Comme l'écume

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Ce qu’il verra : Les sombres ondulations de la mer encore chargée d’algues et de nuit, leur enroulement comme des signes, des lettres, des hiéroglyphes venant annoncer ce qui sera, plus tard, et qui aura pris naissance, ici, dans l’éclatement du jour à venir. Ce qu’il verra : une nappe de cendre, pareille à celle des nuées des volcans, une écharpe grise montant de l’obscur pour gagner la lumière. Des projections encore, des scories, des lignes fuligineuses. L’obscurité n’abandonne pas si facilement le combat, la polémique violente qui l’affronte aux paroles des hommes, aux rumeurs, aux ardeurs solaires. Ce qu’il verra : un voile d’or resplendissant, un riche tapis d’orient que traverseront les éclats argentés des reflets, les minces explosions des mots qui surgissent des abysses, veulent porter au grand jour ce qui, d’ordinaire, demeure secret, occulté aux yeux des hommes. Ce qu’il verra : un genre de rivière bleue flottant tout en haut de la mer comme pour dire la persistance de l’eau, sa permanence à la face de la Terre, la vie qu’elle a déployée en des temps anciens afin que nous paraissions et puissions témoigner. Ce qu’il verra : une ligne blanche comme l’écume tenant lieu d’horizon - il faut bien une limite, quelque part, une naturelle césure entre les éléments -, une lueur si vive que le regard en sera comme fasciné, attiré par cette infime meurtrière, où, d’aventure, pourrait s’apercevoir ce qu’il y a au-delà de la vision, que jamais les hommes ne pourront nommer. Il n’y a pas de mots pour le silence, le mystère, le chant intemporel de la poésie, le murmure inaperçu de l’art, le vol de l’âme dans les contrées de l’univers. Rien qu’une mutité et la dilatation de soi jusqu’à cette perte, cette chute qui en sont, toujours, l’étonnant épilogue. Ce qu’il verra : ces nuages à l’horizon, pareils à des taches d’encre, à de la neige maculée du souci et de l’angoisse des hommes et alors il n’y a plus ni langage, ni rêve, ni imaginaire qui puisse porter témoignage de cela qui se produit et s’estompe alors même que nous tâchons de demeurer.

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