Chapitre 19

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Deux secondes… c’est le temps qu’il avait détourné le regard de Kai pour tenter de se concentrer sur la teinture. Pour éviter d’aller trop loin, de le brusquer et de lui faire peur encore une fois. Son sang ne fait qu’un tour lorsqu’il sent la pression ardente contre ses lèvres. La surprise peut se lire dans la prunelle de ses yeux. Son souffle s’est coupé et le temps s’est arrêté. Il n’y a plus que leurs lèvres qui se cherchent et se dévorent. Conscient qu’il est en train de sombrer et de se laisser emporter par le tumulte du désir, il ne songe pourtant pas à interrompre leur étreinte. Bien au contraire… Ses mains se posent fébrilement sur les hanches de Kai, l’attirant contre lui dans un grondement sourd. Il réprime son envie et sa frustration depuis bien trop longtemps pour se soucier des sons qui s’échappent de sa bouche. Ses gestes deviennent de plus en plus pressants et sans s’en rendre compte, il fait pivoter son partenaire et le hisse sur la surface marbrée de la commode. Il quitte la chaleur de ses lèvres pour embrasser son cou, effleurant sa peau de ses dents et de son souffle rauque. Il se laisse guider par les marques plus claires, imprimant chaque détail en les embrassant fiévreusement. C’est comme si un monde inconnu était dessiné sur sa peau, une carte peinte à l’encre blanche, un univers à découvrir, parcourir du bout de ses doigts et à aimer de ses lèvres et de ses yeux.

Les soupirs qu’il entend ne font que le griser davantage, comme s’il s’agissait d’une drogue qu’il était en train d’inhaler à chaque inspiration. C’est exaltant, douloureusement enivrant et cruellement insuffisant. Dans un mouvement saccadé, il se débarrasse de sa chemise et la jette par terre, peu soucieux des plis qui y apparaîtront plus tard. Il redresse ses yeux embrumés par le désir sur Kai et lui arrache un nouveau baiser brûlant en se pressant contre lui. Les mains de ce dernier ne demeurent pas oisives et elles s'approprient tout ce qu'elles parviennent à agripper. Son dos, son visage, ses muscles saillants, elles ne laissent rien au hasard… Léo perd définitivement le peu de contrôle quand il sent l’une d’entre elles suspendre son geste juste au bord de sa ceinture. C’est une torture de ressentir cette proximité, de n’être séparé que par un simple bout de tissus.

“Bordel… Tu me rends complètement dingue…” Souffle-t-il de sa voix grave et lourde dans le creux de son cou. Il sourit en remarquant à quel point il est capable de le faire frissonner d’un simple souffle. Kai bascule la tête en arrière quand ses dents s’enfoncent suavement dans sa peau, gémissant un râle enrayé. Clairement, il n’y a pas que Léo qui perd le contrôle.

Kai est tout autant au bord du précipice que lui et pris d’une volonté audacieuse, il défait la ceinture et le bouton du pantalon de l’homme debout entre ses jambes. L’air vient à lui manquer lorsque Léo réplique son geste et appuie son bassin contre le sien avec insistance. Il ne distingue plus le haut du bas et l’ivresse qui le submerge fait bondir son cœur dans sa poitrine. La friction est délicieuse et électrifie chacun de ses nerfs au comble du supportable. Il s’empare avidement des lèvres de Léo, se privant un peu plus de cet oxygène précieux. Ses caresses sont de plus en plus frénétiques, la peau de Léo brûle sous ses doigts tremblants tandis qu’il descend toujours plus bas. Il peut l’entendre pousser un râle sourd dans leur baiser lorsque sa main se glisse sous le dernier morceau de tissu les séparant. Fébrile et hésitant d’abord, il s’empare de son membre et le fait glisser entre ses doigts.

Leurs fronts pressés l’un contre l’autre, Léo s’exprime en une série de phrases incohérentes à chacun de ses mouvements langoureux. Ardent, passionné et brusque, il gronde, vibre et l’embrasse comme s’il n’y avait plus de lendemain. Suivant l’initiative de Kai, il copie ses gestes, suit son rythme de va-et-vient et un sourire comblé vient se glisser dans leur baiser quand il entend à son tour des geignements enivrant se mêler à ses râles sourds. Leurs corps s’accordent à la perfection, leurs souffles sont haletants et leurs sens en ébullition totale.

