42. Bunker

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Les cinq dernières heures furent assez angoissantes, car on n’avait aucune information sur comment se déroulaient les opérations. On savait notre croiseur masqué par une lune, à distance du satellite de surveillance. L’opération du piratage de l’électronique ennemie nécessitait prudence et maîtrise. Ce que nous pensions durer quelques minutes s’était étiré dans le temps. Durant cinq heures, nous avions donc attendu le signal de nous préparer, réunis dans le dortoir C.

— Les civils vont se rendre compte qu’on prépare une contre-offensive au lieu de les ramener sur Terre, marmonna Beck.

— lls n’ont pas leur mot à dire, grogna Mourat.

Le lieutenant Conti entra en armure dans la chambre et ordonna à Héloïse :

— Carlier. Allez vous préparer, et mettez en route l’ESAO. Je vous laisse une minute d’avance.

Héloïse sortit à la hâte.

— Alors ? C’est ce matin qu’on meure, lieutenant ? demanda l’Iroquois.

— Nous verrons bien.

Le silence embauma la pièce de lourdeur durant cinquante longues secondes. Elle souleva la plaque d’armure couvrant son écran de contrôle puis annonça :

— Allez, à vous. — Les hommes quittèrent la pièce les uns un après les autres. — Mettez-vous en tenue Fontaine. Départ dans dix minutes.

Je me retrouvai seule dans le dortoir C. Je baissai mon pantalon et ma culotte d’un même geste, puis me rassis pour enfiler des bas de contention propres. Mes ongles poursuivirent leur glissade à l’intérieur de mes cuisses pour réveiller mes sens jusqu’à prendre conscience du pli du drap contre ma vulve. J’ôtai mon t-shirt, plaçai mes seins par les ouvertures de la brassière avant de fermer l’attache derrière la nuque. Mes pouces glissèrent délicatement autour de mes aréoles en y recherchant les sensations. L'absence de déconnade qui habituellement permettait à l’équipe de déstresser, me rendait anxieuse. Malgré mon esprit préoccupé, mes tétons dardèrent mécaniquement.

La porte s’ouvrit. Je sursautai en cachant ma poitrine avant de me tourner. Rita, me sourit, uniquement vêtue de sa tenue de pilote.

— Prête ?

J’opinai du menton, enfilai mon t-shirt et vérifiai qu’il masquât mon bassin en me levant du lit, avant de renoncer au pantalon.

Nous longeâmes la coursive pieds nus.

— Tu n’as pas peur qu'il y en ai un qui essaie de te violer ?

— Pourquoi ? S’ils font ça, il n’y aura plus personne pour leur sauver les fesses. Et puis de toute façon, se refoutre à poil devant eux dans le hangar ou avant, quelle différence ?

Un peu stressée, je ne pus répondre. Au hangar, tous les Carcajous Maudits se tournèrent vers nous. A la tête du lieutenant Conti, je devinais qu’elle n’appréciait pas ce genre de comportement. Les gynéciennes nous attendaient, la mienne dans son armure de combat, le fusil d’assaut accroché au plastron. J’espérais qu’il ne lui arriverait rien sur la planète. Les selles étaient ouvertes, les sondes lubrifiées. Nos aides nous posèrent nos lentilles et lecteurs frontaux. Rita jeta un regard lubrique aux hommes, la langue posée sur la lèvre supérieure en s’asseyant sur les sondes. Je lui dis :

— En fait, tu cherches à te faire tirer.

— Après une mission difficile, je ne trouve pas ça désagréable.

— Femmes, hommes, tu t’en fous, en fait ?

— J’ai une préférence pour les deux en même temps.

