ANTE MORTEM
Je suis née un 29 février, en 2056. Un jour rare dans une époque consumée. A une époque où l’on comptait plus de dix milliards de personnes à la surface de la Terre. Alors évidement, la vie était compliquée, je dirai même horrible. Les ressources se faisaient rares, l’eau potable et la nourriture étaient devenus de véritables trésors. Ironique quand on pense à cette société, qui par le passé produisait de la bouffe à outrance. Chaque soir aux informations, nous avions le droit à ces images, des scènes terribles de massacres, des attroupements immenses pour quelque litre d’eau ou quelques paquets de riz. Et tout cela c’était bien avant que le virus n’arrive.
2068, j’ai eu 12 ans, et la Terre accueillait son 12eme milliard d’habitants, un chiffre qui ne faisait qu’augmenter et de manière exponentielle. Personne ne semblait être en mesure de stopper la machine à nouveau-nés qui était en enclenchée à la vitesse maximale. On ne s’attendait encore moins à voir apparaitre le virus deux ans plus tard et de le voir détruire en quelques mois, ce que l’humanité avait mis tant d’années à construire.
Je me souviendrai toujours que quand j’étais petite, nous avions énormément de mal à nous approvisionner en eau et le courant sautait sans cesse à cause des surcharges sur le réseau. Les villes qui s’étaient déjà bien étalées, se construisaient désormais en hauteurs. Les mégalopoles s’étaient tellement étendues qu’elles avaient avalées toutes les forêts et les espaces verts. Il est devenu très rare de croiser un arbre ou un minuscule morceau de pelouse verdoyante. Rare sont les enfants ici qui savent ce qu’est un arbre d’ailleurs. A contrario, les immeubles HLM poussaient dans tous les coins comme de la mauvaise herbe.
A New-York, le quartier du Bronx était sans doute la preuve formelle de cette surpopulation abondante. Le quartier tout entier était devenu une véritable jungle où les arbres sont fait de béton et d’acier. Personne ne s’aventure là-bas, où chaque jour, des meurtres sont perpétrer avec pour seul motif, le vol d’une bouteille d’eau ou d’un morceau de pain. Les gens ne s’entretuent plus pour de la drogue. Ce ciel toujours gris nous rappelle les erreurs que l’humanité à commises par le passé et encore aujourd’hui. Il y a 50ans, peu de gens croyaient vraiment au réchauffement climatique. J’aimerais pouvoir voyager dans le temps pour les prévenir, leur dire que surconsommé n’est pas solution et que leurs petits-enfants payeront pour eux.
A l’époque les voitures fonctionnaient encore au pétrole raffiné, impensable aujourd’hui, les réserves de pétroles sont totalement sèches depuis plus de 10 ans. De toute manière, peu de gens ont encore accès à une voiture aujourd’hui. Je me souviens de la dernière fois que j’ai vu le ciel bleu, c’était il y a presque trois ans, et maintenant le soleil se cache. Sa chaleur et sa lumière réconfortante nous ont quittés. Ce ciel d’orage est là pour nous faire comprendre que c’est notre faute, que nos erreurs ne pourront pas être réparées.
La pollution excessive avait entrainé avec elle les autres rouages de la catastrophe : pluies acides, sécheresse, tremblement de terre…Des pics de température terrible et jamais vu auparavant n’aidaient pas à la survie sur cette bonne vieille planète. Les saisons avaient complétement disparu, ou plutôt, elles s’étaient totalement inversées. 50°C au mois de décembre, -4°C au mois d’août. Les records de température étaient pulvérisés chaque année. Pour vous donner un ordre d’idée, l’année dernière, le mercure à dépasser la barre fatidique des 75°C dans le parc naturel de la vallée de la mort, qui n’a jamais aussi bien porter son nom. La plupart des rivières et des fleuves se sont asséchés. Les lacs ont perdu plus de la moitié de leur contenance en eau.
Les feux de forêts sont devenus monnaie courante, les déserts gagnaient du terrain, grapillant les villes, dernière trace de notre passage sur Terre. J’avais le sentiment que l’humanité commençait à payer très cher après tant d’années où nous avons profité. Perforant la couche terrestre à la recherche de pétrole ou de charbon pour alimenter nos immondes machines qui pollueront à outrance l’air que nous respirions. Polluant les rivières, les fleuves, les lacs, les mers, les océans, la moindre goutte d’eau. Assassinant les animaux, de la moindre espèce, jusqu’à en faire disparaitre un bon nombre.
2070 est arrivé. La Grande Purge. Le virus est arrivé et s’est développé à grande vitesse. Ce virus allait permettre d’assainir le monde de la vermine humaine. Cette seule espèce qui continue de grandir tandis que les autres espèces disparaissaient. J’ai décidé de tenir un journal, peut-être que si ce virus vient à tous nous exterminer, ce serait la dernière trace de mon existence. Je ne veux pas être oublié, mais ne serait ce pas mieux d’oublier ce que la race humaine, la pire de toute, a fait.
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