Chapitre 5.3

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La donne changea quelque peu lorsque le vaisseau décolla. Le seul et unique vaisseau. Ce détail fit tiquer Eliah lorsqu’ils partirent enfin. Les préparatifs avaient semblé durer une éternité et le jeune homme sentit un vrai soulagement en montant à bord. Plus vite ils seraient arrivés et plus vite il pourrait trouver un moyen de leur fausser compagnie.

Eliah, Asbel et son père furent aux premières loges pour assister au décollage – il ne vit pas Dimitri parmi la foule. La salle de commandement était composée d’une immense vitre donnant sur l’avant du vaisseau. La vue était incroyable. Le jeune homme en avait presque oublié la présence des autres autour de lui. Il n’avait d’yeux que pour ce panorama qui défilait devant ses yeux, le paysage qui se modifiait petit à petit. Jusqu’à ce qu’il regarde les hublots de part et d’autre de la pièce, et remarque que le vaisseau n’était pas accompagné. Où était donc l’armée qu’il s’était imaginé ? Peut-être seraient-ils rejoints plus tard ?

Ils quittèrent rapidement l’atmosphère de la planète, tout en douceur. Les conditions seraient différentes en arrivant sur l’Île. Un frisson glacé lui parcourut le dos en songeant au départ du cargo marchand, quelques mois plus tôt.

Le rythme à bord devint plus calme lorsqu’ils furent dans l’espace. Chacun rejoignit son poste. Eliah, quant à lui, resta scotché à la vitre pendant des heures. Il n’avait jamais rien vu de tel. Lorsqu’il était venu à Rianon, il n’avait pas eu l’occasion de sortir de la cabine d’Oris. Penser à ce monstre lui donna la nausée. Il reporta son attention sur les milliers de points lumineux qui se dessinaient à l’horizon, entourés d’un noir complet et angoissant. Par moment, des planètes défilaient devant ses yeux. Eliah essayait de deviner quel genre de sol et d’atmosphère composaient ces mondes. Ils passèrent devant un astre, et le jeune homme souhaita pendant quelques secondes qu’elle soit recouverte d’eau, pour que Rianon arrête enfin sa conquête et son pillage de l’Île. Mais elle devait sûrement être gazeuse. Une autre, de couleur ocre et doré, l’émerveilla pendant plusieurs minutes. Sa surface était recouverte de tourbillons et il imagina des tempêtes d’or et de cuivre.

Ils évitèrent ensuite un champ d’astéroïdes, qui lui parut à la fois si proche et si lointain. Des dizaines de phénomènes étranges se déroulaient sous ses yeux sans qu’il puisse les nommer. Des couleurs extraordinaires se mélangeaient et formaient d’étranges traînées dans le cosmos. Il trouvait chaque planète magnifique et unique. Peut-être que dans une autre vie, il aurait l’occasion de toutes les visiter…

Le jeune homme avait presque le nez collé à la vitre, depuis des heures. Personne n’était venu le déranger jusqu’à présent. Il entendait la circulation dans la salle des commandes, les ordres et le bruit des machines, mais il était trop absorbé par la vue pour s’y intéresser. A vrai dire, Eliah se sentait très peu en sécurité dans ce vaisseau. L’univers qui s’étendait devant eux était tellement grand et si dangereux. Il suffisait du moindre petit problème pour qu’ils meurent tous. Et le fait d’être assis devant cette immense vitre, seule barrière pour le protéger contre le vide absolu… Cela le fit frissonner.

Il entendit quelqu’un s’asseoir à côté de lui et constata avec un soupir que c’était Asbel. Il fut envahi par la colère. Il devait déjà supporter sa présence de traitre pendant tout le trajet, qui durait environ une semaine, mais en plus il voulait lui faire la discussion ? Eliah n’était pas sûr de le supporter.

« Je voulais voir comment tu allais, commença Asbel.

̶ Je t’interdis de me regarder ou ne serait-ce que de m’adresser la parole », cracha Eliah.

Son interlocuteur eut un mouvement de recul. Il ne s’attendait pas à tant d’agressivité de la part du jeune homme pourtant si calme d’habitude.

« Ecoute, on est embarqué pour au moins deux semaines, j’ai pensé qu’on pourrait…

̶ Deux semaines ? » releva Eliah en fronçant les sourcils.

