44. Le deal de la cabane

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Pénélope

Un soupir de contentement s’échappe d’entre mes lèvres malgré le léger frissonnement qui vient de parcourir mon corps. Je sens l’air frais du matin s’insinuer sous la couverture que nous avons tirée sur nous durant la nuit, mais j’ai plus chaud qu’autre chose. Il faut dire que Jonas a toujours été très doué pour m’empêcher d’avoir froid et qu’il est à moitié couché sur moi. Le pire ? J’ai toujours adoré ça. Autant que ses lèvres déjà en train de se promener sur ma peau. Je sens bien qu’il est sur la retenue, s’attendant sans aucun doute à ce que je le repousse comme à Dubaï, mais je n’en ai aucune envie et, aujourd’hui, je refuse d’aller à l’encontre de ce que je souhaite. Est-ce que c’est une connerie ? Sans aucun doute. Vais-je le regretter ? Peut-être bien. Est-ce que ça va m’arrêter ? Non !

Ma main glisse entre nous, empaumant son sexe déjà à demi-bandé contre ma cuisse, et un léger grondement fait vibrer ses lèvres humides contre la peau de mon cou. Je souris en sentant ses hanches se mouvoir contre moi mais ne fais pas la maligne bien longtemps tandis que l’une de ses mains glisse entre mes cuisses pour venir flatter mon sexe déjà humide d’envie de lui. C’est simple : le sexe, ça a toujours été lui, rien que lui. Oh, j’en ai eu, de bons amants, et le sexe était plutôt pas mal avec Steven, mais rien ni personne n’a jamais pu concurrencer ces moments d’intimité entre Jonas et moi.

Sentir ses doigts se faufiler en moi me rappelle nos soirées d’ados à se tripoter, ses lèvres qui prennent enfin possession des miennes sont un doux méli-mélo de souvenirs allant de notre premier baiser au dernier, celui qui promettait qu’il y en aurait d’autres tout aussi avides. Ils auront mis une décennie à se pointer, mais ils sont bien là. Ils ne sont nullement synonymes d’un toujours, mais représentent un maintenant empli de promesses sensuelles et torrides.

Et c’est ce qu’il se produit. Inéluctablement, Jonas et moi terminons imbriqués l’un dans l’autre. Ca aurait pu être un poil brutal, guidé par la rancœur que nous éprouvons l’un envers l’autre. Ca aurait pu être égoïste comme le sont une bonne partie de nos interactions depuis nos retrouvailles… Au lieu de quoi nous nous contentons d’être nous, Penny et Jo, comme si dix ans n’étaient pas passés, comme si nous n’avions pas gagné en maturité, en expérience. Jonas me surplombe et me pénètre lentement, ses mains nouées au miennes de chaque côté de mon visage. Nous nous observons et aucune parole n’est nécessaire, aucun mot n’a à être prononcé. C’est juste lui et moi, le plaisir d’être ensemble, le bien-être de ne former plus qu’un et d’embarquer sur le même radeau en direction du plaisir. Comme il y a dix ans, chacun de nous est attentif à l’autre et nos corps dansent à l’unisson pour atteindre l’orgasme. Nous avons découvert la sexualité ensemble, appris à connaître l’autre par cœur, à comprendre et appréhender ses réactions, ses besoins.

Et c’est le cas ce matin encore. Seuls nos gémissements et les bruits de nos corps qui fusionnent viennent troubler le calme relatif de la nature qui s’éveille partout autour de nous. C’est à la fois tendre et intense, mais c’est surtout terriblement bon et il me faut faire beaucoup d’efforts pour rester discrète lorsque la jouissance me fauche finalement. Je mords l’épaule de Jonas tandis qu’il étouffe son plaisir dans mon cou, son souffle chaud et saccadé caresse ma peau parée d’une légère pellicule de transpiration. Jonas me recouvre de son corps quelques instants avant de m’entraîner avec lui lorsqu’il s’allonge sur le dos, tirant à nouveau la couverture sur nous.

— Eh bien, bonjour, soufflé-je lorsque ma respiration s’est finalement apaisée.

— Bonjour ma Nono. C’est fou qu’on se soit passés de ça pendant si longtemps, hein ? Moi, des nuits et des réveils comme ça, j’en redemande, sourit-il avant de m’embrasser sur le front.

— Ce qui est dingue, c’est qu’on ait pu se contenter d’autre chose pendant si longtemps…

— Est-ce que c’est comme dans Cendrillon ? Quand l’horloge sonne, tout disparaît ? Finalement, c’est bien la nature, on n’est pas dérangés, il n’y a même pas de tic tac. C’est que c’est sans fin, on dirait, non ?

— Il y a les vraies horloges et les symboliques, Johnny… Rien n’est sans fin.

— Eh bien, tu n’es pas très optimiste, ce matin, sourit-il. Moi, je crois en l’éternel recommencement. C’est ce qui permet de garder le moral. Et quand on voit comment s’est passée cette nuit, je crois que c’est moi qui ai raison.

— L’éternel recommencement ? Donc, on se remet ensemble, on se donne à fond dans cette relation et on souffre une nouvelle fois ? Jusqu’à ce que la boucle réapparaisse encore et encore ?

— C’est vrai que présenté comme ça, ça ne donne pas envie. Ou ça fait peut-être moins mal si on définit nous-mêmes une fin pour la boucle ? Genre mon départ pour Dubaï ? Si c’est prévu, on peut se préparer, non ? Pas comme la dernière fois…

Je me retiens de soupirer ou de grommeler… Je ne suis pas persuadée que la jouer CDD change quoique ce soit à l’équation. Jonas est ma kryptonite, il est aussi facile pour lui de me faire jouir que de me faire souffrir.

