Quand une cocotte se fait voler dans les plumes...

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Un dimanche calme et agréable se profilait enfin après une semaine terrible.

Des visiteurs russes étaient venus et certains s'étaient montrés entreprenants.

Voire gourmands.

La renommée du One-Two-Two dépassait les frontières et on venait de loin pour y goûter les fruits défendus.

On se prélassait et on se reposait.

L'ambassade de Russie avait fait livrer des centaines de petits chocolas fourrés aux noisettes. Car les réceptions de l'ambassadeur sont toujours un succès, comme on disait...

Petits chocolats fourrés, bouteille de vodka de qualité, une Beveldere Vodka au goût de vanille...

On rêvassait...

Puis, comme toujours, Madame est venue briser la douceur ambiante. Elle entra comme un général entre dans son mess et vint se planter devant les femmes, les mains sur les hanches et les yeux noirs de colère.

" Madame ?, murmura une des filles, inquiète à l'avance.

- Gabrielle ! Vous vous moquez de qui dans cette maison ?

- Mais... De personne, madame !

- L'ambassadeur de Russie est un ami de cet établissement. Il m'a fait part de votre amitié profonde pour l'un de ses attachés les plus reconnus.

- Je ne fais que mon travail, madame. Si certains ont des envies spéciales, je me plie. Mais le prince Sernine en a une grosse et il a voulu me prendre par-derrière et il n'avait pas assez lubrifié le tout, ce qui a généré quelques difficultés et je..."

Madame Germaine pâlit de rage et hurla :

" MAIS QUI VOUS PARLE DE VOS RATAGES ??? Je parle du cadeau que le prince Sernine vous a fait et que vous avez odieusement utilisé pour me tromper. Et tromper ainsi notre malheureuse clientèle.

- Un cadeau ? Vous voulez parler de mon étole de cachemir ?

- MAIS NON ! Je parle de ce que je viens de découvrir caché sous votre matelas ! Un recueil de haïkus anciens que vous avez pillé durant toute cette semaine. Sans aucune vergogne ! Yasô, Kyoroku, Bashô Matsuo, Yosa Buson, Ryôkan... Une honte ! "

Madame exhiba le petit recueil à la jolie couverture de velours rouge et qui portait en dédicace sur la première page :

" A ma charmante Gabrielle, avec toute mon affection.

Son prince."

Gabrielle sourit avec tendresse et murmura :

" Oui, c'est un cadeau du prince. Je ne pensais pas mal agir en l'utilisant, Madame.

- Oui, oui. Ne me mentez pas ! Je ne suis pas stupide.

- Non pas, Madame.

- Maintenant, plus de tricherie, Gabrielle ! Je veux un haïku chaque jour ! Joli, bien tourné et poétique. Faites un effort, voyons !

- Oui, Madame."

Personne n'osa rire cette fois, mais Madame foudroya du regard Jérôme.

" Tiens, Jérôme, vous allez vous mettre aux acrostiches, vous.

- Pourquoi moi ? Je n'ai rien fait !

- Justement ! Il n'y a pas que les filles à travailler dans cette maison ! Vos clients méritent aussi de vous voir faire de la poésie ! "

On osa soupirer de dépit et Madame condamna deux autres filles à participer au front commun, l'une devait faire des palindromes et l'autre aider Corine avec ses sonnets. La malheureuse en devenait folle et ne mangeait plus.

En partant, Madame ordonna à Gabrielle d'aller s'entraîner à la cuisine. Il y avait des radis noirs et des courges d'une assez belle taille.

On était dans une maison sérieuse ici !

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