Sa gynécienne ferma le carter pubien. Alors je profitai que tous les regards soient sur les nichons de Rita pour m’asseoir sur ma selle. Héloïse prit soin d’enfermer mon Mont de Vénus sans soulever le t-shirt. Mais lorsque Rita disparut dans la Lionne, il fallut bien que je me découvrisse. Héloïse resta de manière à me cacher le plus possible, brancha mes tétons, puis me laissa montrer à l’intérieur. Elle coiffa son heaume. Horvath s’adressa à moi sur le canal privé ouvert à Muller et Beck :

— Les gars et moi on te préfère à Rita.

— Pourquoi ? Elle a l’air de savoir y faire ?

— Elle a juste l’air nympho, toi t’as l’air sérieuse. Et on sait ce que tu vaux sur le terrain. Si on peut te permettre de gagner un tir, on écoutera tout ce que tu nous demanderas.

— Ça marche, les gars.

Le canal commun à tous s’activa, Horvath supprima celui qu’il venait de créer. Mourat dit avec sa voix d’ours :

— Tout le monde a ravalé sa salive ? Eh ! La brune ! J’espère que t’as la chatte aussi brûlante sur le terrain que devant mes gars.

— Mon clito, c’est une gâchette, répliqua-t-elle. Je tire à volonté.

— Bon, on a peut-être nos chances, conclut l’Iroquois.

— Ouais parce que ce n’est pas avec moi que vous prendrez le dessus, confia Héloïse. Je suis plus douée pour dévisser un gode que pour tuer du Crustacé.

— T’inquiète, on restera groupés, lui dit Horvath.

— Tu resteras collée à moi, ajouta l’Iroquois.

Héloïse souffla en s’impatientant :

— Je ne sais pas ce qu’ils foutent ? Ça fait une demi-heure qu’on est en tenues. J’ai déjà envie de pisser.

— C’est le pipi de la peur, lui dit Beck.

Le lieutenant Conti aboya :

— Trop tard pour le dernier pipi ! On embarque !

Je me déplaçai vers mon transporteur tandis que mes camarades prenaient place dans le module de chaland. Le pilote s’éleva en position stationnaire, alors je posai mes mains au sol pour me glisser dessous. Une alarme rauque se déclencha, en même temps que les gyrophares rouges. L’éclairage principal passa à l’orange. La dépressurisation complète du hangar commença. Le transporteur resserra ses pinces autour de mon Furet.

Une rotation très lente du transmetteur me permit de me remettre dans un état correct de pilotage. Mon cœur tambourinait malgré tout plus fort, inquiet de ce que nous allions rencontrer. J’avais beau me raccrocher aux souvenir des deux Homards que j’avais décapités, je craignais le nombre, comme les armes anti-blindage qui équiperaient forcément des Crustacés sur un site stratégique.

Les gyrophares cessèrent de tourner, et les navettes glissèrent toutes vers l’espace. Deux chalands, deux ESAO. La planète sous nos yeux était presqu’entièrement blanche. Je distinguais à peine le sol enneigé de la couronne de nuage qui bordait la cible. Les pilotes ralentirent fortement à l’entrée dans l’atmosphère, afin que les frottements n’enflamment pas de cockpit et que nous demeurions invisibles. La descente allait prendre plus d’une heure. Je pensais toujours à ma relation avec Héloïse, si simple en apparence et si compliquée dans le fond. Étais-ce moi qui était compliquée par rapport à la normalité ? Ou étais-ce Héloïse qui était émotivement compliquée et moi qui était trop simple ? Mon cerveau en oubliait d’écouter mon corps.

Au fil de mes pensées, le transporteur avec le chaland des Carcajous poursuivit sa plongée, tandis qu’on me maintenait en altitude. La voix de Conti annonça.

— TBK en descente. Les ESAOS doivent être prêt à tirer.

Me rendant compte que j’étais tout juste humide, j’augmentai la rotation du transmetteur entre mes cuisses et chatouillai délicatement mon clitoris par électrostimulation. La sensation était infime, presque imperceptible et pourtant l’effet était dingue.

Après moins d’une minute, lorsque je sentis mon ventre se contracter involontairement, la voix du lieutenant indiqua :

— TBK en place. Nous marquons les cibles. Larguez les ESAO.

