Chapitre 39 : "Diable Blanc".

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Un énième verre de vin à la main, enivré, Laure Ibiss d’un côté et Faye Fast de l’autre, Dossan n’aurait jamais cru se retrouver dans cette position un jour. Les deux coquines s’amusaient à le mettre mal à l’aise en l’assaillant de questions. Tellement qu’il eut à peine le temps de relever que Nice et Selim sortaient ensemble. Cette union l’étonna. Il se rappelait des couples qui s’étaient formés à l’époque.

Il remarqua par contre les regards noirs que lui lançait Loyd et Alex. Est-ce qu’il se passait quelque chose entre eux ? Entre Alex et Laure ? Comme à l’époque avec Marry et Chuck ? Il pensait beaucoup trop pour quelqu’un dont l’alcool lui était monté à la tête. Il trésaillit quand arriva la grande rousse colla sa poitrine contre son bras. Plutôt que de profiter du spectacle comme certains pervers l’auraient fait, il pensa qu’il avait bien là affaire à deux petits monstres.


  • Alors dites-moi tout Monsieur Dan’s, avez-vous une petite amie ? lui demanda Laure en appuyant sur son nez qui devenait de plus en plus pâle.

Kimi fut soudainement plus attentive, tendant l’oreille.

  • Non, je… hum…
  • Un bel homme comme vous ? Vraiment ? continua-t-elle en passant sa main sur son biceps.
  • Quelle tripoteuse celle-là ! s’exclama Faye en le ramenant vers lui. En tout cas, si j’avais dix ans de plus…
  • Ce serait... encore b… bien trop jeune ! balbutia-t-il.
  • Même pas drôle, le lâcha soudainement la rousse, tandis que Laure serrait son grappin.
  • Dommage, en effet, persiffla-t-elle.
  • Mon Dieu… ça suffit, dit-il en s’attrapant le front d’une main.

Les deux filles éclatèrent alors de rire, et davantage quand Leroy apparut à nouveau pour lui jeter un regard hautain. Il vint le prévenir qu’il allait chez son copain. Tout le monde le salua chaleureusement quand il quitta le salon. Il tomba alors sur Sky qui cherchait son chargeur de téléphone dans son sac qui y était resté dans le hall. Dès qu’il l’avait vu, le petit frère n’avait pas pu le sacquer et il sembla que c’était réciproque. Ils partagèrent un long regard duquel jaillissait des éclairs.


  • Sale gosse, marmonna Sky.
  • Richard de merde, grogna l’autre en retour.

D’un faux sourire, Sky lui envoya un doigt d’honneur auquel Leroy n’hésita pas à répondre. Lorsque ce dernier claqua la porte derrière lui, il fut bien content de le voir disparaître. Il ne saurait dire pourquoi, mais le regard qu’il avait porté sur lui toute la soirée l’avait dérangé. Le sale caractère, même par adoption, ça devait être de famille, pensa-t-il.

En entrant à nouveau dans le salon, il découvrit tout le monde assis dans les fauteuils. Ils l’attendaient pour échanger quelques cadeaux. Une autre idée de Laure, ils avaient procédés à une cacahuète. Vu que celle-ci avait déjà un cadeau pour Kimi, elle n’avait choisi personne d’autre. Dossan se plu à regarder la scène de loin, comprenant qu’ils se connaissaient bien à leur mines réjouies. En bon observateur, il remarqua les affinités et en vu un peu trop quand il vit Alex glisser légèrement une main entre les cuisses de Faye. Il regarda directement ailleurs. Les papiers cadeaux s’accumulaient au sol. La complicité entre Laure et Kimi, lui rappela de bons souvenirs. Il ferma les yeux quelques secondes pour se rappeler son ami. Il pouvait encore sentir sa présence, comme celle de tous les autres, mais lui en particulier. Si on ne comptait celle de Blear. Il ne voulait pas y penser.


