Chapitre 8 : Révolte (1)

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Vyrian suivit Yomi du regard. Lorsqu’elle parvint à l’entrée du village, le scientifique en fut soulagé, les traits de son avatar se détendirent, avant de se crisper de nouveau en voyant l’effervescence qui régnait et l’arrivée inaperçue de la jeune femme. Pourquoi personne ne lui venait-il en aide ? Qu’est-ce qui pouvait bien causer une telle agitation ?

Nerveux à l’idée qu’une nouvelle catastrophe se soit produit, Vyrian interrogea Mère.

Que se passe-t-il ?

— Les Visionnaires retransmettaient le déroulement de la Cérémonie dans tous les villages. Ces mages sont capables de voir un endroit sans s’y trouver et d’en diffuser les évènements.

Lors de l’attaque des Sanctionneurs, la transmission s’est coupée. Lorsqu’elle a repris, les terrains étaient déserts. Sous le choc, certains habitants sous le contrôle des contrées d’Hydrios, de la Confrérie et d’Hemyra accusèrent Alteryx pour son manque de vigilance et sont allés jusqu’à menacer ses habitants. En plus d’être attristés par la perte des leurs, les Altériens ont peur.

Atterré par les raccourcis politiques, Vyrian reporta son attention sur Yomi. La jeune femme titubait sous l’effet de la douleur et de la fatigue. Une silhouette vint lui porter secours alors qu’elle s’effondrait terrassée par l’épuisement. Vyrian mit quelque temps à reconnaitre Dungal. Le vieil homme prit son élève dans ses bras et plaça une rune sur son front qui disparut absorbée par l’organisme de la jeune femme.

Intrigué le scientifique interrogea Mère.

Que fait-il ?

— C’est une Rune de Connaissance. Comme son nom l’indique, une fois configurée, elle permet de léguer à quelqu’un des informations.

— Peut-on savoir de quoi il s’agit ?

— Non, nous pouvons juste supposer l’importance de ces informations. Ces runes sont très dures à produire.

Soucieux, Vyrian ne parvenait à savoir quelles données Dungal léguait à son élève. Il en savait trop peu pour faire des pronostics. Il le regarda glisser une feuille pliée en quatre dans une des poches de la jeune femme, avant de se diriger vers son foyer.

Vyrian s’interrogeait sur les motivations de l’homme, il ne semblait pas vouloir de mal à la jeune femme, pourtant à son expression, son action le répugnait.

Dans un premier temps personne ne fit attention à eux, puis un homme reconnu la jeune femme. Le nom de la Mysticys circula sur toutes les lèvres avant de parvenir à ses parents.

Une femme et un homme fendirent la foule. Vyrian reconnut les parents de Yomi non pour la ressemblance avec leur fille mais pour l’affection qu’ils lui portaient. Mère entreprit de les lui présenter rapidement.

— Voici Dallan et Fara, les parents d’Ylméria et de Yomi. Dallan est le chef de ce village. Pour accéder à ce rang, il faut être sélectionné par le Comité, il s’agit de l’esprit des défunts dirigeants qui lors du solstice d’été soumettent aux prétendants leur jugement. Plusieurs critères sont évalués : la puissance, la pureté et la sensibilité magique. Une fois cette pré-sélection effectuée, les candidats dévoilent leur proposition, le Comité juge leur crédibilité et leur potentiel. Les deux derniers participants sélectionnés révèlent aux peuples leur projet et les habitants élisent leur maire. Fara quant à elle est la soigneuse responsable de la santé des créatures mythiques présentes à Altéryx et dans sa contrée.

Vyrian aurait aimé qu’une telle politique existe dans son monde, bien qu’il ne se faisait pas d’idée. Cette démocratie d’apparence idéaliste recelait comme tout système politique une part de corruption. Bien que rien ne le laissait supposer de premier abord, Vyrian en était persuadé.

Tandis que Fara caressait délicatement les cheveux de sa fille, son mari dispersait la foule qui s’était formée autour d’eux. Alors que la famille s’apprêtait à rentrer chez elle, un homme leur barra la route.

A la vue de cet inconnu, Vyrian eut un mauvais pressentiment.

— Qui est-ce ?

— Il s’agit de Faric, un des membres du conseil et le rival de Dallan aux dernières élections.

A la lumière de ces nouvelles informations, Vyrian était persuadé que si l’homme entravait la progression du couple ce n’était nullement pour le bien de Yomi. Il voyait en elle, un enjeu politique. Le nouveau venu ne chercha même pas à cacher ses intentions.

— Dungal, remets-la-nous !

Le mentor glissa un regard vers les parents de Yomi, ni l’un ni l’autre ne semblaient disposer à obtempérer. Comme attirés par la tension grandissante entre les opposants, les villageois se rassemblèrent de nouveau autour de la famille.

Dallan se positionna devant Dungal et sa fille.

— Faric, laisse-nous passer ! Elle sera interrogée en temps voulu. Avant tout elle doit recouvrer ses forces. Le temps que nous perdons ici est du temps perdu pour contrer la rébellion.

— Nous sommes bien d’accord, le temps est une source de puissance et je n’ai pas l’intention de la laisser m’échapper.

Tout autour de la famille, les villageois se rapprochèrent resserrant l’étau. Cernés de toute part, Vyrian vit la mère de Yomi observer les visages des villageois, il en fit de même. Tous deux parvinrent à la même conclusion.

Tandis que Fara interrogeait son mari, Vyrian questionnait Mère.

— Que leur est-il arrivé ? Ils ne semblent pas être eux-mêmes.

Ce fut Dallan qui apporta la réponse.

— Faric s’est servi de la détresse des personnes pour prendre le contrôle de leur volonté à l’aide de son Violeâme.

— C’est exact. Tu avoueras que ce serait dommage de passer à côté d’une telle occasion.

— Inconscient !

— Entreprenant ! Attrapez-les !

La foule poursuivit son avancée. Dallan tenta de les chasser, à peine parvenait-il à gagner du terrain que plusieurs villageois poussaient derrière le faisant reculer. Vyrian comprenait la volonté du maire de ne vouloir blesser son peuple, mais s’il ne les neutralisait pas, il n’arriverait à rien. Les prévisions du biologiste se révélèrent justes, la chevelure poivre et sel du maire fut englouti dans la marée humaine.

Un peu plus loin, Fara employait une autre stratégie. Vyrian la vit tenter de raisonner les villageois mais dès qu’une personne semblait sous le point de réagir à ses paroles, quelqu'un d'autre prenait sa place et tout était à recommencer. A son tour, la chevelure blonde striée de mèches blanches de la soigneuse se perdit dans la foule.

A présent seul face aux sbires de Faric, Dungal tentait de rester le plus en retrait possible, de façon à protéger Yomi. Il ne s’agissait que d’une question de temps avant qu’il ne se fasse à son tour submerger.

Vyrian focalisa son attention sur le mentor. Un espoir mitigé d’une froide certitude tiraillait les traits de son image mentale, lui donnant une apparence évanescente. Alors qu’il regardait Dungal tenter de réaliser une percée dans la foule, une main surgit dans son dos et le mit à terre. Yomi lui fut retirée et confiée à Faric.

Les trois opposants furent conduits de force à la mairie. Piégés au sein de la foule, ils ne pouvaient que suivre le mouvement. Malgré tout, Vyrian les vit tenter de remonter la population à contre-courant, leur résistance fut vaine et leur arrivée brutale. Ils parvinrent de peu à garder leur équilibre.

Le temps qu’ils se remettent d’aplomb, la capacité maximale de la bâtisse fut atteinte et les portes se refermèrent d’elles-mêmes.

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