3. La fin du calvaire

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Ce que m’a montré Sam me terrifie. J’ai l’impression que le ciel me tombe sur la tête. Je perds pied, je fonds en larmes. L'imposteur s'invite chez mes proches comme il veut en me faisant porter le chapeau. Il entre et sort de chez moi à volonté. Difficile à croire, tellement c'est impossible... Je ne sais pas comment réagir et suis encore plus effrayée que ces deux derniers mois.

Raphaël se présente chez moi ce matin-là, un peu sur les nerfs. Quelqu'un s'est infiltré chez lui cette nuit. J'ai peur que ce soit mon voleur d'identité. Je me mets de nouveau à pleurer. Je suis vraiment à bout.

Raphaël pose une main sur mon épaule tentant de me réconforter.

 — Viens avec moi, on va chercher les caméras et tout ce qu’il faut pour mettre ton appartement sous surveillance et peut-être attraper celui qui fait de ta vie un enfer.

Après nous être procuré ce qu’il fallait, nous disposons les caméras dans chacune des pièces de la maison ainsi qu’une bien cadrée sur la porte d’entrée. Depuis tout ce temps, je suis peut-être à la merci d’un psychopathe qui entre chez moi la nuit. Quand j’y repense, les nuits où je suis victime d'insomnie, rien n’a été publié, aucune insulte ni aucun commentaire irrespectueux. Comment cet imposteur sait-il lorsque je dors ou non ? Chaque fois que je réfléchis à la situation, je suis plus terrifiée.

 — Tu peux dormir chez moi ce soir, j’ai prévenu ma femme de la situation, elle a peur pour toi et m’a suggéré de t’inviter, m’explique Raphaël, compatissant.

Le lendemain matin, à mon réveil, Raphaël me fixe d’un regard terrifié. Il a été chercher les cartes mémoires des caméras. Dans un bégaiement incontrôlé, il me dit qu’il y a du nouveau et tourne l'écran de son ordinateur dans ma direction. Une femme apparaît dans le salon. Je ne comprends pas, la caméra de l’entrée n’a rien enregistré comme si cette personne était juste apparue, d’un coup. Je la distingue seulement de dos, mais je crois reconnaitre quelqu’un sans pouvoir lui donner un nom. Ma voleuse d’identité marche comme un zombie, telle un fantôme qui erre sans but, la tête bien droite, regardant devant elle sans jamais détourner le regard, comme dans les films d'horreur. Après être entrée dans le bureau, elle s’assoit devant l’ordinateur, probablement pour continuer à détruire ma vie. Je ne distingue toujours pas son visage, mais tout chez elle me paraît familier. Quelques instants plus tard, elle se lève et retourne dans le salon. Elle pivote lentement, comme si elle ne pouvait pas tourner la tête pour inspecter les environs. Elle fixe soudain la caméra. Lorsque j’aperçois enfin son visage, mon corps entier se tétanise, un frisson glacial me descend le long du dos. Cette femme me ressemble comme deux gouttes d’eau, on pourrait facilement la prendre pour ma sœur jumelle sur ces images. Elle fixe la caméra pendant une minute puis sourit. Ce sourire me terrifie, il est malsain, diabolique. Puis d’un coup, elle disparaît. Elle n’est pas sortie du salon, elle n’est pas passée par la porte d’entrée, aucune autre caméra ne l’a enregistrée, elle a juste disparu. Sans quitter l'écran des yeux, je demande à Raphaël, dans un chuchottement quasi inaudible :

 — Est-ce possible qu'une personne ait piraté les images pour mettre mon visage à la place du sien?

Il me répond par la négative. Sous le choc, je m’évanouis.

À mon réveil, je réalise que je me trouve sur un lit d’hôpital, Raphaël et sa femme à mes côtés. Pendant quelques minutes, j’essaie de rassembler mes souvenirs afin de comprendre comment je suis arrivée ici, puis je me souviens et fonds en larmes. Mais cette fois, c’est une énorme crise d’angoisse, mêlant pleurs, crise de nerfs et hyperventilation. Une infirmière arrive et me demande gentiment de me calmer, me murmure que tout va bien se passer, que je suis en sécurité à l’hôpital. Est-ce la vérité ? Je me sentais aussi en sécurité dans mon appartement... L’infirmière m’indique qu’elle préfère me garder en observation cette nuit, les crises d’angoisse pourraient resurgir et je pourrais de nouveau m’évanouir.

La femme de Raphaël a les larmes aux yeux, elle a peur pour moi, je le lis dans son regard. Cette femme me connaît à peine, mais fait preuve d’une compassion énorme, je ressens une pointe de sympathie et de reconnaissance envers elle.

 — Ne t'inquiète pas Zoé, chuchote Raphaël, on va trouver le fin mot de l’histoire. Tout va bien se passer. Je t’ai apporté ton ordinateur, si tu veux regarder des films ou autre.

Cette nuit-là, allongée seule dans mon lit d’hôpital, j’entends la porte de ma chambre s’ouvrir doucement. Persuadée qu’il s’agit de l’infirmière, je fais semblant de dormir, je n’ai pas envie de parler à qui que ce soit. Mais la lumière ne s’allume pas. Je distingue une silhouette féminine qui se déplace dans la pénombre. Je suis de nouveau terrorisée. J'aperçois du coin de l’œil l’écran de mon ordinateur s’allumer. Elle est là. Dans ma chambre. À mes pieds. Elle pianote rapidement sur l’ordinateur puis se lève. Je la sens au bout de mon lit. Elle me fixe. J’ai peur, je garde les yeux fermés et fais comme si je dormais, complètement tétanisée par mon double maléfique qui me harcèle. Puis, sans pouvoir m'en empêcher, j'ouvre les yeux. Je constate que cette personne porte mon visage. Personne n'a piraté quoi que ce soit. Cette femme est mon portrait craché.

Le lendemain matin, une infirmière entre dans ma chambre et appelle ses collègues en renfort. Je vois les médecins s’agiter autour de mon lit. Qu’est-ce qui se passe ? Je ne me sens pas très bien. Je réalise que je suis face à mon lit, en train d'observer mon corps allongé. Exactement dans la même position que mon double, la veille au soir. Je me retourne sans vraiment comprendre et jette un œil à l’écran de mon ordinateur, toujours allumé. Sur le mur de mon Erditt, des commentaires venant du profil Instabook de mon double maléfique s’enchainent. Il y en a une dizaine qui disent tous la même chose : « Tu vas mourir ». Une colère énorme naît en moi. Je n'ai plus peur, je ne suis plus terrifiée, je suis enragée. J'en veux à toutes les personnes qui m'ont fait du mal, toutes les personnes qui m'ont laissé tomber, toutes les personnes qui ne m'ont pas cru lorsque je leur disais que ce n'était pas moi. Ils vont payer. Ils vont devoir faire face à leurs actes. Ils vont devoir mourir à leur tour.

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