Jamais joyeux anniversaire
Aujourd’hui c’est son anniversaire.
Ces seuls mots disent tout.
L’année dernière, j’avais tapé un sms que l’on fait tous ce jour-là : Joyeux anniversaire ma poulette.
Puis la réalité m’a rattrapée. Je l’ai effacé.
Après quelques secondes de réflexion, j’ai réécrit : Je pense à toi.
Simple. Rien de festif. En soutien. Et j’ai envoyé.
Car je ne voulais pas mentir, ni à elle, ni à moi. Je ne voulais pas la blesser non plus.
Que souhaiter à une personne qui ne marchera plus de sa vie ? Son corps s’était arrêté, comme si plus rien ne répondait. Fini les espoirs vains.
Elle n’a pas répondu à mon message.
La journée s’écoulait et le temps manquait. Je me suis forcée à l’appeler, me disant qu’à travers le téléphone je parviendrais peut-être à sauver quelque chose. Mais elle n’a pas voulu entendre ma voix. Ni ce jour-là. Ni les suivants.
Pendant plus de deux semaines, elle a fait la morte — pour de vrai.
J’ai appelé en sachant qu’elle ne répondrait pas. Alors j’ai insisté. Pour provoquer une réaction, je crois. Je ne sais pas ce qui m’a poussée à faire ça. Je ne l’avais jamais fait avec autant d’insistance.
Son silence m’écrasait. Il réduisait en poussière le peu de nous qui subsistait. Mon courage foutait le camp.
Elle serait toujours la gagnante, à ce jeu.
Alors cette année, à cet instant précis, je n’ai rien fait, sauf penser à elle. Penser à elle, hier, alors que la France commémorait les dix ans des attentats de Paris.
Je me souviens : elle devait partir en voyage ce jour-là. Elle avait fini par s’envoler, mais jusqu’à la dernière minute tout pouvait être annulé.
Il y a dix ans, elle prenait un vol. Et aujourd’hui, elle est clouée à un lit médical, incapable d’en sortir par ses propres moyens.
Peut-on trouver une façon d’honorer une journée qui l’a vue naître ?
Je ne sais pas comment le faire. Je suis dans l’impasse.

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