Lettre à l'être en devenir.

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Lettre à ce petit être qui parlait la langue des coups et des insultes, qui pouvait mettre un coup à quiconque était sur son chemin.

Petit bout d'homme abandonné par sa mère, qui a poussé comme il pouvait, arrosé par les mots de mépris quand on lui parlait de sa mère.

Petit bout d'homme perdu au milieu de 250 enfants, qui ne voulait pas perdre, qui ne voulait pas partager, qui ne voulait pas comprendre. Comment comprendre ? Il n'avait qu'une seule chose à faire : être "méchant", ça justifiait le fait que sa mère était parti. Parce que sinon, à quoi ça servait d'être "gentil".

Le point final à ma lettre, c'est le sourire de toutes ces interrogations que j'ai eues, au cours de cette année. Une exclamation de joie de le voir ponctuer son chemin d'un nouveau pas, vers quelque chose de plus apaisé. Un jour viendra, je lui souhaite, où il ira chercher des réponses à des questions, où il ira demander des comptes, pour cette soustraction forcée et cette division subie.

Pour cette forte gifle que la vie lui a mise, il m'a envoyé deux claques. Je les ai prises, je les garde en mémoire, comme le garde-fou d'un quotidien musclé. Je sais aussi que je n'ai jamais laché, j'ai avancé à tâtons, sur un fil tendu entre bienveillance et sévérité ferme. J'ai posé le cadre, alors que cela aurait été si facile de clamer que je ne pouvais plus l'encadrer. J'ai relevé le défi, la tête et je suis reparti vers le challenge. J'ai regardé à droite et à gauche, il y avait d'autres fermetés et d'autres bienveillances, je les ai alliées aux miennes et nous avons formé une solide équipe. Nous nous sommes appuyées les unes sur les autres, pour mieux rebondir face à ses sursauts de colère.

Petit à petit il a grandi, il a entendu le "non" de notre voix, il a senti la force pleine de velours de notre gant, il a baissé la garde et il a commencé à regarder autour de lui, pour sentir la solidité rassurante du cadre et il s'est mis à cheminer dans une toute autre voie.

Le voilà élève en cette fin d'année, il a retrouvé le chemin d'un emploi du temps, il a retrouvé la force tranquille des apprentissages, il a retrouvé, dans le fouillis de ses émotions, la base solide de ses compétences.

Je crois en la puissance de la communication vraie et sincère, je crois en la force d'un sourire au-delà des "ça suffit", pour donner une 2ème chance.

Je crois en la détermination d'un village pour éduquer un enfant, je crois à la détermination, à l'espoir du "on fait autrement et on y croit". Je crois que tout est possible quand on y croit et qu'on se serre les coudes, qu'on tend la main et qu'on porte à bout de bras celui qui n'arrive pas à tenir debout.

Ce soir, ma lettre est pour ce petit, "mal -être" en passe d'aller mieux.

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