Le chat

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Je toque à la porte.

- Oui ? me répond la voix de Vanessa.

- C'est Malicia. J'aimerais te parler.

- Entre.

Je m'exécute pour trouver la jeune femme debout face à son lit, où sont alignés plusieurs de ses vêtements. Elle se tourne vers moi pour me demander avec un grand sourire :

- À ton avis, laquelle me met le plus en valeur ?

- Hein ? Pourquoi est-ce que tu me demandes ça ? Tu n'as pas l'habitude que je te conseille sur ta façon de t'habiller.

- Oui, mais cette fois-ci, je me prépare pour un événement d'une grande importance. . . déclare-t-elle d'une voix solennelle.

- Lequel ?

- Ariste m'invite à sortir pour me changer les idées, m'informe-t-elle avec un sourire sadique en coin, mais. . . il me semble que tu voulais me parler. Fais vite, s'il te plait.

Mon coeur se serre et je me crispe. Ma réaction ne lui échappe pas, car son sourire s'élargit, indiquant qu'elle se délecte de la situation, mais je décide de ne pas lui faire plaisir davantage et reprends donc une expression impassible pour lui dire :

- Je pense qu'il est important qu'on ait une ultime discussion, toi et moi.

- Une ultime discussion ? Pourquoi ? Tu comptes t'en aller ?

- Oui. Je n'ai plus rien à faire ici.

- Tu me manqueras, dit-elle avec un triste sourire, mais je la joie brillant dans son regard me suffit à comprendre qu'elle est ravie de mon départ.

Cette fois, c'est à mon tour de sourire en coin. Je poursuis ensuite :

- Viens. Allons faire une promenade en voiture. Nous serons ainsi totalement seules. Il ne faudrait pas que les parents entendent. . . des choses compromettantes à ton sujet, n'est-ce pas ? Je crains bien que notre discussion nous pousse à en parler. . .

Elle fronce les sourcils pendant un instant, mais retrouve rapidement son sourire confiant et acquiesce :

- Bien entendu, mais ne tardons pas, d'accord ? Je ne voudrais surtout pas arriver en retard pour le film que nous devons regarder ensemble. . .

Elle enfile un manteau, empoigne son sac à main et me suis dans le couloir, puis l'escalier. Pendant qu'elle met ses bottes, je vais démarrer le véhicule. Quelques secondes plus tard, elle me rejoint à l'intérieur et me lance avec impatience :

- Allons ! Ne tardons pas !

- Ne t'en fais pas, ce sera rapide, lui prometté-je.

J'active les essuie-glace et m'engage sur la route.

- Alors ? me demande-t-elle en regardant par la fenêtre. Que voulais-tu me dire ?

- Toi et moi avons toujours tout fait ensemble. Nous sommes nées et avons grandi en même temps. Nous avons étudié côte-à-côte pendant des années.

Je tourne sur la gauche. Nous nous retrouvons sur une route encadrée d'arbres denses. Au bout de cette route, un joli ponton en bois donne sur un lac.

- M'en déplaise, tu es ma soeur jumelle, Vanessa. Il est donc normal que nous fassions tout ensemble, n'est-ce pas ?

- Hin ! lâche-t-elle avec un sourire moqueur. Tu fais erreur : nous ne faisons plus tout ensemble, puisque je ne t'ai pas suivie dans ta déchéance. . .

- C'est toi qui fais erreur, rétorqué-je en enfonçant la pédale d'accélérateur. Toi et moi allons finir. . .

La jeune brune s'agrippe à sa ceinture de sécurité. Son corps se raidit. La panique se lit dans son regard et je la savoure, tandis que nous approchons inexorablement du lac.

- . . . ensemble ! finis-je avec un sourire triomphal.

Au même moment, je tourne la tête en direction de notre destination finale et mon regard vert tombe sur un chat noir, assis au milieu de la route.

Je lâche un cri de surprise et tourne à toute vitesse le volant sur la droite. La voiture percute un arbre de plein fouet. Je ferme les yeux de toutes mes forces, pendant que mes oreilles subissent le fracas métallique du pare-choc s'écrasant contre le tronc. Je sens l'airbag contre mon visage, mais ne rouvre les yeux qu'une fois le calme revenu. Je prends de grandes inspirations pour retrouver mon calme, puis retire l'inflator. Pendant que le coussin se dégonfle, je jette un coup d'oeil en direction du siège passager. La tête penchée sur son épaule et les bras ballants, Vanessa n'effectue pas d'autre mouvement que celui de sa respiration. Elle est certainement inconsciente. Le choc et la peur ont dû l'évanouir, mais qu'importe. Ce n'est pas d'elle que je me soucie, actuellement.

Je descends doucement de la voiture. Mes jambes sont encore un peu tremblantes, mais je parviens à marcher en direction du chat, qui n'a pas bougé. Il me regarde approcher, remuant tranquillement sa longue queue. Je fronce les sourils, intriguée. Tout animal aurait fui face à une voiture, surtout suite au bruit infernal qu'on a fait en percutant l'arbre. Pourquoi celui-là ne semble pas du tout inquiété ?

Je m'agenouille face à lui pour mieux l'observer. Il n'a pas de collier. Pourtant, il n'est pas sale ou amoché par des blessures comme le sont la plupart des chats des rues. Il n'est même pas aimaigri par le manque de nourriture. J'en déduis que quelqu'un s'occupe de lui, mais ne prend pas la peine de l'affubler d'un collier. Cependant, ce qui m'intrigue le plus est la couleur de son regard : il est d'un rouge étincelant. Même pour un chat, cette couleur n'est pas habituelle. Je ne l'avais encore jamais vue, en tout cas.

J'adresse au félin un petit sourire et tends lentement ma main dans sa direction pour le caresser, tout en m'excusant :

- Pardonne-moi. J'ai failli te tuer alors que tu n'as rien à voir dans cette histoire. Tu n'aurais certainement pas mérité ce qui te serait arrivé. Heureusement que je t'ai remarqué juste à temps pour t'éviter, mais tu pourrais ne pas avoir cette chance deux fois, alors ne reste plus au milieu des routes, d'accord ?

Il se laisse faire et ronronne même quand je lui gratouille la tête. Je ris, puis le prends dans mes bras pour le déposer au bord de la route, en lui recommandant :

- Ne bouge plus d'ici jusqu'à ce que j'ai fini ce que j'ai à faire, d'accord ? Adieu, gentil minou, ajouté-je en lui offrant une ultime caresse.

Je me retourne ensuite pour retourner à la voiture. Si elle est encore en état de marche, j'ai bien l'intention de finir ce que j'ai commencé, mais j'ai à peine le temps de faire quelques pas qu'une voix grave m'interrompt :

- Que fais-tu, Malicia ?

Je me retourne en sursaut. À l'endroit même où se trouvait le chat quelques secondes plus tôt se tient désormais un homme aux longs cheveux argentés et au regard écarlate. . .

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