Arbre à bois et tête de bois.

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1835.

Papa regardait par la fenêtre. La pluie s'était enfin arrêtée, révélant un bel arc-en-ciel dans le ciel. Papa m'a toujours dit que le ciel brillait sur nous à chaque instant de notre vie.

Puis papa me souleva dans ses bras et m’emmena dehors, parce que je voulais voir l’arc-en-ciel.

« Pa, je suis un grand garçon maintenant, je peux marcher », protestai-je. Je ne voulais plus être porté. J'avais cinq ans maintenant et je ne voulais pas être traité comme un bébé. Cela fit sourire mon père.

« Oui, tu l'es, mon fils, tu es un grand garçon, tu es mon grand garçon, et tu es le trésor de maman ».

Mon Papa me parlait souvent de ma Maman qui était maintenant à l'autre bout de l'arc-en-ciel, il m’avait dit qu'un arc-en-ciel était une sorte de pont entre le ciel et la terre.

Mon père était occupé à m'apprendre à construire un lit. Il y avait beaucoup de travail à faire autour du ranch dans lequel Papa avait trouvé un emploi, c’était chez Mr Random.

Mon père m'avait dit que ce serait une bonne expérience d'apprentissage pour moi, que j’allais apprendre plein de chose et que j’allais lui rendre un grand service. J’étais très fier de l’aider. Je tenais les morceaux de bois pendant que mon père les clouait en place. D'abord, il avait commencé à couper le bois qui était nécessaire pour me faire un lit dans le dortoir. Mr Random avait accepté ma présence et papa pouvait rester ici et travailler, et moi, j’allais l’aider. Près du dortoir, mon Papa ajoutait une petite pièce.

Ce jour là, la construction de la nouvelle section de la maison entraîna un incident particulier lorsque mon père laissa tomber un petit morceau de bois sur mon pied.

« Je suis désolé, fils » ajouta mon père avant de déposer un baiser sur ma joue. Oui, il faisait ça très bien mon papa. Il me donnait des bisous ; et ça me faisait du bien.

« Si seulement je pouvais faire quelque chose pour que tu te sentes mieux.

"Fais tomber la pluie aujourd'hui, et je te pardonne ! ", ajoutai-je en me frottant le pied. Aucun os n'avait été cassé car mon père m'avait demandé de mettre une protection spéciale dans mes chaussures. Si je n'avais pas eu ça, mon pied aurait pu être cassé.

"Ah, ça c’est difficile à faire. Faire tomber la pluie, t’en as de bonnes, fiston. On dirait que je ne serai jamais pardonné alors," dit mon père l'air préoccupé.

« Je voulais vraiment avoir de la pluie, parce que quand la pluie s'arrête, un arc-en-ciel apparaît, et quand je vois un arc-en-ciel, il me semble que Maman me sourit ».

J'ai vu mon père sourire et il m'a ébouriffé les cheveux en me disant que c'était un très beau message. Et il m'a dit :

« Les souvenirs et les rêves sont des choses précieuses, Adam. Ils sont toujours là quand tu en as le plus besoin.

Papa s’accroupit devant moi, me prit les mains et me sourit encore une fois tendrement. Je passai mes bras autour de son cou. Il me serra fort contre lui. Je me sentais si bien.

***

En quelques jours, la petite extension du dortoir a été achevée. Ce n'était pas une grande chambre, mais il y avait assez de place pour deux lits. Mon père, après m’avoir demandé de prendre mon bain et m’avoir fait réchauffer un peu de soupe, me coucha dans mon nouveau lit. Il remonta les couvertures sur moi et m'embrassa sur le front.

"Bonne nuit, fils."

***

Alors que mon père avait un travail difficile à faire, j'avais des tâches à accomplir, les tâches ménagères faisaient simplement partie de la vie, une façon d'aider mon père et d'apporter ma contribution. Je faisais avec bonheur mes tâches ménagères habituelles, et mon père n’avait pas besoin de se fâcher pour que je fasse me corvées. Simplement, j’étais content de pouvoir travailler comme un grand : comme disait papa, je portais également la responsabilité du bien-être des animaux. Je devais traire, nourrir et donner de l'eau aux chèvres chaque matin, puis j'étais également responsable de garder notre chambre propre. Le soir, je ramassais les œufs. Le week-end, je donnais un bain au chien, même si je ne considérais pas cela comme une corvée, j'adorais jouer dans l'eau. J'étais fier d'aider et je faisais de mon mieux pour plaire à mon père et à M. Random.

