Chapitre 5 : Le petit...

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  • Eh ! Eh !! Eh !!!

  J’ouvris les yeux et sursautai en me redressant sur mon lit. Alexander se tenait face à moi, à côté de l’étudiant. Il me regardait l’air sévère, les bras croisés. Derrière eux, je vis des flashs d’appareils photo et des personnes en blouse passer, surement l’équipe scientifique.

  • Ah enfin, la belle au bois dormant est réveillée, me lança mon insupportable collègue.
  • Ah pardon. Je savais pas que c’était interdit après s’être fait attaquer, lui répondis-je cyniquement.

  Cette phrase m’arracha un gémissement de douleur. Je portai la main à la joue. J'avais un pansement sur celle-ci.

  • Qui a fait ça ? Demandai-je.
  • C'est... c’est moi, répondit timidement le jeune homme.
  • Merci, lui souris-je.
  • C’est pas tout ça, mais moi j’aimerai rentrer me coucher. J’aimerai ta déposition, grande perche !

  Je n’avais pas l’envie ni le courage de me battre avec lui ce soir. Je regardai l’heure : vingt-trois heures quarante-deux. Je soupirai et lui expliquai ce qui s’était passé en omettant certains détails, notamment sur mon serpent. “ Mon serpent ! ” M'écriai-je mentalement. Je portai ma main vers ma clavicule. Il n’était plus là. Je le cherchai rapidement du regard et vis sa petite tête dépasser un instant de sous ma commode. Il se cacha tout de suite après. Soulagée, je terminai mon récit. Mon collègue avait pris des notes sur un petit calpin.

  • Et tu n’as pas pensé à aller chercher ton arme ?
  • Si j’avais pu je l’aurais fait mais je pense qu’il m’en aurait empêché !

  Un mec en blouse l’interpela :

  • Nous n’avons rien trouvé inspecteur.
  • Quoi ?! Hurlai-je.
  • Excusez-moi, mais aucun indice ne permette d’identifier votre agresseur. Mis à part le bordel.
  • Mais je l’ai balancé sur mon terrarium. Il n’a pas été blessé ?!
  • Nous n’avons trouvé aucune trace ou fluide corporel, à part une tâche de sang au centre de la pièce.
  • Mais d’après vos dépositions, il s’agit du tien, reprit Alexander.
  • Nous avons pris quelques échantillons et feront plus d’analyse au labo. Bonne soirée, inspecteurs.

  Lui et son équipe partirent donc. Aucune trace à part celles de destruction... Je soupirai et appuyai ma tête dans ma main.

  • Bon, je te laisse, reprit-il en baillant. Demain, passe au poste côté client pour porter plainte si tu le souhaites. Et vois avec tes assurances pour le remboursement des dégâts. Bonne nuit.

  Et il disparut à son tour. Je tentai de me lever mais fus prise d'un vertige et me rassis. L'étudiant se précipita vers moi et m’ordonna :

  • Ne vous levez pas ! Malgré tout vous avez perdu pas mal de sang.
  • C’est bon... ça va aller. Puis je veux voir l’étendu de la casse.
  • Très bien, alors je vous aide.

  Il attrapa mon bras. À ce moment-là, Sérane sortit de sa cachette et grimpa sur le lit à une vitesse ahurissante. L’étudiant cessa de bougea. Je tendis la main vers mon animal de compagnie. Il s’enroula autour de celle-ci et serpenta sous mon pull. Je le sentis reprendre sa position d’avant. “Sans gêne” pensai-je alors que je le sentais glisser entre mes seins. Sa petite tête grise apparut près de ma clavicule, dépassant de mon coll.

  Le jeune homme termina son action, surveillant du coin de l’œil le serpent. Il passa mon bras par-dessus son cou et m’aida à me lever. Nous allâmes dans la salle de vie de mon appartement et je constatai le désastre : le terrarium et la table et l’étagère le soutenant étaient détruits, ma table à manger écrasée, le canapé déchiqueté, la télé brisée. Par chance, mon ordinateur était intact. Je poussai un soupir de soulagement. Mais comment allais-je nettoyer ce bordel ? Pour me changer les idées, je posai des questions à mon preux chevalier :

  • Comment t’appelles-tu ?
  • Nicolas, et vous ?
  • Aurore. Tu peux me tutoyer, tu sais ?
  • Pardon.
  • C'est pas grave. Tu fais quoi comme étude ?