Léo s’agrippe à ce corps qui l’enlace, pour sentir les frissons grisants s’abattre sur lui quand son visage se perd dans le creux de son cou, pour ne pas s’écrouler sous la sensation électrisante de cette main qui s’active plus bas. Son cœur, son souffle, son corps entier déraille complètement. Kai lui fait découvrir un panel de frissons si différent de tout ce qu’il a connu. C’est comme si sa chair appelait désespérément ce toucher unique.

Pris d’une fièvre exaltante, Kai tremble et des vertiges lui font tourner les sens, un tourbillon de flamme, d’ardeur et de désir. Il se raccroche au seul rocher dans cette mer orageuse. Le centre de son tourment, de son ivresse. Ses jambes le piège un peu plus contre lui, s’appropriant un peu plus encore de cette extase qui le rend fou. Il est en chute libre. Chaque muscle de son ventre se tend comme un arc, parcouru d’une électricité indécente. Enrouée, sa voix n’est qu’un filet essoufflé, un murmure saccadé. Fasciné par l’afflux d’émotions et de sensations, il se sent ivre de tout, de lui, de son toucher, de sa bouche, de son regard…

L’orgasme les saisit comme une bourrasque violente, chacun leur tour. La pièce n’existe plus, même leur nom leur échappe l’espace d’un instant tellement les sensations les assaillent.

Léo laisse son visage retomber sur le torse de Kai, à bout de souffle. Bon sang, s’il avait soupçonné que ce soit si bon, il n’aurait probablement jamais pu se retenir jusque-là… De ses yeux mi-clos, il admire les démarcations qui zèbrent la peau du jeune homme. Il ne veut pas céder, mais finit par fermer les yeux pour pouvoir récupérer son souffle et son cœur qui est encore en train de tambouriner avec force.

Kai n’en mène pas plus large de son côté et il est bien heureux de ne pas être debout, car ses jambes ne le tiendraient manifestement pas. Il se laisse aller à la béatitude, enfouissant son visage dans la chevelure bleue de Léo et inspirant son parfum. Cette fragrance un peu épicée et suave… Elle le transporte littéralement dans une bulle de réconfort et de chaleur. Il ne pense plus à rien, si ce n’est le bonheur intense dans lequel il flotte.

L’envie de rester ainsi, l’un contre l’autre, est tellement tentante. Pourtant, Léo se redresse au bout de quelques longues minutes, un sourire doux et sincère étiré sur les lèvres. Il ne dit rien, saisit l’un des gants de toilette rangés sur l’étagère derrière Kai et le passe rapidement sous l’eau avant de lui tendre.

“Merci…” Bredouille Kai en baissant le regard, pris d’une légère honte. Le sourire que Léo lui offre efface sa gêne en un battement de cils. Ses yeux s’accrochent aux siens, embrumés par la vague de plaisirs qu’ils viennent de vivre et de partager. “Je pense… qu’une douche ne sera pas de trop.” Dit-il en s’inclinant sur le côté pour rincer le gant de toilette dans l’évier.

“Ouais, mais d’abord, il faut que l'on s’occupe de tes cheveux…” Fait remarquer Léo sur un ton moqueur en pointant le contenu de la boite qui s’est vue éjecter au sol. Kai l’observe se baisser pour ramasser la teinture et se mord la lèvre. Jusque-là, il n’avait pas vraiment pris le temps de le détailler. En revanche, maintenant que la tension est retombée, il ne peut s'empêcher de fixer le torse nu de Léo. Ce dernier s’en rend compte et arbore un rictus canaille.

“J’en déduis que ça te plait ?” Sa voix est teintée d’un malin plaisir pendant qu’il dépose ce qu’il vient de ramasser et appuie ses mains de part et d’autre de Kai, le piégeant ainsi entre son corps et l’armoire. Il se délecte de l’emprise qu’il semble avoir et ses yeux se voilent à nouveau de désir. Désormais qu’il a découvert ce vertige intime, il risque de se perdre souvent dans les méandres de ses envies charnelles. Il réprime un frisson quand la main hésitante de Kai se pose sur son torse et glisse sur sa peau brûlante. Elle trace les contours de ses muscles, lentement et avec tendresse. Les yeux mi-clos, Léo se laisse envahir par la sensation douce. Ce contact n’a rien à voir avec les gestes empressé d’il y a quelques instants. C’est une caresse curieuse, un toucher délicat et terriblement plaisant. Il pourrait rester là pendant des heures, profitant de chacun de ses mouvements sur sa peau. Les doigts de Kai s'arrêtent juste en dessous de ses côtes et il peut deviner son regard empli de question au travers de ses cils entrouverts.

