30 mai - 15 heures

3 minutes de lecture

" Voici les fauves, ma chère amie.

- Ils sont magnifiques."

Gabrielle du Plessis se tenait devant les cages de fer du Jardin des Plantes et examinait les animaux avec admiration. Elle tenait le bras de monsieur de Massiban et cherchait sa main.

Le vieil homme se laissa faire et sourit dans sa barbichette.

" Ils sont aussi effrayants, ajouta la cocotte.

- Ils sont sûrs de leur force et cela leur suffit."

Un tigre faisait les cent pas et le public le regardait en riant. Monsieur de Massiban secoua la tête.

" La folie des hommes déteint sur les animaux. Ce malheureux spécimen serait bien mieux dans sa jungle.

- A quoi voyez-vous ça, mon ami ?

- Marcher ainsi n'est pas naturel."

Gabrielle examina l'animal. C'était un tigre, immense et magnifique, dont le pelage resplendissait et le ventre traînait au sol. Il paraissait bien nourri et bien logé. Mais l'était-il ?

Sa manière de marcher ainsi ne paraissait pas naturelle en effet et portait à confusion.

" Il serait donc malheureux ?, demanda Gabrielle.

- Il l'est, mon amie. De toute évidence !"

La femme se tut et la visite du Jardin des Plantes se poursuivit par la singerie.

Ce fut alors que le vieux professeur de la Sorbonne interrogea sa compagne. Avec une pointe d'espiéglerie, il lui demanda :

" Vous avez demandé à visiter la Ménagerie du Jardin des Plantes pour une raison particulière ?

- Vous me manquiez, très cher. Ce n'est pas une raison suffisante ?

- Cela me ravirait, si cela était vrai. Je ne suis pas sûr, hélas, d'être aussi précieux à vos yeux !

- Je vous en prie, mon cher. Vous exagérez !"

Monsieur de Massiban sourit sans répondre, il embrassa la main de son amie.

" Bien. Je suis donc à votre service, ma chère. Que souhaitez-vous de moi ?

- Un haïku ?, plaisanta Gabrielle du Plessis.

- Je ne sais pas si je saurais écrire de la poésie... Je suis bien vieux, voyez-vous !

- Balivernes, se moqua la cocotte.

- Alors ? Que puis-je pour vous ? Demandez et je suis à vous !

- Apprenez-moi comment on chasse le tigre en Inde."

Là, le vieux professeur perdit son sourire moqueur. Il ouvrit de larges yeux.

" Comment ça ? Vous vous intéressez à la chasse ?"

Gabrielle marcha quelques pas sans répondre, elle se sentait ridicule, et en même temps, le souvenir des paroles de sa rivale lui vrillait l'estomac. Maudite Elvire !

" Vous promettez de ne pas vous moquer ?

- Je promets tout ce que vous voulez. Vous me savez votre ami maintenant ?

- Vous êtes mon ami !

- Bien ! Je ne me moquerai pas.

- J'ai un ami auquel je tiens tout particulièrement. Il est chasseur et explorateur, mais je me sens si inférieure. J'ai peur de le perdre, voyez-vous.

- Perdre un ami ? Je ne comprends pas !"

La singerie offrait la vision de larges cages dans lesquelles évoluaient plusieurs primates. Chimpanzés et ouistitis mangeaient des fruits et regardaient, de leurs yeux tristes, les humains qui les contemplaient. Un pitoyable spectacle en réalité.

Monsieur de Massiban saisit la main de son amie et l'attira à lui.

" Dites-moi ce qui vous chagrine, ma chère.

- Voyez-vous, j'aime beaucoup un de mes amis. Monsieur Etienne de Vaudreix et j'ai peur qu'il se lasse de moi. Je ne connais rien à son monde. C'est un chasseur et je suis ignorante.

- Croyez-moi, ma chère, tenta de rassurer Monsieur de Massiban. S'il vous apprécie autant que vous l'appréciez, vous ne risquez pas de le perdre.

- J'aimerais en être sûre mais une de mes collègues veut en faire sa conquête !

- HA ! Je comprends ! Vous manquez de confiance en vous, ma chère.

- J'ai surtout plus d'âge et moins d'attraits !"

Monsieur de Massiban serra la main de Gabrielle du Plessis et la ramena vers les fauves. Là, il désigna le tigre qui continuait ses cents pas.

" On organise des battues à dos d'éléphant en Inde. Et on tire sur tous les tigres qui s'enfuient, effrayés par le bruit. Mais un vrai chasseur connaît son animal et le traque dans la jungle. Votre Etienne de Vaudreix est-il un vrai chasseur ?

- Oui !

- Alors, il traque son animal et s'enfonce dans la jungle pour le tuer. Parfois, on peut aussi utiliser un appat. Une chèvre attachée à un poteau et le chasseur attend sa proie.

- Etienne doit traquer sa bête.

- Donc, je vais vous montrer les différents fauves et vous parlez de leurs capacités.

- Merveilleux ! Merci, professeur !"

Gabrielle retrouvait son vrai sourire, ce qui attira un clin d'oeil de monsieur de Massiban.

" Mais je ne pense pas que vous ayez besoin de ça, Gabrielle. Si ce monsieur de Vaudreix vous aime, il ne vous quittera pas pour une autre. Même plus jeune !

- Comment pouvez-vous en être si sûr ?

- Parce qu'il suffit de vous regarder ! On se damnerait pour un sourire de vous ! Que ne ferait-on pas pour un peu de votre affection !

- Flatteur ! Parlez-moi du plus dangereux animal au monde !"

Monsieur de Massiban ménagea ses effets, il caressa sa barbichette et annonça :

" L'hippopotame !"

Ce qui surprit la cocotte. Gabrielle s'était attendue à un félin, elle se retrouvait devant un animal massif, se baignant mollement dans leur bassin...

Dangereux ? Vraiment ?

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