À la putain d'église qui nous rit au nez

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Chère toi,

Putain, y a toujours cette église. Comme un mauvais gag cosmique, un clin d'œil moqueur du destin qui nous balance sa merde en pleine face. On dirait une pièce de théâtre foireuse, un Shakespeare sous acide, avec des twists cruels juste pour nous faire chier. Et dire qu'on s'est rencontré à un cours de théatre est encore plus ironique. Au début, je te parlais même pas. Tu m'emmerdais grave, trop folle, un mélange explosif que je gérais pas. Je me sentais minuscule, bordel, et la vie, c'est souvent que ça : une chaîne de moments où t'es réduit à une ombre, à te demander si t'es à la hauteur de quoi que ce soit. Et pourtant, on a tenu sept putain d'années sous le même toit. Un pacte du diable, un contrat gravé dans la chair, qu'on négocie pas sans y laisser des morceaux.

Je me souviens de ce premier rendez-vous, une blague de l'univers qui pue la fatalité. Tu m'ajoutes sur Facebook, j'y crois pas une seconde, je me dis que c'est un piège. On cause, j'empile les conneries parce que je suis un con patenté, c'est mon truc. On se fixe sur un parking, putain de parking anonyme. Toi, tu veux juste rouler, filer dans la nuit comme si on fuyait nos vies. Moi, je crève d'envie d'un verre pour noyer l'angoisse. Toi, des frites, un caprice banal qui masque tout le reste. On fait ce que tu voulais, comme des gamins perdus dans un monde trop grand.

Et puis, on retourne sur ce même parking, à côté de nos cours de théâtre. La vie, c'est une scène pourrie où les décors se recyclent, et la chute finale te prend toujours par surprise. On est dans ta bagnole, toi fatiguée, les yeux lourds de secrets. J'ai glissé ma main sur ta nuque, sous tes cheveux emmêlés, un geste timide, presque volé. J'ai retiré ma main, et là, un éclair de violence dans tes yeux, un truc primal et sauvage. "Je ne t'ai pas dit d'arrêter", que tu balances, agressif, violent, et putain de mignon à la fois. Quand je suis sorti, je visais juste un baiser sur la joue, un truc innocent. Mais tes lèvres se collent aux miennes, un assaut que j'avais rien demandé, et qui a tout changé.

Après ça, on s'est habitués, comme on s'habitue à une drogue dure. J'ai envahi ton espace, squatté ton appart, jusqu'à ce que ça devienne notre chaos. Et là, cette église, putain d'église qui nous mate de haut, celle que je vois encore aujourd'hui, comme un témoin muet de nos conneries. Puis notre gosse est arrivé, mélé aux tiens. Un miracle bordélique, une force brute qui te fait croire que la vie a un sens, même si c'est du pipeau. On déménage, et bam, on atterrit en face d'une autre église. Un signe ? Ou juste Dieu qui se marre, ce connard, en nous collant au train sans jamais lâcher un kopeck, nous laissant nous débattre dans notre merde.

Puis y a eu les autres. J'ai arrêté d'être ton pilier, ton mec, ton tout. Je me suis fait dépasser par le bordel, par la vie qui nous a bouffés. J'ai souffert, putain, comme un chien. J'ai essayé de me battre, de griffer pour garder un bout de nous, mais au fond, c'était que de la souffrance pure, une descente aux enfers sans billet retour. Je t'en voulais pour tout, pour les choix, pour les silences, pour les ombres qui dansaient entre nous. C'est ce qu'on fait quand on pige que dalle à la situation : on accuse, on rage, on se bouffe les tripes.

Mais aujourd'hui, c'est toi qui souffres, toi qui t'es pris un mur en pleine gueule. Et ça me fait chier, bordel, je veux pas ça pour toi. Pas de satisfaction perverse, pas de "bien fait". Juste une putain de lame dans le ventre de te savoir en vrac.

Bientôt, tu vas poser tes valises à vingt mètres de chez moi, et cette église sera toujours là, à nous narguer. L'église où on se mariera jamais, alors que je crève d'envie de te passer une putain de bague au doigt, de sceller ce tango du diable une bonne fois pour toutes. Parce que si la vie est une merde, je la veux avec toi, dans toute sa gloire chaotique.

Tu sais, cette église, c'est comme la pilule rouge que je t'ai tendue un jour, sans cadeau d'emballage, juste la vérité crue qui te brûle la gorge. Elle nous hante, cette salope de pierre, avec ses cloches qui sonnent comme des rappels à l'ordre. On a dansé autour d'elle pendant des années, évitant le grand saut, mais elle est là, témoin de nos ratés, de nos passions qui flambent et s'éteignent.

Quand tu souffres maintenant, c'est comme si elle se foutait de nous, cette église. Mais moi, je suis encore le pilier, même cassé, même usé. Pas pour te sauver, non, juste pour être là quand le monde s'écroule. Parce que notre histoire, c'est pas une vie lisse, c'est un champ de bataille où on se relève toujours, même avec les tripes à l'air.

L'aube se pointe, cette garce, et illumine encore cette putain d'église en face. Je me réveille avec un goût de cendres, des souvenirs qui collent comme une gueule de bois éternelle. Et je me demande : si tu revenais, avec tes folies, tes colères, tes gosses et tes merdes ? Est-ce que je reprendrais tout ça ? Ouais, bordel, parce que sans toi, c'est juste un vide, une scène vide où les églises rient seules.

Je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve, mais cette église, elle sait. Elle nous attend, comme un autel qu'on a jamais osé profaner. Et moi, je t'attends encore, avec ma bague imaginaire et mon cœur en miettes.

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