Il tourna enfin la tête vers Asbel. Ça n’avait pas l’air d’être un mensonge. Il put lire les regrets dans le regard du brun mais refusa d’y croire. Non, il ne pourrait pas lui pardonner. Malgré sa moue triste, Eliah refusa de se laisser amadouer.

Asbel sauta sur l’occasion de répondre aux questions de l’Îlien, malgré son injonction à le laisser tranquille.

« On ne peut pas emprunter les portails normaux, expliqua Asbel.

̶ Je ne comprends pas ce que ça veut dire. »

Son interlocuteur s’éclaircit la voix, ravit de pouvoir discuter. Eliah remarqua qu’il avait changé de vêtements et mit une combinaison bleu foncé qui lui rappelait trop Oris. Un désagréable frisson lui parcourut l’échine.

« Le trajet entre Rianon et l’Île se fait en une semaine, environ, quand tu passes par les portails. Ce sont des installations géantes dans l’espace qui permettent aux vaisseaux d’aller plus rapidement d’un endroit à un autre, sans mettre des mois, voire des années. »

Eliah écouta attentivement mais avec agacement. Il détestait qu’Asbel puisse lui apprendre des choses et souligne encore une fois son ignorance. Néanmoins, il ne l’interrompit pas.

« Mais, pour passer par ces portails, il faut une autorisation gouvernementale. Que nous n’avons pas.

̶ Comment ça ? Je pensais que ton père travaillait pour le ministère de la guerre ? »

Asbel eut un sourire malicieux qui ne fit qu’augmenter l’agacement d’Eliah.

« Cette mission n’a rien d’officielle. Comme il te l’a répété de nombreuses fois, le gouvernement de Rianon refuse de s’occuper des affaires de l’Île dorénavant. C’est mon père, de son propre chef, qui a monté cette expédition. Il a engagé des mercenaires qu’il connaissait, grâce à son poste au ministère. Mon frère est notre relais sur Rianon et nous informera de la tournure des événements quand le gouvernement apprendra la nouvelle. Et s’il nous arrive quelque chose, ce sera le premier informé. Bref, tout cela est organisé par mon père et doit rester secret le plus longtemps possible, on doit donc emprunter un autre chemin. »

C’était donc pour cela qu’il n’y avait qu’un vaisseau en direction de l’Île. L’invasion serait beaucoup moins importante que ce qu’il s’était imaginé. Pourtant, il avait pu voir les armes qui étaient chargées à bord et le nombre de soldats présents, ce qui restait conséquent. Le fait que le gouvernement ne soit pas encore au courant pouvait également être une bonne nouvelle. Une fois sur l’Île, les communications seraient coupées, puisqu’aucun appareil électronique ne pouvait fonctionner sur la planète. Personne ne serait au courant si quelque chose arrivait au vaisseau ou à son équipage.

Cependant un détail le chiffonnait. Rianon avait abandonné l’Île car tout cela leur coutait trop cher, alors pourquoi Sevastian était-il si entêté ? Ce voyage ne lui coutait-il pas une fortune également ? Il y avait le vaisseau, ainsi que tout l’équipement qui va avec, les armes, les mercenaires qu’il fallait payer, l’installation des portails clandestins, et récupérer les ressources sur l’Île. Puis, si le plan du père d’Asbel fonctionnait, il y avait également le retour.

Eliah expliqua rapidement le problème à son interlocuteur. Celui-ci détourna le regard, gêné.

« L’idée est que… mon père et son équipage s’empare du pouvoir en place sur l’Île. Le Seigneur c’est ça ? Le gouvernement est fauché, mais ce si le plan de mon père fonctionne, il sera riche. Des centaines d’entreprise voudront leur part du gâteau. »

Sa voix était remplie d’envie et de cupidité. Il hésita à poursuivre. Il ne voulait sûrement pas ranimer la colère chez Eliah.