“Tu as une cicatrice ?” Finit-il par demander en arquant un sourcil. Léo se redresse et frotte sa nuque nerveusement. À force de vivre avec, il en avait presque oublié l’existence. En fait, non, il se force à l’oublier. La fine ligne cours sur plusieurs centimètres, suivant la courbe de ses côtes. Elle n’apparaît que pour l’œil attentif, car elle se fond avec les contours de ses muscles. Il se racle la gorge avant de répondre. “Ouais… C’est une longue histoire et pour être honnête, je ne me suis jamais vraiment souvenu de ce qui s’était passé.” Dit-il évasivement.

Kai redresse son regard sur lui, curieux d’en apprendre plus. C’est la première fois qu’il découvre quelque chose de ‘secret’ et il brûle de savoir comment il a bien pu se faire une telle cicatrice. Il sourit dans l’espoir de le rassurer et de lui donner l’envie de se confier plus. “On a le temps, si tu veux en parler, bien sûr…”

Léo soupire en saisissant la notice de la teinture. “Je ne me souviens réellement pas de grand-chose, tout ce que je peux te dire, c’est que j’ai eu un accident assez lourd. Suffisamment pour me faire oublier plusieurs mois de ma vie.” Il marque un temps de pause en mélangeant les deux composants. “Je… Tu as déjà fait une teinture par le passé ?” Demande-t-il soudain. Le changement de sujet radical n’échappe pas à Kai et ce dernier hausse les épaules en niant de la tête. Il n’est pas du genre à forcer les gens à parler et il est déjà content que Léo veuille bien lui partager ne serait-ce qu’un fragment.

“Alors, on ferait mieux de faire un test, ce serait con que tu fasses une allergie… C’est pas un produit de haute gamme, je préfère ne pas prendre le risque de te brûler la peau avec…”

Kai se fait une note mentale de laisser de côté le sujet de l’accident et attire l’homme aux cheveux bleus pour l’embrasser doucement. Il le sent sourire et se détendre un peu contre ses lèvres et cela lui donne une bouffée de bonheur.

“Comment tu veux qu’on teste le bazar ?” Comme il n’en a jamais fait, il n’en a aucune idée. Il pose surtout la question pour que Léo se détache de son histoire. Ce n’est pas si important, cela appartient au passé et il lui en parlera bien le jour où il se sentira plus à l’aise. Ce qui compte, c’est qu’il se sente bien à ses côtés, là, maintenant. Même s’il meurt d’envie de tout découvrir à son sujet, de le connaître par cœur et de pouvoir le soutenir comme lui le fait avec son problème de peau.

Léo applique une goutte de colorant sur le bout de son doigt et l’étale derrière l’oreille de Kai en souriant. “Si ça te pique, on rince direct. Si au bout d’une dizaine de minutes, t’as aucun effet, alors c’est bon.”

“Okay…” Répond Kai en faisant battre nerveusement ses jambes dans le vide. Dix minutes, c'est long quand on ne sait plus de quoi discuter… Léo pose doucement sa main sur l’une de ses jambes pour le calmer. “Je…” Commence-t-il, le visage torturé par les mots qui ne veulent pas sortir aussi facilement qu’il l’aimerait. “Désolé… J’aimerais t’en parler, mais chaque fois que j’essaie de me souvenir, cela me frustre plus qu’autre chose. C’est le trou noir absolu et je n’ai que les morceaux que l’on m’a raconté il y a longtemps.”

Kai laisse ses doigts glisser sur la main de Léo, un geste rassurant et empathique. Il perçoit la détresse dans sa voix, et il ne peut que comprendre à quel point parler de certaines choses est difficile. Ce serait bien hypocrite de sa part, vu comment il garde son secret maladivement. Puis, il s’est déjà résigné plus tôt à ne pas le forcer à en parler. Un sourire taquin aux lèvres, il fait glisser un doigt dans l’un des ourlets du pantalon de Léo, l’attirant plus près de lui.

