Auprès de notre arbre
Sans doute tu me guettais. Après tous ces mois de flotte sur les branches nues et cette pagaille broussailleuse qu’a mis sous une cloche d’épines, framboisiers et cassier. Après cette longue saison de ciel bas et ces jours à l’abandon. Aussi, lorsque tu m’as vu descendre l’allée, sécateur à la main, tu as su que le regain avait gagné, que la Pâques et sa résurrection allaient tout éveiller, du cerisier à la primevère, de la larve à l’orvet. A peine avais-je commencé à couper ci et là que tu t’es approché, tout près, surveillant ma maladresse certaine, et zyeutant la possibilité d’un ver trop aventurier, dérangé par ce chahut vernal. Et tu m’as accompagné en silence, en surveillant général connaissant mieux que moi ce qui se trame auprès de notre arbre, lorsque j’ai le dos tourné. Il est vrai que ce jardin est le tien, que tu y chantes en solitaire les mois d’hiver, lorsque madame niche à deux pas et veille là où tu n’es pas. Tu n’aimes pas ce côté-ci du solstice, mais qu’y faire… Contrairement à d’autres piafs que tu connais bien et qui paillent en bandes organisées, toi, tu restes planqué dans ce jardin, le temps que frimas et tempêtes se passent. Rouge-gorge, heureux de te revoir. Dans quelques jours, tu seras mon équipier de bêche, de terre promise.

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