« Si le plan ne fonctionne pas, ils feront parvenir un faux message de détresse à Rianon. Le pays ne pourra pas laisser autant de ses citoyens entre les griffes des Îliens. S’ils réussissent, le gouvernement enverra quand même des renforts pour apporter du soutien à mon père. Le plus gros du travail aura déjà été fait. »

Le regard d’Eliah s’assombrit. Il devait tout faire pour saboter la mission, une fois qu’il serait sur l’Île. Une idée germa dans l’esprit d’Eliah. S’il parvenait à s’enfuir, il pourrait mettre au courant le Seigneur de l’Île et le combat serait peut-être un peu plus égal. Il fallait organiser la défense de la planète.

La pression sur ses épaules augmenta d’un cran. Tout reposait sur lui. Après avoir déclenché cette situation, il devait tout faire pour réparer ses erreurs.

Voyant qu’Eliah restait silencieux, Asbel continua à parler.

« On va passer par des portails clandestins. Ça a l’air assez dangereux, mais on n’a pas d’autres choix.

̶ Comment ça ?

̶ Pour faire simple, ces portails sont montés et démontés en quelques jours pour ne pas être détectés. Papa a contacté différents groupes de mercenaires à travers la galaxie pour qu’ils installent les portails sur tout notre chemin. Mais pour ne pas se faire repérer, il faut les installer à une certaine distance de toute planète habitée. »

Ce plan ne lui disait rien qui vaille. Sevastian s’était lancé dans une entreprise complètement folle dans l’unique but de récupérer de l’eau ? Il avait dû dépenser des sommes astronomiques pour tout organiser. Peut-être qu’à présent il avait un peu plus besoin de cet argent. Pourtant, cela représentait tellement de difficultés pour si peu.

« J’ai hâte de voir l’Île mais j’ai un peu peur », avoua Asbel.

Eliah s’apprêta à lui dire de ne plus lui parler, mais il se retint au dernier moment. Il ne put s’empêcher de demander :

« Pourquoi tu me confies tout ça ? Tu sais que je t’en veux, grogna-t-il.

̶ Je sais, soupira Asbel. Et je m’excuse une fois encore. Je n’ai plus rien à te cacher à présent. Même si tu m’en veux, pour moi tu restes un ami. »

Eliah ne répondit pas. C’était peut-être l’occasion pour lui d’essayer de soutirer des informations à Asbel sur la suite des événements. Pourtant, il savait que cela lui coûterait. Il ressentait une colère profonde envers Asbel et son père. Voyager avec eux pendant presque deux semaines lui demanderait de garder un sang-froid exemplaire. Il n’était pas sûr d’y arriver.

« Comment ça va se passer, une fois sur l’Île ?

̶ Nous ne pouvons pas atterrir trop proche de la capitale, sinon nous serons repérés. »

Il mit son bras gauche à l’horizontale pour illustrer sa pensée, et plaça sa main droite à environ soixante degrés et imita l’atterrissage du vaisseau, comme si son avant-bras représentait l’Île.

« On nous verra dans le ciel, c’est inévitable. »

Il changea la position de sa main droite, et la situa à un angle de vingt degrés.

« Il faut arriver de façon oblique, presque raser le niveau de la mer. Nous arriverons assez loin, c’est vrai, mais au moins personne ne nous remarquera. Le mieux serait d’atterrir à l’ouest de l’Île, nous n’aurions plus qu’à naviguer jusqu’à la capitale. Cela devrait prendre quelques semaines. »

Eliah se contenta de hocher la tête. Il suffirait à Sevastian de conduire ce vaisseau jusqu’à Neuf Soleils, et d’attaquer pendant la nuit. Avec les armes dont ils disposaient, les mercenaires ne feraient qu’une bouchée des soldats du Seigneur. Mais les engins du vaisseau ne fonctionneraient pas une fois sur l’Île, comment allaient-ils faire ? Comme s’il avait deviné ses pensées, Asbel s’empressa de rajouter :

« Le vaisseau est équipé d’un moteur à charbon, à l’ancienne. Il nous suffira de naviguer tranquillement. »

Ils avaient pensé à tout, songea-t-il, sombre. Avec un tel mastodonte, les tempêtes et les vagues ne seraient d’un détail. Depuis combien de temps ce plan grandissait-il dans l’esprit de Sevastian ?

