21 février - 11 heures

2 minutes de lecture

Gabrielle du Plessis était si belle au soleil de février. On se retournait pour la regarder. L'homme qu'elle tenait par le bras était le plus fier de tous.

Admiratif et prêt à tout pour lui plaire.

Comme tous les hommes autour d'elle.

" Je te remercie, Arsène. Cette sortie me fait énormément de bien.

- Tu ne vas pas bien, ma Gabrielle ?"

Arsène Lenormand était si fier, si heureux. Il cherchait la joie dans les yeux de sa compagne.

Elle rayonnait de bonheur.

Vraiment ?

" Si, je vais bien ! Tout est pour le mieux. Regarde-moi !"

Echappant à l'étreinte de son amant, la belle esquissa quelques pas de danse en pleine rue. Cachée derrière son masque vénitien, devenue jolie chatte colorée, elle riait.

Arsène Lenormand, audacieux chef de la Sûreté, portait costume étincelant et cape sombre, son masque était une lune et ses yeux clairs brillaient dans l'ombre.

" Gabrielle !

- Rattrape-moi le cogne !"

Autour d'eux passait le cortège du Boeuf Gras, on défilait et on applaudissait. Les enfants jetaient du riz sur les chars fleuris. Un boeuf énorme, nommé Dagobert, marchait, la tête haute, fort de ses 1303 kilos. Il n'avait peur de rien ni de personne, malgré les garçons bouchers vêtus en sacrificateurs et les femmes habillées de toges qui agitaient des encensoirs à son passage.

Il était la puissance incarnée.

On le suivait avec respect. L'animal, couronné de fleurs, passait dans les rues de Paris. On avait pavoisé les fenêtres. La folie de la Belle Epoque dans toute sa splendeur parvenait à faire oublier les tristesses du moment.

Bientôt une guerre ?

A l'Est, que se passait-il ?

Quelle était cette menace qui pesait sur le monde ?

Le sentait-on vraiment dans cette liesse de Carnaval ?

Gabrielle chantait en dansant une ronde. Arsène Lenormand vint la chercher et saisit sa taille, follement amoureux.

" Tu es irresponsable !

- Je suis prêtresse de Bastet ! "

La chatte sourit avant d'embrasser son compagnon.

Allez voir passer le bœuf gras,

Triomphateur morne et placide

Qui de l'abattoir homicide

Semble déjà rêver tout bas !

Accompagnez de vos hourras

Ce roi qu'attend le régicide !

Allez voir passer le bœuf gras

Triomphateur morne et placide.

Écrasez-vous, badauds, soldats,

Femmes, enfants à l'œil avide,

Et vous, gueux dont le ventre est vide,

Pour remplacer un bon repas,

Allez voir passer le bœuf gras !

" Tu es une déesse, Gabrielle, souffla Lenormand, en serrant la cocotte contre lui.

- Et vous avez trop bu, mon ami ! Plus de vin pour vous !

- Ce n'est pas le vin qui m'enivre...

- Menteur !"

Gabrielle riait en tournant son visage vers le soleil. Paris vivait autour d'elle, des milliers de personnes défilaient dans les rues de la capitale, on suivait un énorme animal et on chantait. Le soleil annonçait un printemps précoce.

On était heureux, non ?

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