31 juillet - 20 heures

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La journée était décadente à Pétersbourg. On se levait tard, on se promenait sur la Perspective Nevski, on buvait du thé noir au Café Littéraire...

Alexei le lui avait bien expliqué la première fois lorsqu'il l'avait servie lui-même. Gabrielle avait osé commander un café et le prince avait souri.

" Moya zvezda, ici nous ne buvons pas de café, mais du thé noir !

- Du thé noir, Aliochka ?, s'amusa la cocotte.

- Au samovar !"

Les serveurs du Café Littéraire, établissement réputé de la Perspective Nevski, laissèrent agir le prince, éberlués devant son audace. Gabrielle posa sa tête sur ses mains croisées, aussi moqueuse qu'admirative devant son Russe.

Alexei Sernine avait fait venir un samovar, un engin tout en laiton doré, étincelant, pour faire bouillir l'eau. Le prince, tel un acteur sur la scène, s'agitait autour du samovar, remplissant d'eau la bouilloire, mettant les feuilles de thé de Chine dans la passoire de la théière, refermant le couvercle avec un large sourire. Il attisa le feu dans le foyer, y jeta de petites pommes de pin. Il obtint un thé très concentré, le "zavarka" qu'il fallait diluer avec l'eau chaude du samovar.

L'homme était heureux et Gabrielle dut reconnaître que c'était le meileur thé de sa vie. Subtilement épicé par les pommes de pin, mélangé à du sucre et du citron, il était fort et revigorant.

Alexei intrigua sa compagne en glissant un cube de sucre entre ses dents, c'était ainsi qu'on le buvait en Russie ! Gabrielle l'imita et les deux amants en rirent longtemps.

" Ici, on boit le thé de cette manière !"

On vivait une vie à deux, en laissant les enfants à la garde des nourrices de la famille impériale. Hélène et Charles goûtaient à la vie des enfants de la riche noblesse russe. Entre les promenades dans les parcs des palais et le musée zoologique, ils avaient fort à faire.

Ne disait-on pas que Lizette, la jument préférée de Pierre le Grand, y était si criante de vérité qu'on avait envie de la caresser ?

Le soir, le prince emmena sa Gabrielle, couverte de bijoux et de soieries, au théâtre Mariinsky afin d'y écouter le concerto n°3 de Sergueï Rachmaninov, joué par ce dernier.

Gabrielle du Plessis fut saisie en pénétrant dans la salle de concert, tous les fauteuils étaient vides. Il n'y avait pas de public.

Dans sa loge personnelle, le prince aida sa compagne à retirer son manteau et cette dernière l'interrogea, moqueuse :

" Ainsi, nous sommes au théâtre ce soir ?

- Mais oui, moya zvezda, sourit Alexeï.

- Et nous avons le théâtre rien que pour nous, Alexeï ?

- Bien sûr."

Tout naturellement, le prince s'assit et tout naturellement, il embrassa la main de sa compagne.

" Nous dînons en tête à tête, moya zvezda.

- Evidemment. Où avais-je la tête ?"

Le prince regardait en souriant la cocotte, elle soutint son regard tandis que des serveurs en livrée préparaient une table pour eux.

On amenait de la vodka Belvedere et des plateaux d'argent couverts de blinis et de caviar. Sur d'autres plateaux, des pirojkis et des varenikis attendaient d'être dégustés.

" Viande, purée de pomme de terre, gelée de cerise... A toi de choisir, Gabrilenka.

- Toi ?"

Les lumières s'éteignirent, la musique commença, Rachmaninov était devant son piano...

Et le prince dégustait sa vodka pailletée d'or sur les seins de sa belle...

Za vashé zdorovie ! – за ваше здоровье [A votre santé !]

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