Le pilote me largua sans préavis. Le vide m’aspira brutalement alors que les cibles s’affichaient devant mes yeux. Je plongeai la tête la première. Rita me cria :

— Je prends la cible B !

— OK !

Les flancs montagneux défiaient, très vite le bunker se dessina avec les cibles en réalité augmentées : deux vaisseaux stationnés sous un toit en appentis, cachés du ciel par une épaisse paroi de béton couverte de neige.

J’augmentai l’électrification et la vitesse du transmetteur. L’orgasme m’emporta et son énergie passa au travers le béton extraterrestre. Je mis en marche la rotation anale pour tenter de prolonger le plaisir au-delà de cinq secondes. Le tir de Rita frappa à son tour. J’atterris entre les stalagmites de roches, enfonçant mes lourdes jambes dans un mètre de neige fraîche. La commandante nous avertit :

— La tempête revient vers vous. Attendez-vous à avoir une visibilité très réduite.

— TBK12 ! ordonna Conti : Tour de drone supplémentaire avant qu’il y ait trop de vent.

Mon drone décolla et je décidai de le faire tourner en sens inverse de celui télécommandé par fusiliers les marins. Les séracs qui jaillissaient de la neige avaient des formes sinueuses parfois annulaires, comme si des fontaines immenses avaient été figées brutalement. Les structures naturelles montaient jusqu’à des dizaines de mètres, tandis que des plus petites dépassant à peine le mètre formaient comme des herbes ciselées et figées. Les Carcajous Maudits, tapis dans la neige restaient à l’abri de ces atypiques concrétions, prêts à recevoir l’ennemi. Les Homards affluaient, le carapace grise tachetée de blanc. Certains s’arrêtaient sur leurs véhicules fumants, d’autres épaulaient des lance-missiles. Sitôt qu’ils furent une vingtaine, les Carcajous Maudits tapis dans la neige ouvrirent le feu. La surprise fit tomber une bonne moitié d’entre eux. Les tirs de roquettes démembrèrent la plupart, projetèrent d’autres. Les plus chanceux s’abritèrent derrière les épaves et commencèrent la riposte.

La Lionne rampait loin du la zone de conflit pour contourner le bâtiment et commencer son travail de repérage. Je rampai ventre à terre pour rejoindre mes camarades. Les tirs des uns et des autres détonnaient et la vallée répondait en un écho assourdissant, ceux de nos ennemis écharpaient les colonnes de glace. Je repérai le matricule d’Héloïse pour me placer derrière-elle et la protéger. Les Homards tenaient leurs positions et ce malgré un nouveau tir de roquette d’Horvath. Je me concentrai sur le ressenti délicieux de mon transmetteur vaginal. Il me fallait une montée en plaisir stratégique, qui prissent son temps pour offrir un orgasme suffisamment long pour balayer les forces ennemies.

Conti nous rappela :

— Il faut que toutes leurs forces soient à l’extérieur. Mettez-leur la pression !

— Je peux tirer sur la porte, mais il me faut quelques minutes, indiquai-je.

J’ouvris le feu avec mes bras pour tenter de faucher les Homards qui voulaient sortir. Ils se reculèrent aussitôt. Conti m’engueula :

— TBK12, reste en retrait pour recharger ! Collationnez !

— TBK12, je reste en retrait. Terminé.

Je reculai derrière les stalagmites en forme de huit alors qu’Horvath armait à nouveau son bazooka. Il s’agenouilla à flanc de stalagmite. Les Homards concentrèrent leur tir. Une giclée de sang rouge surgit à l’arrière du casque d’Horvath. Je bondis sur le côté de peur que sa roquette n’explosât. Les balles ennemies étincelèrent en pénétrant le blindage de mes cuisses. Je m’adossai derrière les séracs et m’allongeai sur le dos. Tout en bougeant lentement les jambes de l’exosquelette je m’assurai qu’aucun vérin n’était atteint. Tremblante, je levai la tête pour voir le corps de mon camarade inanimé. Le coup de stress avait fait chuter mon plaisir.