“Je t’aime quand même, mémoire bancale ou pas…”

Sa moquerie se voit récompensée par une légère morsure dans le cou ainsi qu’un fredonnement approbateur. “J’ai une très bonne mémoire… Si l’on ne compte pas les trois mois qu’il me manque.” Souffle-t-il contre la peau de Kai avant de se redresser doucement. Son regard se fige sur le miroir et son sang ne fait qu’un tour. La surface est embrumée, alors qu’ils n’ont pas fait couler d’eau chaude. Plus étrange encore, des lettres se dessinent lentement, comme si quelqu’un traçait leur forme du bout du doigt. Léo n’a pas besoin de chercher le responsable, il n’y en a qu’un seul capable de faire ce genre de petit tour de magie. ‘Menteur…’ Le texte s’efface et un énorme point d’interrogation se dessine en grand sur la totalité du miroir. Menteur ? Mais menteur de quoi ? C’est quoi ces conneries, encore ? Léo plisse les yeux avec frustration, essayant de donner un sens à cette accusation. Cependant, il ne comprend pas. Il n’est pas du genre à mentir, et rien que l’idée de le faire lui donne des frissons désagréables. Il n’a absolument aucune raison de le faire.

“Tu m’écoutes ?” La voix de Kai le sort de ses pensées. “Euh, pardon… Tu disais ?” Lâche-t-il en reportant son attention sur l’homme assis devant lui. Merde, il a complètement déphasé.

“Je disais que cela fait bien dix minutes… Et que cette armoire n’est pas la plus confortable. Donc, on pourrait peut-être commencer la teinture ?” Le sourire sur son visage le détend et quand il regarde à nouveau le miroir, ce dernier ne renvoie que leurs reflets, comme si rien n’avait jamais été écrit dessus. Il vaut mieux ne pas prêter trop d’intérêt aux tentatives de Kano de foutre le bordel. Il risque de devenir dingue s’il se laisse avoir par son petit jeu. Il se ressaisit et attrape les gants fournis dans l’emballage. Ils sont bien trop larges et même ses grandes mains flottent dedans. Ils auraient pu mettre des sacs en plastiques à la place, que cela aurait été du pareil au même. Ne surtout pas regarder le miroir…

“Bon… Alors, c’est parti.” Il espère que Kai ne remarque rien de son trouble et applique avec une concentration intense le produit sur ses cheveux. Il n’en met que sur les mèches blanches, car il serait bête d’abîmer ses beaux cheveux noirs.

“Tu sais…” Léo marque un temps d’arrêt. Il se doute qu’il n’est aucunement obligé de reprendre le sujet, mais Kai s’est ouvert à lui, alors il sent comme une pointe de regret se faufiler dans son cœur. C’est comme s’il avait besoin de s’expliquer, de tenter de lui donner quelque chose en retour pour sa confiance. “Je ne peux pas te dire comment j’ai atterri à l’hôpital, car tout le monde s’est efforcé de me cacher ce qu’il s’est passé… Mais, je n’étais pas vraiment un enfant de chœur, à l’époque. Ce qui m’a amené à imaginer un million de scénarios, allant de la bagarre, agression, accident de la route, à la simple glissade dans les escaliers. J’ai épluché les journaux, les rapports de mon hospitalisation, mais je n’ai jamais rien trouvé. Mon père a mis tout en œuvre pour passer l’incident sous le tapis et a pris soin de me laisser dans l’ombre. Cela n’a pas dû être banal en tout cas, car j’ai eu une double fracture des côtes, ainsi qu’une commotion assez violente. La cicatrice est le résultat des broches qu’ils ont placées pour éviter que je me perce un poumon.” Il pousse un long soupir avant d’afficher un sourire fataliste.

Les mains de Kai se posent doucement sur ses hanches et il frémit. Son regard ambré est rassurant et lui apporte une vague de chaleur. Il ne sait pas trop si c’est le texte sur le miroir qui l’a poussé à vouloir se justifier, ou s’il avait tout simplement besoin d’en dire plus. Ce n’est pas comme s’il avait quelque chose à prouver… Le silence agréable s’installe alors qu’il termine les dernières mèches. Il retire ensuite ses gants et les jette dans la petite poubelle à leurs pieds. Il lui est reconnaissant de ne pas le pousser à parler, qu’il se contente de le soutenir et de lui apporter du réconfort par son simple toucher.

“Au moins, cela aura eu l’effet de me calmer… Je pense que sans ça, je serai encore le sale gosse que j’étais avant.”

Il relève la main de Kai contre ses lèvres. “Et je doute que tu aies aimé la personne que j’étais avant…” Ajoute-t-il, un éclat taquin dans les yeux. En fait, il ne doute pas, il est sûr que s’ils s’étaient rencontrés il y a une dizaine d’années, cela n’aurait jamais abouti à ce qu’ils ont à présent. Il retient un rire en réalisant l’âge qu’aurait eu Kai à cette époque. Ouais, aucun doute, le détournement de mineur n’a jamais été son truc.