— Hum… Tu proposes quoi alors ? Un peu de plaisir avant ton départ ? Pas de contraintes, pas de sentiments, pas… juste le bon jusqu’à ce que tu abandonnes ?

— Je n’abandonne pas, c’est toi qui penses qu’il y a une fin inéluctable à tout ça, je dis simplement qu’il vaut mieux s’y préparer et fixer la date nous-mêmes, non ? Et oui, autant en profiter le temps d’y arriver. Parce que je suppose que comme quand je suis parti aux Etats-Unis, tu n’as pas du tout envie de m’accompagner ?

— Je ne suis toujours pas une femme qui quitte tout pour suivre son mec du jour au lendemain, non…

Surtout quand mon avis n’a pas été pris en compte dans l’équation. Oh, je pourrais sans aucun doute trouver du boulot, peut-être même que Philippe me laisserait partir avec Jonas. Mais pour quoi faire ? Le seconder ? Hors de question.

— Je ne sais pas si c’est une bonne idée de continuer, reprends-je. Mais je ne sais pas non plus si je peux résister à la tentation que tu représentes et j’ai juste envie de prendre chaque jour après l’autre et d’en profiter au maximum. Pas terrible comme philosophie, si ?

— C’est tout ce que l’on peut se permettre dans de telles circonstances, et c’est mieux que rien, non ?

— Les règles du jeu sont claires au moins. On se fait plaisir, on prend du bon temps mais on ne s’attache pas et on ne se promet rien. Ce n’est pas l’idéal mais vu qu’on ne peut pas atteindre l’idéal, je pourrais m’en contenter si ça te convenait, soufflé-je.

C’est tout ce dont je suis capable, en vérité. Je ne veux pas avoir d’attentes pour ne pas être déçue, ne pas m’attacher à nouveau pour ne pas souffrir. Un CDD me suffit amplement, sans quoi j’ai bien peur de me perdre encore une fois dans cette histoire. Hors de question de lui offrir à nouveau mon coeur.

— Difficile d’imaginer autre chose étant données les circonstances, non ? Et puis, je suis en plein divorce, ce n’est pas vraiment le moment de m’impliquer dans quoi que ce soit.

— Oui, et te connaissant, tu serais capable de lui pardonner, à ce con de musicien, rigole Jonas avant de me serrer contre lui. Parce qu’il n’y a qu’à moi que tu ne pardonnes rien, n’est-ce pas ?

— Je ne pardonne pas aux gens qui me brisent le cœur. Steven n’a fait que froisser mon ego, soupiré-je en me levant.

Je m’enroule dans la couverture en lui faisant un clin d'œil et lui offre mon plus beau sourire avant de jeter un regard dans la cour et de descendre récupérer mes fringues. Bon sang, quelle idée de se déshabiller dehors, ma robe est humide quand je l’enfile et un nouveau frisson parcourt mon corps, bien moins agréable que les précédents.

— Tu m’expliques pourquoi tu n’as pas été un vrai gentleman en montant ma robe hier soir pour qu’elle ne soit pas et froissée, et à moitié mouillée ? bougonné-je en le voyant descendre habillé.

— Eh bien, il me semble qu’il y avait une jolie paire de fesses qui m’a complètement fait perdre la tête. Tu ne peux t’en prendre qu’à toi même si tu me fais tout oublier.

— Tous les mêmes, hein ? Une paire de boobs, un cul sous le nez et vous n’êtes plus capables de réfléchir convenablement, me moqué-je en me passant la main dans les cheveux pour les discipliner comme je le peux.

— Moi, il n’y a que toi qui me fais ça, parce qu’on ne parle pas de n’importe quels seins ou cul, hein ? Heureusement que bientôt, je pourrai retrouver mes esprits, ajoute-t-il un peu amer.
— Si le deal ne te convient pas, dis-le tout de suite et on lâche l’affaire, hein ?

— Non, non, tout me va. Je ne vais pas lâcher un beau cul comme le tien quand même ! rit-il avant de me mettre la main aux fesses.

— Bien, alors… on se voit au déjeuner ? Ma mère va encore mettre les petits plats dans les grands. J’espère réussir à faire sauter le loquet de la fenêtre de ma chambre comme à l’époque, histoire qu’on ne soit pas grillés d’entrée, pouffé-je. Ils ne s’en remettraient pas.

— OK, je compte jusqu’à cent et je me pointe. Dépêche-toi, je commence… Un… Deux…

Je lève les yeux au ciel, plante un baiser sur ses lèvres et file retrouver ma chambre d’adolescente. J’aurais bien besoin d’une douche, mais je me contente d’une toilette de chat et de me changer pour au moins être au sec. Je ne sais pas si cette idée de sexfriends est l’idée du siècle et mon cerveau tente de me faire comprendre que c’est une vraie connerie, mais c’est la seule possibilité envisageable. Si je n’attends rien de Jonas hormis quelques nuits torrides et des plus agréables, je ne serai pas déçue. Ça colle entre nous, il n’y a pas à dire. En dehors de ça, je refuse de mettre mon cœur sur la balance une nouvelle fois, surtout alors qu’il part pour Dubaï dans moins de deux mois. Alors on va bien s’amuser, prendre notre pied et chacun retrouvera sa petite vie dès qu’il partira. Je signerai le retour de ma liberté en divorçant, lui se trouvera une nouvelle petite bande de nanas à sauter quand il en aura envie… et tout le monde sera content. Est-ce que j’essaie de m’en convaincre plus que je n’y crois ?

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