— TBK12 à TBK1. Je ne pourrai pas tirer.

— Restez à couvert. OPL17, j’ai besoin d’un tir plasma sur l’accès principal.

— À vos ordres ! répondit Rita. Il faut quelqu’un pour protéger l’arrivée de mes équipes sur l’entrée arrière.

— TBK12, vous pouvez bouger ?

— Affirmatif.

— Contournez la colline et remplacez OPL17. Collationnez !

— Je monte la garde de l’autre côté de la colline. Terminé.

Je me tournai sur le ventre et rampai loin vers les grands rochers. Je m’engouffrai dans la trace de Rita et attendis en regardant une porte d’accès arrière. Elle me dit :

— Si la porte s’ouvre, faut la bloquer en position ouverte.

Le vent commença à se lever, emportant la neige la plus fine. Très vite, la visibilité se réduisit. Les troupes des fusiliers me rejoignaient à pied. Je fermai les yeux sans pouvoir m'affranchir de l'image que me renvoyaient les lentilles et j’essayai de me concentrer sur mon corps, de ne pas penser à Horvath gisant dans la neige. Le lieutenant ne me reprochait pas d’être à sec, c’était une femme après tout, elle savait ce qui était impossible. Mes pensées se dispersaient, trop nombreuses. Je ne pouvais pas me coller la tête dans la neige pour masquer ma vision et m’échapper. Il fallait que j’écoute mon corps pour rester efficace. Les sensations de la selle accrochée à mon bassin suffisaient à diffuser une sensation agréable pour que je puisse encore alimenter l’exosquelette. Mon corps vivait, mais mon esprit ne lui laissait que le minimum. Je ne sentais ni mes jambes ni mes bras. J’avais beau donner de la cadence au transmetteur, cela ne faisait que maintenir le niveau de plaisir à sa plus maigre expression.

Les exclamations de mes camarades m’indiquèrent que le tir de Rita avait été assez long pour faire une brèche. Je me sentis soudainement inutile, à côté de mon rôle. Agacée, je mis en service la sonde anale avec une cadence élevée, pour me réveiller, me donner un coup de fouet. Un regain d’énergie m’envahit, alors j’électrifiai ma bague intime. Le courant qui traversa mon bassin de mon clitoris à mon rectum fit contracter tous mes muscles, mais ne provoqua que du déplaisir.

La porte arrière s’ouvrit du bas vers le haut, et sept Homards en surgirent. Ils ne nous avaient pas aperçus et cherchaient à contourner pour prendre les Carcajous à revers. Les fusiliers n’ouvrirent donc pas le feu et commencèrent à ramper, laissant l’ennemi s’éloigner.

— OPL2 à TBK1, Sept Homards viennent vous prendre à revers. Nous commençons la progression.

— TBK1, bien reçu. On va les accueillir.

L’accès commença à se fermer.

— OPL2 à TBK12. Empêchez-les de fermer cette porte !

— Reçu !

Je m’élançai, comme fouettée par l’ordre et je galopai pieds et mains dans ma neige. Ma détermination était sans faille. Je voulais être plus utile qu’un artilleur orbital. La porte se refermait. Mon bas ventre chercha les sensations, mes membres augmentèrent l’allure. Je plongeai et terminai en roulade sous la porte. Les deux Homards restés à l’intérieur ouvrirent le feu. Je tournai sur moi-même en activant mes chaînes de tronçonneuse. Je décapitai les deux. Je me retournai. La porte était fermée.

— TBK12, La porte s’est refermée.

La voix du second des OPL fut inaudible :

— Entrée … effondrée. … sabotent … installation Besoin d’accès … avant arrivée.