Un grand sourire vint l’égayer quand il aperçut le cadeau que Laure lui faisait. Il s’approcha pour admirer le bracelet en or réparé. Alors même qu’elle savait à quoi s’attendre, Kimi était émue. Prise d’un nouvel élan diabolique, la jeune Ibiss eut une idée remarquable :

  • Tu lui passes au poignet, Sky ?
  • Quoi ?! s’interloqua-t-il immédiatement.
  • Pas la peine, répondit Kimi, mal à l’aise.
  • Je ne veux rien savoir ! Quand on y pense c’est grâce à ce collier que Kimi a rejoint notre groupe.
  • C’est vrai ! s’exclama Nice d’un air guilleret.
  • Première fois que Sky se prenait une baffe d’ailleurs, ajouta Selim.

Les mecs particulièrement s’amusaient des réactions de Sky. Il ne savait plus ou se mettre. Dossan avait entendu un nouvel indice : “Notre groupe” ? Donc même avant l’arrivée de Kimi, ils formaient déjà un “quelque chose”.


  • Allez Sky, soit un peu un gentleman, le taquina Loyd.

Faye se mit à chanter pour l’encourager. Les nerfs lui montant il se retint de prendre le bracelet avec violence. Il voulait éviter une nouvelle bagarre.


  • C’est bon, c’est pas un spectacle ! s’énerva-t-il en prenant place à côté d’elle dans le fauteuil, tandis qu’ils les regardaient de petits regards en coin ? Donne-moi ton poignet, lui ordonna-t-il.
  • S’il te plait ? rétorqua-t-elle.

Elle se retint de rire lorsqu’il releva ses magnifiques yeux verts en colère sur son visage. D’une main, il prit la sienne pour la déposer sur son genou. Délicatement et un peu maladroitement, il tenta à plusieurs reprises d’ouvrir le crochet du bracelet. Lorsqu’il le passa autour de son poignet pour l’y accrocher, le cœur de Dossan se serra. Son fils et sa fille, pour un instant, ressemblait à un couple. Il chassa cette pensée dès lors qu’ils recommencèrent à s’envoyer des piques.


  • Contente ? lui envoya-t-il en pleine figure.
  • Plutôt, oui, répondit-elle en relevant le menton.
  • Alors, j’ai droit à un bisou cette fois ? dit-il en désignant sa joue.
  • Dans tes rêves !
  • C’est bien ce que je pensais… Je te fais trop d’effet, ça doit être pour ça que tu n’oses même pas…

Il n’eut le temps de finir sa phrase qu’elle lui colla un baiser comme il venait de lui demandé. Sky sembla bouleversé, puis fit une grimace en exagérant des tremblements.


  • Urk, cent pour cent je vais choper une maladie..

Elle le tapa en guise de punition, tandis que Laure et Loyd partagèrent un même regard. Si les autres étaient trop occupés pour voir ce qu’il venait de se passer, eux n’en avaient pas loupé une miette. À vrai dire, Dossan non plus.

***

Doublement encapuchonné, Leroy avait retenu la leçon. Il sortait maintenant avec une veste vu les grands froids de l’hiver. L’air frais lui fit le plus grand bien. Il n’avait pas pour habitude de se retrouver avec autant de monde. C’était suffoquant. Alors Kimi était amie avec ceux qu’on appelait les “Richess” ? En un sens, ça ne l’étonna pas. Elle avait toujours su s’entourée des meilleurs, ou plutôt les meilleurs venaient toujours à elle.

Comme convenu, il retrouva son pote Benjamin sous le lampadaire où ils se donnaient rendez-vous à chaque fois. Ils décidèrent de faire un saut par le parc à côté de l’école, pour se poser et discuter. Ça faisait un moment qu’il ne s’était pas retrouvé seul avec son meilleur ami. Habituellement, il y avait toujours quelqu’un d’autre de leur groupe.

