La chute silencieuse
Tous les sourires, tous les rires étaient faux.
Et pourtant, vous y avez cru.
Moi aussi, j’y ai cru.
À force de faire semblant, j’ai fini par m’y perdre. C’était plus simple de sourire que d’expliquer. Plus simple de dire « ça va » que d’admettre que rien n’allait. Alors j’ai construit une façade. Belle, solide, rassurante. Je l’ai polie chaque jour pour qu’elle brille, même quand, à l’intérieur, tout s’effritait.
Je me suis persuadée que tout allait bien. Que ce vide était normal. Que cette fatigue passerait.
Je me suis convaincue que j’étais heureuse.
Je me suis répétée ces mensonges jusqu’à ne plus entendre la vérité.
Mais le corps, lui, ne ment jamais.
Un matin, il a lâché. Sans crier gare.
Je n’avais plus la force de me lever. Mes jambes tremblaient. Mon cœur tambourinait sans raison.
Tout était flou. Mon cerveau s’était brouillé, comme pris dans un épais brouillard. Plus de repères. Plus de direction. Juste une lassitude immense, collée à la peau.
Et j’ai sombré.
Ce n’était pas un effondrement spectaculaire. Pas de cris. Pas de drame.
Juste un glissement. Lent. Silencieux. Comme une chute en soi-même.
Je regardais le monde de loin, à travers une vitre sale.
Je n’étais plus là. Pas vraiment. Juste l’ombre de celle que j’avais essayé d’être.
Et personne n’a rien vu.
Parce que j’avais appris à bien cacher.
Aujourd’hui encore, je cherche la lumière.
Pas pour redevenir celle d’avant — elle n’existait pas vraiment.
Mais pour renaître, doucement.
Pour m’autoriser, enfin, à ne pas aller bien.
Et peut-être… un jour, aller mieux. Pour de vrai.
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