J’en compris que nos ennemis sabotaient le site. Il leur fallait gagner du temps avant que leurs renforts arrivassent, ou peut-être sabotaient-ils tout pour ne pas que les données fussent prises. J’étais la seule à l’intérieur. Le site restait silencieux. Malgré mon intrusion, aucun autre Homard ne s’amenait. Peut-être nos ennemis étaient-ils tous dehors. Si je ne pouvais pas jouir, alors autant que je servisse autrement. La température affichait -8°C et une atmosphère viable. Je descendis la selle. L’air glacé me fit claquer les dents. Je m’empressai de dégrafer mes seins puis de déverrouillai le carter pelvien. Une odeur acide à la fois sèche et humide envahissait les lieux. Je me levai des deux godes qui s’arrêtèrent de tourner. Les pieds sur les charpies de chair chaude et la lymphe translucide de mes ennemis, je récupérai le fusil dans la cuisse de mon ESAO. Je l’armai, puis me dirigeai en pointant la mire vers le couloir ovoïde.

Mes bras tremblaient, mes cuisses se contractaient de froid. Les yeux grands ouverts, peinant à calmer ma respiration, j’avançais dans l’inconnu. Les murs étaient noir charbon, ils avaient la rugosité du béton avec des reflets irisés. Le site semblait préfabriqué car le couloir était un assemblage d’anneaux crantés imbriqués les uns dans les autres.

Je luttais contre le froid, les coudes collés contre les flancs, l’index crispé dans le pontet. Je ne m’étais pas encore imaginée infiltrer, un bunker de Crustacés entièrement nue. Je me sentais plus vulnérable que jamais, mais déterminée à tout faire pour aider la mission.

Je pointai mon arme à chaque intersection. Des lampes blanches aux halos roses permettaient de voir loin. Je n’avais jamais eu le cœur aussi agité, pas même après un orgasme. Chacun de mes sens était aux aguets et mes pieds ne ressentaient même plus le sol tant ils étaient glacés. Seul avantage d’être déchaussée, mes pas étaient silencieux. Mes oreilles me guidaient au fur et à mesure, me rapprochant des gargouillis électriques. Je parvins jusqu’à leur salle des opérations. De nombreux écrans en forme d’œufs surplombaient la salle et captaient l’attention des dix Crevettes qui s’agitaient dans leur carapace translucide, dos à moi.

J’ouvris le feu avec précision. Méthodiquement, je les abattis une par une. Trois à cinq balles par individu. Elles coururent dans tous les sens, paniquées, sans Homards pour les protéger. L’écho de mes propres tirs vibraient dans mes oreilles gelées, une balle fendit un écran qui implosa en vacarme. Les deux dernières Crevettes se réfugièrent dos à une console, immobiles et terrorisées. J’attendis deux secondes que l’une d’elle cherchât à communiquer. Glacée, pressée de terminer la mission, je les abattis avant qu’une seule ne protestât. Les souvenirs du service militaire me guidèrent vers l’immense sphère centrale de laquelle dardaient des tentacules. J’enjambai les cadavres, réchauffant mes orteils dans leurs viscères. Je fis un tour sur moi-même, puis m’assurai que personne ne pouvait m’atteindre depuis une position haute. Je me baissai et scrutai de ma mire qu’aucune vermine ne se cachât derrière un écran. Rien ne bougeait. Seul le crépitement électrique de l’écran fissuré venait rompe le silence. Je passai la bandoulière de mon arme sur mon épaule, puis arrachai un à un tous les peignes de la sphère centrale. Les écrans s’éteignirent au fur et à mesure que les longs poils semi-rigides quittaient leurs interstices. Je calai les huit trophées sous un bras, puis repartis en direction de mon ESAO, à pas plus rapides. Mon fusil tenu à une main, je balayai chaque intersection du regard, sans ralentir le pas. Rien n’aurait été pire que d’être tuée sur le point de réussir. Aucun son ne me parvenait de l’extérieur, l’air me paraissait de plus en plus désagréable à respirer et ma peau ne s’habituait pas au froid. Les sinistres tunnels noirs me guidèrent sans embuche jusqu’à mon ESAO. Je rangeai le butin dans le coffre de cuisse non sans jeter un œil de temps à autre par-dessus mon épaule. N’ayant plus de place pour mon fusil, je le laissai au sol. Je me plaçai au-dessus des sondes, et m’assis prudemment. Leur température gelée resserra malgré moi mes muscles. D’une main je forçai la première à passer mon anus et mon poids obligea la seconde à entrer. L’écume cristallisée sembla me lacérer le vagin. Je rugis entre mes dents serrées jusqu’à ce que l’extrémité rencontre le col utérin. La communication avec l’exosquelette se réveilla alors j’activai la lubrification en abondance et une rotation langoureuse. Je baguai délicatement mon clitoris frigorifié, fermai le carter pelvien puis accrochai les prises-tétons douloureux de froid. Une fois les arceaux rabattus sous mes clavicules, je remontai à l’intérieur. Je claquai des dents :

