Chapitre 26

7 minutes de lecture

Loïc s’y était préparé mais ne l’avait pas tout à fait vraiment réalisé. Il allait lui falloir constamment, du moins pendant tout le temps que durerait leur histoire, le plus longtemps possible, accepter de vivre ce genre de situation. Car du moment où ils poursuivirent leur soirée en improvisant un dîner dans un restaurant qui accepta de les servir sur leurs petites tables disposées sur la terrasse, sa versatile petite amie redevint la Maxine qui papillonnait, chouinait, lui faisait du rentre-dedans pour le simple plaisir de créer le charmant air embarrassé qu’elle adorait voir s’afficher sur le visage de son compagnon.

Côte à côte avec lui, assise et contemplant la lune se reflétant sur les flots du fleuve en contrebas, Maxine piochait de sa main droite avec des petits coups de fourchette, dans les fagots de haricots verts lardés, et brillants de la fine pellicule de graisse qui en sortait. Puis jetant un œil à droite et puis à gauche, voyant qu’il n’y avait personne pour venir les déranger, elle se mit à faire glisser les doigts de sa main gauche sur la cuisse de Loïc, faisant semblant de dessiner des formes et des arabesques mais dont la seule finalité était de venir frôler avec plus ou moins d’insistance son entrejambe.

« Mais que fais-tu ? fit Loïc en voyant son manège.

— Chut, répliqua-t-elle en enfournant le quart du fagot dans la bouche de son petit ami pour le faire taire. Je prépare la chantilly pour mon dessert. »

Loïc faillit s’étouffer en avalant de travers, tellement il ne s’attendait pas à cette repartie. Maxine profita de son effet de surprise pour défaire la boucle de ceinture, faire sauter les trois premiers boutons du jean. Et avant même que Loïc ne puisse mettre sa main en protection, elle introduit la sienne sous le tissu en attrapant le membre en éveil. Elle l’enserra d’une pression légère et ferme avec sa paume de sorte qu’il ne puisse pas se dégager.

La porte du restaurant s’ouvrit et Loïc attrapa son blouson pour le mettre sur ses cuisses et masquer ainsi la fourbe attaque de sa compagne. Le serveur s’avança un peu hésitant à cause de la pénombre.

« Tout se passe bien, madame, monsieur ?

— À merveille, fit Loïc avec un sourire légèrement crispé car Maxine commença à jouer avec son instrument en le décalottant sans autre forme de procès.

— Voulez-vous commander les desserts tout de suite, il y a toujours un peu de temps d’attente pour les préparer. Du coup, si vous voulez être en mesure d’enchaîner…

— Moi, je veux votre plus beau dessert, la Pêche Melba, fit Maxine en posant sa tête sur l’épaule de son petit ami avec un sourire angélique alors que ses doigts diaboliques s’amusaient à convoquer le liquide pré-séminal.

— Un simple café. » répondit Loïc avec un petit sursaut dans la fin de sa phrase.

Le serveur fronça les sourcils mais ne chercha pas à comprendre ce qu’il se passait. Il opéra un demi-tour.

« Je vous prépare cela. Je reviens.

— Prenez votre temps, nous ne sommes pas pressés. » fit Maxine.

La porte se referma et Loïc en profita pour lui murmurer :

« Tu comptes faire quoi comme ça ! »

Maxine continua de sourire et de la main droite éloigna sa chaise pour se dégager le passage pour qu’elle puisse s’accroupir.

« Mais t’es folle ! Y a des gens qui pourraient passer.

— Mais pour l’instant, il n’y a personne. » répliqua Maxine en parlant la bouche pleine.

Loïc, en même temps qu’il tentait de camoufler Maxine avec le pan de son blouson, leva la tête pour regarder s’il n’y avait pas dans les hauteurs des immeubles de la rue, des fenêtres d’habitations qui auraient donné pile sur la terrasse en mode plongée.

« Purée… Max… » fit-il d’une voix presque plaintive car elle redoublait d’efforts au point qu’il ait presque mal dans sa raideur.

Il y eut brusquement un bruit de vaisselle venant de derrière le mur qui faisait l’angle et donnait probablement sur les cuisines. Maxine se releva d’un bond, la bouche ruisselante de salive qu’elle essuya d’un trait sur sa manche.

Voyant que finalement, il n’y avait pas lieu de s’alarmer, elle changea de tactique et repoussa la table pour enjamber Loïc, et légèrement l’incliner contre le dossier de la chaise. Puis d’un mouvement de hanches totalement improbable, elle vint se planter comme une prise sur sa fiche. Elle s’arrêta net et voulut embrasser Loïc à pleine bouche. Mais elle ne put le faire qu’à la moitié car ce dernier se dégagea légèrement pour pouvoir parler.