« Tu veux rester là où je te montre la cabine ? »

Eliah retint un soupir et se leva. Ils traversèrent le vaisseau afin de rejoindre les dortoirs. Il sentit qu’il était perdu après avoir traversé plus de cinq couloirs. Tout était identique et métallique. De l’extérieur, il n’aurait pas soupçonné que le véhicule soit aussi grand. Ils croisèrent un grand nombre de mercenaires qui flânaient dans les allées, l’air ennuyé.

Asbel lui indiqua une direction comme étant celle conduisant aux quartiers des mercenaires. La plupart dormaient dans un grand dortoir. Ils arrivèrent enfin dans un couloir plus petit qui donnait sur cinq chambres. Le jeune homme entra dans la première pièce à leur gauche, qui révéla une petite pièce, composée de deux couchettes et d’un rangement.

Eliah remarqua qu’un sac était posé sur chacun des lits. Il lança un regard intrigué à Asbel. Celui-ci grimaça.

« On va partager la chambre. »

Le jeune homme sentit la colère le submerger, il faillit crier mais la brume l’engloutit soudain, lui coupant le souffle. Il aurait pu faire exploser sa rage à n’importe quel moment s’il enfonçait ses ongles dans sa peau, mais il était las. Même dans ce vaisseau où des centaines de soldats pouvaient le surveiller, on lui attribuait une chambre avec Asbel pour que celui-ci garde un œil sur lui. Eliah se laissa tomber sur la couchette en soupirant. Il n’avait même pas la force de hurler sur son ancien ami. Il n’y était sûrement pour rien, d’ailleurs. Mais Eliah refusait que Asbel voie une occasion de se rapprocher de lui. Leur amitié était finie.

« Je te laisse mettre la combinaison », dit Asbel en désignant le sac.

Il laissa Eliah seul dans la chambre. Cependant, il n’avait pas complètement fermé la porte et attendait de l’autre côté du battant. Agacé, Eliah pesta et se laissa tomber sur le lit. Si, en arrivant sur l’Île, il était en permanence sous la surveillance de quelqu’un, s’échapper serait encore plus difficile que prévu. Sevastian devait se douter qu’il devait déjà élaborer un plan pour s’enfuir. Après tout, son explosion de colère n’était pas passée inaperçue, ni même son hostilité envers l’expédition et l’équipage. Il lui faudrait être très prudent.

Le jeune homme devrait saisir chaque opportunité pour soutirer des informations à Asbel ou pour échafauder un plan. Le vaisseau devait avoir un point faible. Peut-être même pourrait-il saboter de l’équipement ? Néanmoins, cela serait remarqué trop rapidement. Les quelques semaines de trajet lui laissaient le temps pour observer et établir un plan.

Il poussa un nouveau soupir et se redressa afin de sortir la tenue du son sac de voyage. Quelques vêtements avaient été soigneusement pliés à l’intérieur, ainsi qu’une petite trousse de toilette avec le nécessaire pour la traversée. Le sac d’Asbel semblait identique mais Eliah préféra le fouiller discrètement. Il essaya de ne pas trop déranger les affaires pour ne pas que l’autre s’en rende compte.

Il y avait quelques effets personnels en plus, dont un carnet de notes qu’il feuilleta rapidement. Le livret contenait des informations sur l’Île – que Eliah lui avait fournies. Il sentit la colère revenir et essaya du mieux qu’il put de la contenir. Il ne pouvait pas craquer maintenant alors qu’il devait supporter Asbel pendant deux semaines. Il remarqua également des croquis censés ressembler à l’Île. Il eut un sourire de dédain devant les esquisses. Ce n’était qu’une pâle représentation de la planète. Eliah avait, au final, donné peu de descriptions des paysages, et Asbel avait dû s’inspirer des voyages qu’il avait déjà fait sur d’autres planètes. Aucune ne ressemblait de près ou de loin à l’Île.

Eliah sortit de ses pensées et remit les affaires en ordre et commença à se changer. Il enfila la combinaison et s’apprêtait à revêtir les manches lorsqu’Asbel rouvrit la porte. Il devait penser que cinq minutes avaient dû suffire à Eliah pour se changer, mais vu que celui-ci avait farfouillé dans ses affaires, il avait mis un peu plus de temps.

Ils restèrent silencieux pendant quelques secondes, gênés, jusqu’à ce que les yeux d’Asbel tombent sur les cicatrices qui marquaient les bras d’Eliah. Des scarifications encore sanglantes marquaient sa peau, accompagnées de croutes ou de lignes blanchâtres. Ses prunelles s’agrandirent tandis que l’Îlien se dépêchait d’enfiler sa combinaison, les joues rouges de honte.

