Expertise

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Engoncé dans son armure légère gravée d’une lune noire, le paladin nocturne de Lordrol reçoit le salut aimable et quelques regards curieux des passants.

Outre qu’il est rare de voir un paladin dans une ville aussi reculée que celle de Galdua.

Mais il est encore plus rare d’en voir un appartenant à l’ordre nocturne… en plein jour !

Les petits yeux fatigués qu’il affiche, témoignent d’ailleurs d’à quel point il n’est pas à sa place ici…

Mais son regard se fait plus vif quand une diligence de voyageur se profile à l’horizon.

Celle-ci s’arrête de l’autre côté de la rue, le warg tirant le véhicule renâclant d’être coupé dans son élan, alors que l’Halfelin (étonnement sobre) lui faisant office de conducteur vient le récompenser pour ses efforts avec des friandises.

Pendant ce temps, les passagers descendent les uns après les autres.

Le paladin les observe, cherchant ceux qu’il attend.

Enfin, il repère un couple d’une Orc et d’un humain, qui porte la tenue des érudits de la grande bibliothèque d’Irdnaxela qu’on lui a décrit.

Il vient à leur rencontre, se faisant remarquer en premier par l’Orc.

« Apolin, voici notre correspondant local. »

Le concerné avise l’homme, lui adressant un sourire poli.

« Vous êtes frère Faustin, c’est cela ? »

« Oui. Et vous êtes… »

« Je suis Keith Loà Baron. » l’interrompt l’Orc, « 11ème siège de l’ordre des Compréhensifs-antiques. »

« Et je suis Apolin Ank. Spécialiste des reliques du troisième âge, et membre honoraire des Compréhensifs-antiques. » Ajoute l’homme.

« Mais inutile de nous sortir nos titres ronflants complets à la moindre occasion : nous ne sommes pas à la bibliothèque ! » achève la première.

Le duo rigole, sous l’œil blasé du paladin.

« Très bien. …Nous serons plus à l’aise en intérieur. Pouvons-nous y aller ? »

Les citadins approuvent et Faustin peut enfin rentrer dans l’espace ombragé de l’hôtel qu’il a réservé pour eux.

« N’y avait-il pas un endroit plus… propre ? » interroge le spécialiste en reliques, plissant le nez.

« Vous n’êtes pas dans une grande ville, navré. J’ai pris ce qu’il y avait de mieux. Veuillez m’en excuser. »

L’Orc tapote l’épaule de son collègue, apaisante.

« Ne t’en fais donc pas. J’ai souvent eu à dormir à la belle étoile dans le cadre de mes explorations de ruines, c’est bien pire qu’une nuit dans un taudis. »

Il grogne, mécontent, mais il est trop fier pour se plaindre davantage.

« Je nous ai réservé trois chambres. Mais venez d’abord dans la mienne que nous puissions discuter au calme. »

Le paladin joint le geste à la parole en les précédant à l’étage, jusqu’à la petite pièce qu’il a louée.

Une fois la porte fermée, il présente une feuille aux érudits.

« Cet objet vous est-il connu ? »

Le duo se saisit du dessin qu’ils inspectent avec le plus grand sérieux.

« On nous avait dit que nous venions pour authentifier un artefact, pas juste sa représentation. » Fais cependant remarquer Keith.

« …C’était le plan de base de l’église, mais il a été dérobé. Je veux donc d’autant plus savoir à quoi nous avons affaire, pour juger de s’il est ou non dangereux. »

« En connaissez-vous le nom ? »

« Le masque à deux faces. »

« Bien. Nous allons compulser nos livres et notes, ainsi que débattre. D’ici ce soir, nous pourrons vous donner un compte rendu complet ! »

Le paladin les remercie, avant que les érudits ne quittent la pièce pour aller travailler dans l’une des chambres qui leur ont été allouées.

Une fois seul, Faustin se masse les yeux, luttant contre son envie de dormir, puis redescend au rez-de-chaussée, avant de ressortir à l’extérieur.

Veillant à rester le plus possible dans l’ombre, par égard pour ses yeux de noctambule, il progresse jusqu’à une petite ruelle étroite dans laquelle il s’engage.

Après encore une poignée de minutes, il parvient à une porte surmontée d’une enseigne défraîchie et illisible.

Il pousse le panneau de bois sans hésiter, dévalant la courte volée de marches se trouvant derrière.

L’intérieur de la taverne illicite baigne dans une semi-obscurité agréable.

Aucun client ne peut être vu à cette heure-ci, à l’exception d’un Nain sirotant rêveusement une absinthe.

« Faustin. » Salue-t-il poliment en voyant arriver le paladin, « Les gratte-papiers sont arrivés ? »

Le concerné s’assoit de l’autre côté de la table, alors qu’il commande au barman la boisson la plus à même de lui mettre un coup de fouet sans être à base de sanguier.

« Oui, j’aurais l’expertise ce soir… »

« Sérieusement, tu n’as vraiment jamais pu savoir qu’est-ce que c’était que ce masque pendant les sept années qu’il a passé dans ton église ? »

Le paladin plisse le nez, grinçant des dents.

« Mon maître me traînait sur les routes tout le temps, durant ma formation. Et ensuite, ça m’a pris deux ans pour qu’on me rattache de nouveau à cette église précise… puis une de plus pour entrer suffisamment dans les bonnes grâces de tout le monde là-bas ! En plus, personne en dehors des vicaires jumeaux ne savait rien à son propos… »

« Or tu n’avais affaire qu’au nocturne, qui ne t’aimait pas. Je sais. »

« Ce ne fut pourtant pas faute d’avoir tenté… »

« Il faut dire qu’il devait avoir une bonne intuition… tu lui as tout de même planté ton épée dans le dos, au final… » fait ironiquement remarquer le Nain, finissant son verre d’une traite.

« Ancolie-roublard ? »

« Oui ? »

« Ta gueule. »

« Non. »

« Tu me soules. »

« Moi aussi je t’aime. »

« Arrête de me draguer quand on travaille. »

« D’accord, d’accord, mon coincé d’humain… N’empêche que tu aurais dû agir avant que cet enfoiré n’envoi la relique dans ce patelin pourri de planteurs de légumes. »

Le Nain se gratte la barbichette en souriant pensivement, avant de redevenir plus sérieux.

« Écoute, ce masque, le Collectionneur le veut. Et les bas-fonds nous payent très bien pour ça. Toi tu fais ta part du travail avec les deux érudits et la bande de Calvin, et moi je gère la partie négociation avec nos excités d’employeurs. Ok, chéri ? »

« Oui, oui, ne t’inquiète pas. Comme tout adorateur de Lordrol, j’aime le travail bien fait. »

Là-dessus, Ancolie se lève, donne une douce accolade à Faustin, puis quitte la taverne, satisfait.

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