En passant devant le lycée, ils remarquèrent de la lumière dans les locaux. Ça arrivait encore bien que des élèves s’y introduisent la nuit pour faire je ne sais quoi, mais quelque chose les inquiétèrent. Ils savaient que les éclairages étaient automatiques, s’allumant au passage des élèves et s’éteignant au bout d’un moment sans captation de mouvement. Le truc, c’est que pour le coup, les lumières s’éteignaient au fur et à mesure que leur yeux montaient les étages, ne laissant plus que celles du quatrième ouvertes. Ils ne réagirent pas tout de suite :

  • Tu crois que c’est Tiger ? demanda Benjamin en premier.
  • Nan, je suis sûr que nan…
  • Comment tu peux en être certain ?
  • L’instinct.

La lumière du quatrième s’éteignit. Frissonnant, Leroy força son ami à se cacher dans un recoin de la cour quand ils virent les lumières s’allumer à nouveau, mais cette fois dans le sens inverse. Ils attendirent, quelques minutes, mais personnes ne sortait du bâtiment. Celui-ci à nouveau entièrement noir, Leroy jura :

  • Et merde !

Il entama une course silencieuse jusqu’aux portes arrières. Personne non plus, sauf une fenêtre étrangement bien refermée. L’école tombait en miettes, il lui apparut étrange que quelque chose y soit nette. Benjamin le rejoint, aux aguets.

  • Tu crois que c’était qui ?
  • J’en sais rien, mais pas un ami, dit-il en levant les yeux en direction du quatrième. Il faut qu’on aille voir.
  • Arrête, tu rigoles ? La nuit, ça fait trop peur ?
  • Sérieusement… Après tout ce qu’on a vécu, t’a peur de ça ?
  • Justement… On ne sait pas qui c’était là-dedans et si c’était un “Wolf” ? Mec, arrête…

Leroy se faufila à l’intérieur en un rien de temps, bien décider à connaître la raison de la venue de ce visiteur nocturne. Il se dirigea immédiatement jusqu’à ce fameux étages, montant les marches par deux, puis par trois au fur et à mesure qu’ils arrivaient à destination. C’est vrai que l’école avait une apparence glauque, les murs se remplissant de tag. Benjamin tremblait comme une feuille, comme s’il s’attendait à voir quelqu’un apparaître à chaque tournant.

Devant les portes tant convoités, Leroy s’étonna de voir les chaînes entremêlées d’une manière qu’il ne connaissait pas.

  • Ça, c’est bien la preuve que cette personne ne faisait partie du clan…

En les ouvrant, il s’engouffra dans un long couloir. Les murs illuminés par les néons s’ouvrant au fur et à mesure dévoilèrent des grandes fresques colorées. Elles n’avaient rien à voir avec les bombages vus précédemment. Ici, c’était de l’art. Les couleurs allaient du plus clair au plus foncé. Benjamin s’arrêta devant la partie jaune sur laquelle résidait un dessin de lapin.

Leroy lui s’empressa de prendre un autre tournant, glissant sa main sur le mur entièrement noir qui ne montrait qu’une immense paire d'yeux orangés. Il s’arrêta nez à nez avec ce qui sembla être un cul-de-sac, entièrement blanc et peinturés de rouge ici et là. Cette partie donnait l’impression d’être un monde à part, fait que pour une seule personne. Il y avait une espèce de trône coller au mur, une grande chaise recouverte de velours bordeaux. Rien ne semblait avoir bougé de place. Il remarqua plutôt l’apparition de quelque chose : un petit papier trônait sur le coussin du fauteuil. Quelqu’un avait donc bel et bien laisser un message. Il s’avança pour en prendre connaissance, déjà hors de lui. Il écrabouilla alors ensuite dans sa main.

  • Qu’est-ce que ça dit ? osa à peine demander Benjamin.

Hors de lui, Leroy n’arriva même pas à lui répondre et lui lança la boulette de papier pour qu’il la lise à son tour : “Très cher Diable Blanc, il me tarde de révéler votre identité”.

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