Silence autour d'elle
L’infirmerie de Poudlard n’avait jamais été aussi silencieuse.
Louise Potter reposait dans un lit à baldaquin, inconsciente, les draps remontés jusqu’à la poitrine, le teint pâle mais calme. Ses cheveux bruns s’étalaient sur l’oreiller comme une flaque d’encre. Un sort de stase douce, jeté par Madame Pomfresh, ralentissait ses battements cardiaques, protégeait sa colonne, et apaisait les effets du traumatisme magique causé par les Détraqueurs.
Autour d’elle, des fleurs de toutes les couleurs, des chocogrenouilles, des petits mots pliés maladroitement, des boucles de ruban, des hiboux miniatures, des cartes musicales. Tout avait été déposé là en son absence, avec une pudeur étrange.
Seuls deux messages étaient signés.
Un, plié net, d’une écriture soignée :
« Reviens vite, on t’attend. – Hermione »
Et un autre, froissé, trempé d’une tache d’encre à un coin :
« Tu m’as fait la peur de ma vie. Je reste là tant que tu n’ouvres pas les yeux. – Harry »
Ron
Ron ne dormait plus. Il traînait dans les couloirs, les mains dans les poches, les cheveux ébouriffés, la mâchoire tendue. Il avait été le premier à monter la garde devant l’infirmerie. Il y revenait chaque soir.
Il n’en parlait pas. Pas même à Harry. Pas même à Hermione.
Mais ses yeux ne mentaient pas.
Harry
Harry n’avait presque pas quitté le seuil de la pièce. Il restait assis sur un tabouret, le dos courbé, le regard fixé sur sa sœur.
Il n’avait pas parlé de Sirius depuis le match.
Il n’en avait pas eu la force.
Sa colère était gelée en lui, froide et muette. Elle attendait.
Il se contentait de veiller, la main posée parfois sur le drap, comme pour s’assurer qu’elle respirait toujours.
Hermione
Hermione passait avec des livres, des potions, des remèdes. Mais elle restait surtout en retrait, parce qu’elle savait que ce moment n’était pas le sien.
Elle avait écrit. Elle avait pleuré.
Elle avait vu ce que Ron ne disait pas. Elle avait compris avant tout le monde que la chute de Louise avait frappé le cœur de plusieurs garçons... mais que Ron, lui, n’avait jamais cessé d’attendre une réponse.
Cédric Diggory
Cédric ne disait rien à personne.
Il avait insisté pour porter Louise jusqu’à l’infirmerie, puis il était resté dehors, sur le banc en pierre, sous la pluie fine, jusqu’à ce qu’on le chasse.
Il n’avait rien signé. Mais deux chocolats aux noisettes, soigneusement emballés dans une boîte dorée, portaient son odeur, son geste.
Il avait eu peur. Plus qu’il ne l’aurait cru.
Drago Malefoy
Drago avait été vu le lendemain, les yeux rouges. Il n'était pas allé en cours ce jour-là.
Il n’avait parlé à personne.
Il passait parfois devant l’infirmerie, sans entrer.
Le surlendemain, Madame Pomfresh retrouva un petit mot sans nom, glissé sous la porte :
« Je t’avais dit de rester à l’abri. C’est eux qui te font tomber. Pas moi. Reviens. »
Lee Jordan
Lee ne parla plus dans son micro pendant trois jours.
Quand Angelina Johnson le relança, il marmonna :
— J’ai la gorge enrouée.
Mais Fred savait.
Il savait que Lee avait glissé, lui aussi.
Sur le chevet de Louise, parmi tous les cadeaux anonymes, se trouvait un petit paquet de dragées surprises de Bertie Crochue. Avec une étiquette en forme d’éclair.
Fred et George
Fred et George faisaient les pitres comme toujours... mais pas devant Harry. Pas devant Ron. Et surtout pas devant l’infirmerie.
Ils avaient laissé un petit paquet contenant un objet étrange : un miroir enchanté, qui renvoyait des souvenirs heureux sous forme de reflets animés. Des scènes de Louise riant en vol, ou lançant un Cognard.
Il n’était pas signé.
Mais elle saurait.
Seamus, Dean, Neville, Marcus Flint, Crabbe, Goyle
Ils avaient tous laissé quelque chose. Une plume enchantée, une potion énergisante, une bougie parfumée, un bracelet de cuir, une broche en forme de vif d’or, un livre d’images de Quidditch.
Aucun nom.
Mais l’émotion se lisait dans les objets.
Et pendant tout ce temps, Louise ne se réveillait pas.
Elle flottait dans un demi-sommeil lourd, peuplé de cris, de souvenirs flous, de lumière verte et d’un garçon aux yeux gris qui riait en la tenant par la main… puis disparaissait dans la brume.
Mais au matin du quatrième jour, Harry, les yeux cernés, vit sa main bouger faiblement sur le drap.
Il se redressa, le cœur battant.
— Louise…?
Ses paupières frémirent. Un souffle.
Puis une voix brisée, à peine audible.
— …J’ai froid.
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