Oh mon Dieu, mes premières tentatives pour ramasser les œufs avaient été terribles. Le premier jour, j'avais cassé les œufs car les poules m'avaient fait peur et j'avais laissé tomber le panier. Mon père m'avait sauvé et avait séché mes larmes. M. Random ne m'avait pas grondé, et mon père m'avait dit que nous pouvions le remercier d'avoir été si gentil avec nous. Certains patrons pouvaient être très méchants et licencier des hommes pour des infractions mineures, surtout ceux qui avaient un enfant en bas âge.

***

Ce jour-là, j'étais en train de semer des plantes et je devais arroser le jardin, quand je vis quelque chose d’étrange. Le coq avait quitté le poulailler et explorait de nouveaux horizons. J'ai arrêté de creuser et j'ai regardé l'oiseau. Que devrais-je faire ? Le ramener au poulailler ? Mon père m'avait dit que beaucoup d'animaux pouvaient aussi manger des poulets. Les hiboux, des ratons laveurs, des faucons, des serpents, des opossums et des renards pouvaient attaquer une basse-cour. Le coq s'approcha des marches où le chat buvait son lait. D'abord le chat ne prêta aucune attention au visiteur, et le coq audacieux s'aventura vers le bol. J'ai éclaté de rire lorsque le chat a levé sa patte et a giflé le coq. Le coq abandonna et se remit à picorer le sol. J'ai réussi à l'attraper et à le ramener dans le poulailler.

***Le lendemain.

Mon papa était en train de réparer une clôture et moi je l’aidais en lui tendant des clous. Je ne vis pas qu’il attendait. Il me tapota gentiment sur le bras :

« Qu'est-ce que tu regardes, mon garçon ? »

« Regarde Papa, regarde, c'est quoi ? » demandai-je en désignant le petit animal qui courait vers l'arbre.

Papa m’expliqua que c'était un écureuil. Il était gris avec des reflets rougeâtres/bruns sur le dos, il avait une grosse queue touffue.

« Pff ça a couru si vite, qu'est-ce qu'il cherchait ? ».

Mon père s’essuya le front avec le dos de sa main pour essuyer la sueur avant de hausser les épaules et de se remettre au travail.

« Il cherchait sûrement des noix, à ramener à la maison pour sa famille. »

Je savais que Pas devait ramener de la nourriture à la maison pour sa famille, alors je pouvais imaginer que les écureuils faisaient de même pour leur propre famille

Le soleil brillait, les oiseaux chantaient, Papa et moi faisions quelques corvées autour du ranch.

« Regarde Papa, regarde, il est de retour ! ».

L'écureuil était assis dans l'arbre juste au-dessus de ma tête, attendant juste le bon moment avant de faire son saut. Soudain il sauta de l'arbre et atterrit dans mes cheveux. Je poussai un cri de surprise, je me mis à sautiller sur place, partout pour essayer d'enlever l'écureuil de mes cheveux. Mon père n'a pas pu s'empêcher de rire de ma réaction

«Quel drôle de visiteur, bien inattendu dans tes cheveux, fils »

J'ai trébuché et suis tombé dans l'eau, l'écureuil ayant sauté de ma tête et s'étant posé sur le sol avant que je ne touche l'eau. L'écureuil était assis au bord de l'étang et regardait l'eau dans laquelle j'étais tombé. J'avais de la boue dans les cheveux et partout sur mes vêtements.

Plus tard au ranch, on m'a donné un bain, Mme Random a accepté de laver mes vêtements sales et nous avons tous les deux ri de ce qui m'était arrivé pendant la journée.

Après le dîner mon père et moi nous sommes amusés en jouant aux cartes, ça s'appelait « Qui en prendra six » et ce jeu m'a permis de montrer à quel point je pouvais être stratégique. Papa m'avait appris à jouer. Dans ce match, a-t-il expliqué, les joueurs voulaient marquer le moins de points possible.

Mon père avait disposé quatre cartes face visible pour commencer les quatre rangées, puis en a distribué cinq à moi et à lui-même.

« A ton tour, Adam ».

Je pris la meilleure carte de ma main, enfin celle que je pensais être la meilleure, puis je l'ai ajoutée aux rangées, ma carte étant placée dans l'ordre croissant.

Mon père devait déposer une carte.

« Tu prends toutes les cartes, Papa ».

« Ouais, fiston, tu as raison. Je ne peux pas placer ma carte ailleurs. C'est donc le sixième... Oh oh, ça va me faire un score élevé. »

Ça m'a fait rire. Parce que chaque carte avait une valeur en points, entre un et huit points. Papa m'avait déjà dit qu'à chaque fois qu'il m'apprendrait un nouveau jeu, il ne tricherait jamais pour me laisser gagner. Il a toujours dit que si je gagnais, je gagnerais équitablement. Et c'est exactement ce qui s'est passé ce soir-là. J'ai vraiment apprécié le goût de la victoire, parce que je savais que je l'avais mérité et que j'avais gagné honnêtement.