« Qu’est-ce que… qu’est-ce que tu as sur les bras ? bafouilla Asbel.

̶ Rien », marmonna Eliah.

Il boutonna la tenue, tout en se maudissant pour avoir mis aussi longtemps à s’habiller. Pourtant, Asbel aurait fini par découvrir les marques au bout d’un moment. Après tout, ils allaient cohabiter pendant deux semaines minimum.

Son ancien ami s’approcha et souleva une des manches. Eliah voulut se dégager mais la poigne d’Asbel était puissante.

« Pourquoi tu as fait ça ? » s’enquit celui-ci.

Le jeune homme réussit enfin à se dégager de l’étreinte et fit un pas en arrière. Une flamme de rage dansait dans ses prunelles. Une colère profonde colora ses joues et agita ses mains de tremblements. Il gardait sa fureur enfouie depuis trop longtemps. Il avait été retenu prisonnier dans une prison dorée pendant plusieurs semaines, constamment sous surveillance avec une personne qu’il pensait être son ami. Et on continuait à l’épier.

La brume avait disparu, évaporée de son esprit. Ses gestes et son esprit étaient parfaitement clairs. Asbel recula, soudain effrayé par un tel changement, une réelle inquiétude était lisible sur ses traits.

« Ça ne te regarde pas », répondit fermement Eliah.

Asbel esquissa un geste qui se voulait amical, mais l’Îlien recula, comme s’il avait été brûlé.

« Je ne peux pas te laisser te faire du mal comme ça… Je vais en parler à mon p… »

Eliah bondit sur son ancien ami. Son sang n’avait fait qu’un tour. Il se jeta sur Asbel et ils tombèrent tous les deux au sol. Un cri de douleur franchit les lèvres du citoyen de Rianon lorsque sa tête cogna le sol. Eliah lui bloqua les bras avec son corps et lui serra la gorge des deux mains.

« Si jamais tu en parles à qui que ce soit, je te tue. C’est clair ? »

Sevastian ne devait pas voir les cicatrices. Les étoiles devaient rester secrètes. Même s’ils ne faisaient pas un lien direct avec l’Île, on lui poserait des questions. Et Eliah ne devait pas en parler. A personne. Jamais.

Asbel repensa sûrement au fait qu’Eliah avait été formé par le chasseur du village et ne parvint pas à déglutir tant la poigne du brun était puissante, plus qu’il ne l’aurait crue. Il sentit la panique monter en lui lorsqu’il essaya de se débattre, en vain. Puis, il croisa le regard de l’Îlien et son cœur manqua un battement. Ses yeux foncés brillaient d’une rage froide et d’une détermination qu’il n’avait jamais vue chez lui auparavant. Il ne plaisantait pas. Il aurait été capable de le faire sur le champ, sans même se soucier des conséquences.

Pâle, Asbel se contenta de hocher la tête, incapable d’articuler un mot. Eliah se releva enfin, laissant son ancien ami respirer. Celui-ci hoqueta et toussa à plusieurs reprises. Il se redressa avec difficulté, ses jambes tremblaient, et s’éloigna d’Eliah. La peur était visible dans ses yeux et il massa son cou où des marques commençaient à apparaître.

Soudain, Eliah réalisa son geste. Qu’est-ce qui lui avait pris ? Le contrôle lui avait échappé, il ne se reconnaissait même pas. L’agresser avait été une terrible erreur… Mais Eliah ne s’était pas maîtrisé. La brume avait soudain disparu de son esprit et un instinct sauvage semblait avoir pris le contrôle de son corps. Jamais il n’aurait soupçonné une telle violence enfouie en lui. Après ce que lui avait fait subir Asbel et son père – l’attente pendant des mois, la manipulation et surtout la trahison – Eliah ressentait un malin plaisir à voir son ancien ami avoir peur. C’était tout ce qu’il méritait.

Ils restèrent silencieux quelques instants, tous les deux choqués par la scène.

« Ça va être l-l-l’heure du repas, bredouilla Asbel. On ferait mieux d’y aller. »

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