nous n'étions pas seuls, Nico venait de nous rejoindre.

- Nico: et vous, une pizza ça vous dit ?

- Adrien: Absolument.

- Moi: C'est parfait, oui.

Les jours passaient étonnamment, vite. J'étais finalement venue. Leur nouvelle chanson avait plu et l'ambiance était festive. Nous avions tous beaucoup bu pour fêter l'excellent accueil de ce nouveau single qui sera également sur toutes les radios françaises et le jeu de la bouteille s'était rapidement fait dangereux. Il avait déjà forcé un bisou entre Ana et Nico, rendu ivre Bérald à coup de shoot et déshabillé Félix. Elle désigna finalement Adrien après avoir tourné près de six fois sur elle-même. Lola aux idées fourbes me dévisagea un court instant avant de communiquer le gage d'Adrien.

- Lola: Bien, bien, bien... Il va falloir que tu fasses un gros suçon dans le cou d'Alice.

- Nico: Bien visible si possible!

- Moi: Pardon ! Demandai-je confuse en la regardant.

- Bérald: Ouh... Il est chaud Adri !

- Ana: Elle aussi... Surenchéra-t-elle en me faisant un clin d'oeil.

Il m'envisagea un instant avant de se lever pour me retrouver. Il me tendit sa main patiemment pour m'aider à me relever. D'un geste habile et rapide, je quittai mon fauteuil pour gagner la porte de la loge en pensant réussir à le fuir, mais lorsque ma main pressa la poignée, il me rattrapa fermement avant de me retourner et de me plaquer violemment contre le mur plongeant ses prunelles sombres dans les miennes. Un cri de surprise m'échappa lui arrachant un sourire. Alors que je m'apprêtais à riposter, il était trop tard. Sa bouche était déjà posée sur mon cou. Ma tête se cogna doucement au mur et mon corps entier se décrispa un court instant. Mes mains, elles, s'étaient accrochées à ses poignets et mon dos collé au mur cherchait à s'en décoller. C'était peut-être court, mais j'avais fermé les yeux et mes sens s'étaient quelque peu emballés. J'avais relâché mon emprise sur ses poignets et rouvert mes yeux dans les siens plus noirs et vifs qu'avant. Il ne se recula pas tout de suite.

- Moi: C'est très dangereux. Murmurai-je encore sous l'effet de surprise.

- Adrien: Vraiment ?Répliqua-t-il tout doucement.

- Moi: Vraiment...

Il leva les yeux au ciel en souriant et se mordant la lèvre inférieure. Les autres plus loin, nous rappelaient pour la suite du jeu. Plus il se faisait tard et plus les gages se faisaient compliqués. J'avais arrêté le jeu, car ma tête tournait et bien que Félix me faisait boire beaucoup d'eau cela ne passait pas. Impossible de tenir debout et de faire deux pas sans perdre l'équilibre. Lola avait déjà vomi plusieurs fois. Ana s'était carrément endormie avec Nico sur le sofa. Seuls Adrien et Bérald étaient dans de bonnes conditions après cette soirée arrosée.

Dehors, il faisait froid, mais cela me faisait beaucoup de bien. De l'air frais caressait mon visage. Les rues étaient désertes. Nous avions réveillé Ana et Nico. Lola et Félix étaient rentrés de leur côté comme Bérald, Ana et Nico. Adrien s'était à nouveau porté volontaire pour me raccompagner, mais cette fois, le chemin fut bien plus long malgré les raccourcis. Il marchait vite, trop vite.

- Moi: Attends-moi...

Il s'arrêta pour m'attendre. Il avait sorti une main de sa poche pour attraper la mienne et m'imposer un rythme plus rapide. Il avait froid avec son petit manteau camel.

- Moi: Tu marches beaucoup trop vite et je ne me sens pas bien...

Il s'arrête à nouveau avant de s'attarder sur mon cou. Je passai une main curieuse.

- Moi: C'est très voyant ?

- Adrien: On est bientôt arrivé...

- Moi: J'ai mal aux pieds...

Il m'attrapa fermement par la taille avant de me balancer sur son épaule et d'avancer plus rapidement.

- Moi: Eh ! Mais repose-moi, ça ne va pas ? criai-je.

- Adrien: On ira bien plus vite, mais concentre-toi et ne me vomi pas dessus Alice...

- Moi: Adrien! repose-moi ! Dis-je en m'agitant.

- Adrien: Arrête de bouger, on est presque arrivé !

Il me déposa doucement au sol en me demandant le code de ma porte. Il l'ouvrit la lumière du hall d'entrée nous agressa les yeux habitués à la nuit. J'avais péniblement passé la porte et il était resté dehors.

- Moi: Tu viens?

- Adrien: Ne me dis pas que tu ne vas pas réussir à monter les escaliers ? S'amusa-t-il gentiment.

- Moi: Je ne trouve déjà pas mes clés... Dis-je en fouillant dans mon petit sac en bandoulière.

Il s'approcha sa cigarette encore à moitié consommée.

- Adrien: Laisse-moi regarder...

Il plongea sa main dans mon sac et ressorti un rouge à lèvre brun puis un petit emballage carré en plastique qu'il me montra surpris.

- Moi: Quoi ? Dis-je sans gêne.

- Adrien: Prévoyante. Plaisanta-t-il avant d'exhiber fièrement les clés.

- Moi: Merci. Lancai-je en les lui prenant des mains.

- Adrien: Bonne nuit, Alice.

- Moi: Tu ne montes pas `? Je peux faire une chute dans l'escalier...

Son regard me questionna et en crachant sa fumée, il referma la porte derrière lui.

- Adrien: Je monte alors...

Je lui souri bêtement avant de commencer les étages, les clés en main. Cinq étages plus hauts, nous y étions enfin. La porte était ouverte et j'avais déjà enlevé ma paire de bottines en les balançant dans le hall. Il m'attrapa doucement par les épaules en plaçant son index sur ma bouche.

- Adrien: Tes parents !

Je pouffée doucement de rire en le fixant tendrement.

- Moi: Je suis seule à la maison... Ils ne sont pas là.

- Adrien: Ah...

Ses yeux se baladèrent plus tranquillement dans l'appartement.

- Moi: Tu veux que je te fasse visiter ? Ou boire un verre ? Le questionnai-je joyeusement.

- Adrien: Non... Je vais y'aller...

- Moi: C'est dommage...

- Adrien: Au contraire, c'est mieux pour toi...

C'était le retour du regard intense et du silence gênant. Je lui avais souri et il s'était avancé doucement pour me donner un baiser doux sur la joue.

- Moi: Tu peux dormir ici, tu sais ? Il est tard.

- Adrien: Ne t'inquiète pas Alice. Bonne nuit.

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