Ses yeux restent accrochés sur la main de Kai, entrelacée dans la sienne. Il lève un sourcil, interrogateur. Kai suit son regard sans vraiment comprendre. Il ouvre la bouche pour demander ce qu’il y a, mais la referme avec stupeur. Léo le dévisage, ses traits figés entre l’incrédulité et le doute. “Dis-moi que tu m’as pas mené en bateau l’autre jour…” Sa voix est emplie d’amertume et Kai sent son cœur s'arrêter net. Il déglutit en niant vivement de la tête. “Non… vraiment pas…” Il fait fléchir ses doigts sans arriver à saisir comment il est possible de guérir si vite. Il n’y a aucune trace, pas la moindre cicatrice à voir sur le dessus de sa main. C’est comme s’il ne s’était jamais blessé. “Je…”

Léo reste perplexe. Il a clairement du mal à y croire et il aimerait avoir une explication à laquelle se raccrocher. Le mot sur le miroir lui revient, et il se demande soudain si Kano ne fit pas référence à cela justement… Si c’est le cas, il risque de ne pas bien le prendre. Sa mâchoire se resserre et son corps se tend. Kai pose son regard sur lui, perdu.

"Ça n'a pas de sens…”

“Je te le fais pas dire.” Rétorque Léo.

“Non, je veux dire… J’ai explosé le miroir de ma salle de bain… J’avais des coupures sur le poignet…”

Dire qu’il est surpris serait un euphémisme. Léo ne sait pas ce qui doit le choquer le plus. Que Kai ait éclaté son poing dans un miroir, ou que ses blessures se soient magiquement soignées ?

“Euh…” Parvient-il à dire en se frottant la joue. Kai, de son côté, grimace avant d’élaborer. “C’est ce soir là où il m’a vraiment parlé pour la première fois, alors j’ai flippé et j’ai réagi sous un coup de stress.”

Léo reste silencieux un long moment, tournant l’explication dans tous les sens possibles. “Tu penses… Que c’est grâce à vos échanges ?” Hasarde-t-il en doutant qu’il ait choisi les bons mots pour exprimer sa théorie. Mais, il ne voit que ça qui pourrait coïncider. Kano fait partie du surnaturel, peut-être qu’en fin de compte, c’est lui la raison de cette guérison énigmatique. C’est ça, ou Kai invente des conneries. Étrangement, il ne pense pas que ce soit le cas. Cela n’a pas l’air d’être son genre de chercher des embrouilles juste pour le plaisir de le faire. Il se fait une promesse silencieuse de questionner Kano la prochaine fois qu’il a le déplaisir de le croiser.

“J’en sais rien… Peut-être ?” Kai est dubitatif, mais il n’a pas d'autres explications qui lui viennent à l’esprit. Tout ça le dépasse et le désir d’avoir une vie normale le tiraille à nouveau. Imaginer que son frère ait eu la moindre bonne intention lui semble invraisemblable, même s’il l'a aidé à revenir à lui plus tôt. Cela ne fait pas de lui une bonne personne.

“Et si on rinçait tes cheveux ? Je pense que ça devrait être bon…”

Kai hoche la tête distraitement, encore préoccupé par le mystère de sa main. Il ne ressent plus la moindre douleur non plus. C’est fascinant autant que c’est flippant. L’influence de Kano sur sa vie prend de plus en plus d'ampleur et cela l’effraie.

Léo glisse une main sur sa joue avant de s’écarter pour aller faire couler l’eau. Lui aussi aimerait obtenir des réponses, mais le seul à pouvoir les fournir n’est pas présent, et il n’est pas pressé de le revoir entre nous soit dit. Les réponses vont donc attendre le temps qu’il faut et il ne compte pas se laisser miner le moral par cet énergumène et ses entourloupes. Il se tourne de trois-quart, un sourire malicieux pendu aux lèvres.

“Tu comptes rester assis là longtemps ?”

La question sort Kai de sa torpeur et il se laisse glisser en bas de l’armoire sur laquelle il était assis. Il arque un sourcil en voyant que Léo se débarrasse du reste de ses vêtements, l’incitant d’un regard à faire pareille. Il l’observe faire un pas en arrière, puis un autre jusqu’à ce que l’eau dévale sur son corps et lui trempe les cheveux. Kai se mord la lèvre, incapable de décrocher ses yeux du regard de braise de Léo. Merde… Il est vraiment trop sexy…

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