  Je me libérai de sa prise, saisis ma chaise de bureau et m’assis.

  • Je suis en école de médecine.
  • Ah, c’est pour ça que tu m’as fait ce bandage.
  • Oui, je suis rentré rapidement chez moi pour chercher une aiguille et du fil à suture. J'ai désinfecté et vous ai recousu. Si j’ai bien fait mon travail, vous n’aurez même pas de cicatrice.

  Je rigolai. Il sourit, regarda ma machine et remarqua la manette, tombée par terre.

  • Vous... euh, tu es une gameuse ?
  • De temps à autres.
  • Et tu joues à quoi ?

  Je lui fis une courte liste. Plus j’en disais, plus lui son visage s’illuminait. C’était marrant de regarder ses réactions à chaque nom de jeux que j’énonçais. Mais pour la plupart il semblait content. Je sentis mon serpent remuer sous mon pull mais restais concentrée sur la conversation. Celle-ci dévia ensuite sur les mangas, à cause de mes posters, puis revint sur les jeux vidéo.

  • Ça t’intéresserait qu’on joue à deux, un de ses jours ? Me demanda-t-il timidement.
  • Hmmm... pourquoi pas. Mais pour l’heure...
  • Tu veux te reposer, je suppose. Je vais te laisser. Si t’as besoin d’aide, hésite pas.
  • Merci.

  Je lui souris. Il me le rendit, puis se dirigea vers la porte et disparut en refermant celle-ci. Je poussais un énorme soupir et regardai l’heure : une heure du mat. J'ai parlé plus longtemps que je ne le pensais avec le petit Nicolas. Je me levai et allai dans la salle de bain. J'avais besoin d’une bonne douche pour réfléchir. En me déshabillant, je m’aperçus que mon petit compagnon était toujours collé à moi. Je me rappelai des paroles de mon agresseur : “ C’était donc bien toi... Si je te tue damoiselle, je récupérerais les pouvoirs de ce...” Qu’est que cela signifiait. J'étais sûr qu’il parlait de Sérane. Ce nom. Il était apparu dans mon esprit lorsque j’avais cru blesser mon serpent. J'étais persuadée au fond de moi que c’était le sien. J'enlevai doucement le bandage, observant le travail de mon médecin personnel, et allai sous l’eau.

  Je passai le temps sous la douche à y réfléchir, à essayer de comprendre tout cela. Mais je ne trouvais aucune raison logique. Un moment, le mot magie traversa ma cervelle. Rigolant de ma bêtise, j’arrêtai l’eau et m’essuyai. Nous n’étions pas dans mon histoire de magie et de monstre. Une chance que mon pc ait été épargné. J'aurais explosé si j’avais perdu mes trente-cinq chapitres, trente-six si l’on comptait le petit prologue. Je remis le pansement, l’eau avait fait ressaigner la plaie.

  Je m’assis sur le lit. Je n’avais même pas pris la peine de revêtir quelque chose. Je regardai mon reptile, somnolant sur mon épaule et finis par lui demander :

  • Tu t’appelles vraiment Sérane ?

  Il ouvrit les yeux, me fixa. Sa langue siffla puis il pencha légèrement la tête en avant. Je soupirai et ricanai. À par la magie, je ne voyais pas comment expliquer cela.

  • J'apprécie ta compagnie, mais pourrais-tu me lâcher que je puisse dormir sans risquer de t’écraser ?

  Il ne bougea pas, puis serpenta autour de mon bras et descendit sur le lit. Je soulevai les couvertures et m’allongeai. En fermant les yeux, je vis mon animal de compagnie s’enrouler près de mon oreiller.

    Je me réveillai aux alentours de onze heures. J'étais très en retard. Je m’habillai rapidement : pantalon gris, chemise blanche et veste noire. Je n’oubliai pas cette fois mon arme que je fixai à ma ceinture, mon badge aussi. Je grignotai un petit encas, pris mon sac et mes affaires, et partis. Je croisai Nicolas en sortant. Il me sourit pour me saluer. Je lui rendis mais sprintai jusqu’à l’escalier sans m’attarder.

