Quand Madame a des rêves de grandeur...

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La cérémonie de la Pentecôte avait été longue et douloureuse. Surtout pour les genoux.

Les pensionnaires du One-Two-Two avaient retrouvé le salon chaleureux du bordel avec un réel plaisir.

On espérait finir la journée dans le calme, avec des cafés et des petits gâteaux. On déchanta en voyant revenir Madame.

Car Madame Germaine était contente ! Son chignon était agrémenté de roses en bouton qui attiraient le regard de tous. Depuis la messe, personne n'avait réussi à regarder autre chose. Ou à se concentrer sur quoi que ce soit d'autre.

Dans le salon, le maléfice se poursuivit. On n'arrivait pas à se concentrer sur les paroles de Madame tant son chignon paraissait doué d'une vie propre. Les roses virevoltaient aux mouvements de la patronne. Là, elle parlait et ne priait plus, les roses en bondissaient de plus belle.

Suzy en restait bouche bée.

Ce que Madame prenait pour de l'admiration. Elle couvait d'un oeil bienveillant sa plus jeune pensionnaire.

" Et puisque nos fonds nous le permettent avec les recettes engrangées ces dernières semaines, j'ai prévu de..."

Les roses dansaient et dansaient encore.

Mathilde frappa discrètement Suzy derrière le haut du crâne et cette dernière se redressa en couinant.

" Oui, Madame ! C'est une merveilleuse idée !, clama Suzy.

- Oui, mon petit. Je le sais !, fit gentiment la patronne, inconsciente de ce qui venait de se passer. J'ai attendu ce jour saint pour vous l'annoncer !"

Le souvenir des sonnets et autres haïkus faisait trembler certains et certaines.

Les recueils promis mais toujours pas écrits hantaient les esprits de beaucoup.

Mais Madame ne parlait pas de ça !

Elle était contente et avait des rêves de grandeur !

Grandiloquente, elle s'exclama :

" Je vais acheter l'immeuble voisin et agrandir le One-Two-Two ! Il va y avoir de nouvelles pensionnaires et j'ai prévu aussi des nouveaux invertis !

- Hooooo ! fit Louison, abasourdie.

- N'est-ce pas ? C'est merveilleux !"

Les roses dansèrent une dernière fois avant de s'échouer sur le côté gauche. L'une d'elles se tenait au bord du gouffre.

" Elvire va nous apporter quelques-unes de ses amies et j'espère que Jérôme se montrera à la hauteur !, ordonna Madame. Il me faut quatre filles, jolies et pleines de charme et deux hommes, jeunes et musculeux !

- Mais... C'est beaucoup de monde, ça !, murmura Margot. On va avoir assez de clients ?

- Avec les jetons de Gabrielle et les amis de M. Laroche, nous n'arrivons plus à faire face à la demande ! Elvire n'a pas les moyens d'offrir ainsi son cul à toute la Légion Etrangère, c'est trop !

- Merci, Madame, approuva cette dernière.

- Et le tourniquet de Ménilmontant a fait des émules ! Margot, si discrète qu'elle est, a maintenant une spécialité dont on raffole chez ces messieurs.

- Laquelle ?

- La tyrolienne bordelaise ! Le jeton est de toute beauté ! Voyez plutôt !"

On regarda Margot. Cette dernière rougit adorablement.

Suzy examina le jeton puis s'écria, alarmée :

" Mais comment tu fais pour tenir debout comme ça sur une..."

La nouvelle claque qu'elle reçut la fit taire.

Mais la question méritait d'être posée.

Même Gabrielle, une ancienne du métier, ne comprenait pas vraiment comment une telle position était possible.

" Sans les mains ?"

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