J’ai enfin quitté cette zone de guerre, ce chenil de chiens enragés. C’est officiel, ce chemin de croix prend fin !
J’écrase ma cigarette, la nicotine c’est encore une tueuse qui avance masquée. Comme si fumer était l’antidote obligatoire pour déstresser quand le combat fait rage et que l’éperon dont est chaussé l’ennemi nous blesse et commande le rythme du combat.
Cette guerre qui ne semblait pas finir était le prix à payer pour parvenir à la paix, mais à quel prix !
Aujourd’hui je reviens chez moi et jamais je n’aurais imaginé devoir me battre pour sauver la terre de mes ancêtres.
J’avais lu de histoires sur les grandes batailles d’antan, sur les héros que j’idéalisais. La guerre c’était bien moche quelles qu’en soit les raisons et il fallait l’éviter à tout prix. J’étais bien loin d’imaginer que j’allais être concerné….
A la fleur de l’âge, je fus cependant enrôlé un beau matin, j’allais participer à cette horreur, à ce désastre de la guerre.
Mon agenda : cours d’université, fêtes, concerts de musique, pièces de théâtre, expositions, rires entre amis lors d’un bon repas…. Tout cela disparaissait dans cette spirale furieuse où tout est allé vite, très vite.
Il y eu pourtant des signes annonciateurs
Mais à l’aube de mes vingt ans, je ne les voyais pas ou ne voulais pas les voir à vrai dire.
Et quand la sirène de la mobilisation eut retenti, les rêves d’amour et de carrière que je m’étais bâti s’envolèrent.
Parmi les appelés, je distinguais des visages familiers, ceux de mes amis qui, comme moi, avaient quitté leur sourire de convenance et qui battaient le bitume.
Fusils à l’épaule, en uniforme et casqués ils répondaient aux ordres d’un gradé, maintenant leur seul professeur !
Il fallait suivre le plan, endurer la faim, la soif, la peur, la boue, le vent, le soleil lourd qui fait perler le désespoir, la pluie qui assombrit l’horizon, le tonnerre qui gronde, les attaques aériennes qui plombent !
Ne formant plus qu’un corps avec mes frères d’armes, j’écrasais les fleurs de la vie pour m’allonger fusil à la main sur un tapis de désolation. Nous, pauvres diables, luttions désormais pour plus grand que nous, et alors que les balles sifflaient au-dessus de nos têtes, nous répondions avec le même bruit funeste.
C’était maintenant notre quotidien et notre jeunesse jadis rayonnante, disparaissait sous les coups de feux.
En nous, s’élevait cependant l’espérance, celle qui fait tenir, celle à laquelle on s’accroche…
Aujourd’hui le monde s’est dévêtu de la terre et du sang de la guerre et je reviens…