Quelques minutes plus tard.

Mon Papa m'a dit qu'il était l'heure de dormir : mais avant d'éteindre la lampe, au lieu de me raconter une histoire, il voulut tester mon esprit

-Eh bien, fils, écoute un peu : Un singe, un écureuil et un oiseau grimpent au sommet d'un cocotier. Qui obtiendra la banane en premier, le singe, l'écureuil ou l'oiseau ? »

Comme j'avais vu l'écureuil courir si vite, ce fut ma réponse finale. Mais Papa insista pour répéter la question, pour me laisser un peu plus de temps, il voulait que je réfléchisse vraiment. Et là, j’eus un flash. Aucun d'entre eux n'attraperait la banane, car on ne trouvait pas de banane sur un cocotier. Mon Papa me dit qu’ il était fier de moi et j'étais content, j'avais pu échapper au piège verbal.

***Quelques jours plus tard

« Non Adam, tu restes avec moi ».

« Mais Papa, le serpent, il va... »

En fait un petit drame se déroulait juste en dessous de nous. L'écureuil, celui qui s'était posé sur ma tête, combattait un serpent. Et c'était la raison pour laquelle mon père m'empêchait d'aller plus loin. Il ne voulait pas que je sois mordu par le serpent. Mais je voulais vraiment sauver l'écureuil.

« ADAM, RESTE ICI », la voix ferme de mon Papa me stoppa, mais je choisis de l'interrompre avec un grand soupir.

"Paaa…, s’il te plaît. Faut faire partir le serpent. J’veux pas que l’écureuil, y meure ! ajoutai-je, avec un air dégoûté sur le visage. Mais je vis aussi le regard noir de mon papa.

"Non, Adam. Ne t’approche pas. Je te l’interdis ! »

"Très bien, Pa. D’accord ! " Je tournai les talons, pour m’éloigner, l’air déçu et je me dirigeai vers mon père. Quand il parlait comme ça et qu’il faisait les gros yeux, il valait mieux obéir. Mon papa n’était pas quelqu’un que je pouvais défier, je savais que j'aurais de gros problèmes si j'étais tenté de désobéir. J'étais maintenant un grand garçon de cinq ans et il m’était arrivé une ou deux fois de me retrouver soulevé de terre pour atterrir en travers de ses genoux. J’avais reçu déjà une ou deux tapes sur le derrière, du coup, j’avais appris ce que voulait dire le mot conséquences. Donc, j’évitais de désobéir à Papa. Je n’aimais pas quand il se fâchait après moi.

A l'heure du coucher, Papa vint près de mon lit et me demanda, l’air un peu sévère :

« Peut-être pourrais-tu me dire pourquoi il est si important que tu obéisses, Adam ? »

Je baissai la tête. Mon menton était fermement planté contre ma poitrine. Je ne voulais rien dire.

« J'attends, Adam. » Mon père était déterminé ; il me regarda avec insistance. Il ne criait pas, il n’en avait pas besoin, mais le ton de sa voix montrait à quel point c’était sérieux.

J'ai levé la tête. Je connaissais la réponse mais j'étais têtu.

« Je devrais t'obéir parce que parfois quelque chose de mal pourrait m'arriver si je ne le faisais pas, je pourrais être blessé, voire tué. Quand tu me dis de faire quelque chose, c'est pour mon bien ou pour ma sécurité », ai-je récité pour lui montrer que j'avais appris ma leçon. Comme je vis qu’il était content de ma réponse, je ne pus m'empêcher de changer de sujet de conversation :

« Pa, es-tu vraiment sûr que l'écureuil est en sécurité ».

En voyant le visage de mon père se refermer d’un coup sec, j’en vins presque à regretter ma question.

« Adam, tu m'as déjà posé cette question, et je te réponds encore une fois : sois assuré que l'écureuil est bien en sécurité. »

Je ne comprenais pas comment c'était possible, j'avais vu le serpent mordre l'écureuil plusieurs fois, il aurait dû être mort. Mais mon père m'a rassuré.

«Fils, je ne sais pas comment c'est possible, mais je te dis la vérité, il n'est en fait rien arrivé à l'écureuil. Peut-être qu'ils ont une protéine dans leur sang qui leur permet de survivre au venin de serpent. Les écureuils sont connus pour être féroces et pour attaquer et blesser les serpents.

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