  Arrivée au poste, je montai à mon bureau et vis le commissaire attendre devant ma porte. Il me regarda l’air sévère et me dit d’un ton peu calme :

  • C’est à cette heure-ci que vous arrivez ? Que vous est-il arrivé ? Termina-t-il en remarquant mon pansement sur la joue.
  • Je me suis faite agressée hier soir à mon appartement. L’inspecteur Tauley ne vous l’a pas dit ?
  • Non.
  • Pourtant c’est lui qui est venu faire ma déposition.
  • Très bien. Peu m’importe, je vous pardonne cet écart au règlement pour cette fois.

J'espère bien, pensai-je.

  • Mais donc il faut que vous déménagiez vos affaires dans le bureau de votre coéquipier.
  • Ah oui c’est vrai ! M'écriai-je.
  • Votre armoire a déjà été déplacée. Ne reste plus que vos effets personnels et le contenu de votre bureau.
  • Très bien, merci commissaire.
  • Bonne journée.

  Il partit. J'entrai dans mon petit bureau qui faisait vide sans l’armoire. Une pile de cartons m’attendait à la place, surement pour m’aider à transporter mes affaires. Je vidai mes tiroirs et remplis les boites. J'en pris une et me dirigeai vers le bureau d’Alexander. Je le trouvais rapidement et toquai :

  • Entrez, entendis-je.

  Je poussais la porte. Il était en train d’écrire sur son ordinateur, un rapport à l’évidence. Nos bureaux étaient face à face, espacés d’à peu près deux mètres avec chacun une armoire derrière eux. Il s’arrêta et me regarda en ricanant :

  • Alors ? C'est à cette heure-ci qu’on arrive ?
  • Ta gueule ! Pourquoi t’as pas dit au commissaire que j’avais été cambriolé hier soir ? Répondis-je.
  • Pourquoi tu m'as pas dit que tu avais trouvé une piste hier, plutôt que d’me laisser chercher pendant une heure puis de passer presque autant de temps à t’chercher ?

  Je posai mon carton près du bureau vide et avançai vers le sien. Je plaquai brutalement mes mains sur celui-ci, tirai rapidement la langue avant de m’approcher de son oreille et de lui murmurer :

  • Tu sais, j’ai fait passer par-dessus moi un mec plus lourd que toi, alors un conseil, ne m’énerve pas plus sinon je t’arrache ce qui fais de toi un homme.

  Je me redressai, fit craquer mes doigts, et mon cou, avant de sortir pour de finir mon déménagement.

  Je terminai enfin de placer la déco de mon bureau avec la statuette de serpent, située juste à côté de mon écran. Mon collègue n’avait pas dit un mot depuis ma menace. Mais cela ne dura pas hélas.

  • Tu es fan à ce point des serpents, me demanda-t-il en observant ma décoration.
  • Oui.
  • Et comment va celui que tu as adopté ?
  • Tu me fais quoi ?
  • Écoute. Ça ne m’fait pas plus plaisir que toi d’être ton équipier. Mais malgré tout, nous allons devoir travailler ensemble donc il faudrait s’entendre un minimum.

  Je restai scotchée sur ma chaise, les yeux écarquillés, la bouche entrouverte. C'était la première fois que j’entendais un truc sensé sortir de la sienne.

  • Certes... pour l’instant, tes couilles seront sauves.
  • Merci...

  Nous fûmes interrompit par son téléphone. Il décrocha :

  • Allo, inspecteur Tauley à l’appareil... ok, très bien, on arrive.
  • Que se passe-t-il, l’interrogeai-je après qu’il eut raccroché.
  • Une nouvelle affaire. Un mort a été découvert à deux rues de chez toi.
  • Mais et l’enquête en cours ?
  • Elle a été classée. Ta piste n’a rien donné. Le demi-visage n’a pas permis de faire une recherche faciale, et personne d’autre n’a vu quelque chose.

  Je soupirai en m’affalant sur ma chaise, journée de merde. Après seulement une journée, il la balançait à la poubelle.

  • Bon, tu viens ?
  • J'arrive.

  Je saisis ma veste et le suivis.

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