— TBK12 à OPL1. J’ai les peignes.

Pas de réponse. La température qui remontait rendait mes extrémités douloureuses. Grelottante, stressée, je me tournai vers la porte. J’ignorais comment l’ouvrir et j’ignorais si c’était réalisable sans le peigne de commande. Il me fallait donc un orgasme pour l’éventrer. Les muscles tremblant de froid, il m’était impossible d’obtenir une poussière de plaisir. J’attendis donc que mon corps de réchauffât en m’approchant de la porte et articulai lentement.

— Ici TBK12. J’ai les peignes. Ici TBK12. J’ai les peignes.

— … TBK12… Reçu.

Entendre une voix me répondre me soulagea grandement, même si j’étais incapable de dire quelle femme m’avait répondu. Cette information caressante se répandit à travers mes veines. J’attendis de me réchauffer davantage pour actionner la palpation de ma poitrine. J’observai autour de moi et notai les mâchoires qui maintenaient la porte. J’ouvris le feu dans leur direction. Les balles perforèrent le béton et étincelèrent sur l’acier. Plus rien ne pouvant actionner ni freiner la porte, je glissai mes griffes dessous. Je la soulevai, laissant entrer la tempête de neige puis glissai mes épaules dessous avant de la reprendre pour la hisser le plus haut possible au-dessus de ma tête. Les explosions vibraient dans le vent, perdues dans le brouillard blanc. Je me précipitai hors du bunker en laissant retomber la porte.

— TBK12. J’ai les peignes en ma possession.

La voix de Conti répliqua aussitôt :

— OPL17. Protégez TBK12 jusqu’au point de ralliement. Tenez bons les gars ! On bat bientôt en retraite !

Le chaland des fusiliers marins tournait dans la tempête, l’artilleur assis en cabine ouvrant le feu vers les masses grises qui n’étaient pas numérotées par réalité augmentée. Je courais, réchauffée malgré moi par le vœu de victoire. Je me faufilai entre les rochers, suivie par Rita. Et nous entendîmes les ordres se succéder. D’abord les transporteurs. Sitôt que je fus accrochée, Conti ordonna le retrait. Alors que je décollais seule au-dessus des turbulences, le chef des OPL ordonna à Rita :

— OPL17 Faite sauter le bunker. Il faut brouiller les pistes.

Dans le ciel, au-dessus du tumulte, il faisait grand soleil, et très calme. Je me sentais bien, émoustillée par l'anticipation des futurs compliments. L’horizon de planète blanche s’arrondit, les étoiles se dessinèrent dans le ciel dont le voile bleu s’amincissait. Lorsque l’espace noir et constellé fut total, le croiseur me masqua tout champ de vision. Il entra lentement dans le hangar béant. Il me fallait maintenant attendre que les troupes fussent de retour pour que le hangar fut pressurisé. Une demi-heure ? Une heure ? Ça n’avait pas d’importance, nous avions réussi.

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