« Peux-tu m’expliquer ce que tu es en train de faire ? Mais plus important… Et il baissa le volume de sa voix. Depuis que tu m’as rejoint à la sortie du taf, ne me dis pas que tu ne portes rien sous ta robe à volants.

— Bah si… Comment veux-tu sinon ? » fit-elle en haussant les bras et montrant l’endroit au travers duquel ils étaient arrimés l’un à l’autre.

Loïc leva les yeux au ciel et comme si la situation n’était pas assez embarrassante, ce fut évidemment à ce moment-là que le serveur se décida pour venir leur apporter café et Pêche Melba. Maxine se mit à embrasser son petit ami dans un baiser baveux, digne de justifier la situation.

Le serveur s’approcha pour déposer sur la table la coupe et la tasse. Maxine se balança légèrement en arrière pour le regarder les yeux dans les yeux, et en arrachant un relâchement étouffé de la part d’un Loïc plongé dans une douce agonie au niveau de son soubassement.

« C’est notre anniversaire. » mentit-elle sans vergogne.

Le serveur lui répondit par « Oh ! » dont elle ne sut pas trop s’il fallait qu’elle en déduise qu’il l’avait cru ou non. Il s’éclipsa.

Maxine en revint à regarder Loïc, les yeux dans les yeux.

« T’aurais pu m’attendre, fit-elle sur un ton plein de reproches.

— T’en as de bonnes, toi. Je suis humain.

— Je sais bien, rooh, je plaisante. Mais bon, pour l’instant, tu pourrais m’attraper la serviette en papier à côté de la Pêche Melba. J’en ai besoin pour essuyer, ça… »

*

Et voilà comment la soirée que Loïc avait voulue inoubliable par sa capacité à planifier le meilleur pour Maxine, s’était mue en une soirée extraordinairement imprévisible, gravée à coups de tours dans les montagnes russes de sa si spéciale petite amie. Il n’y avait aucun doute sur le fait que Loïc adorait cela, même s’il fallait en passer par ces phases un peu étranges, un peu pénibles. Il n’avait pas d’idée sur l’avenir mais même sans lui faire de promesse, c’était avec elle qu’il voulait être, jour après jour.

Ils terminèrent tard. Sur les coups de trois heures trente. Et avant que Maxine ne ferme les yeux pour s’endormir, il lui murmura à l’oreille, un simple mot : » merci ».

*

Le lendemain ainsi que le week-end qui se présentait était un peu moins fun. Maxine devait rattraper beaucoup d’arrangements de planning et se retrouvait à travailler, midi et soir, jusqu’au lundi.

« Tu es sûre que tu vas tenir ? demanda Loïc à sa compagne.

— Ce n’est pas comme si j’avais le choix. » fit Max d’un ton un peu désabusé.

Ils convinrent ensemble que Loïc ferait les allers-retours pour l’emmener et la ramener du boulot. Il n’y avait pas vraiment de raison à cela, mais pour lui, il y voyait une manière de soutenir sa petite amie au niveau de son travail qu’il trouvait fortement contraint sans qu’aucune reconnaissance ne soit accordée. Cette sollicitude attendrissait beaucoup Maxine car la plupart des gens du même milieu que Loïc étaient très condescendants à l’égard des professions comme la sienne.

Ce programme établi, celui-ci se déroula sans anicroche jusqu’au dimanche soir et ce soir-là, sur les coups de vingt-deux heures trente, il reçut un appel d’un numéro qu’il n’aurait cru jamais voir s’afficher sur son écran.

« Loïc ? C’est Sarah. Faut que tu viennes immédiatement. Il est arrivé un truc à Maxine. Elle pisse le sang. On va appeler les secours. Fais vite. »

Sarah avait raccroché juste après, laissant Loïc un peu hébété, le temps qu’il réalise trop lentement que celle-ci, qui devait être la dernière personne à vouloir le contacter, venait lui dire de rappliquer, c’était donc que c’était plus qu’urgent. Et à la question, pourquoi, il fallait reconnaître que Loïc manquait d’imagination.

Il se dépêcha de prendre sa voiture et fila à toute vitesse vers le centre-ville. Sur le chemin, il croisa un camion du SMUR, toute sirène hurlante. Il se mit dans sa roue pour aller au plus vite. Il fit bien car même s’il n’y pensa pas tout de suite, il finit par réaliser que ce camion allait au même endroit que lui.

Il se gara en double file, en mettant les warnings et se précipita à l’intérieur du restaurant. Il se retrouva, nez à nez avec Sarah et les deux hommes des secours.

Sarah eut une grimace incompréhensible et lâcha un « Putain de merde » en regardant alternativement, Loïc et l’un des deux secouristes.

« Oh et puis faites chier. Viens par-là, Orson. Max est derrière, on a fait ce qu’on a pu avec des chiffons et de l’eau. Et toi aussi, Loïc, ramène tes fesses ! »

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 7 versions.

Vous aimez lire Eric Laugier ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0