La technologie n’apporte pas toujours le progrès - 4

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Des appareils qui compliquent l’existence

Avec Internet, un grand pas est déjà effectué en faveur du monde des technologies, pourtant la possibilité de se connecter ne suffit pas à faire du consommateur lambda, un converti à la « nouvelle science ». Car les autres machines doivent également se mettre au diapason, et tant pis si leurs réglages devient d’infernaux casse-tête, au point qu’il s’avère compliqué d’utiliser une radio, un réveil ou encore un radiateur, des appareils pourtant si simples autrefois par leur manipulation !

Ainsi, sur un site, ce message tristement significatif d’Ève qui recherche, pour sa vieille maman, un radiateur sans programmateur parce que, dit la fille : « Elle ne saura pas l’utiliser. »

La réponse pourrait passer pour lapidaire, mais elle est malheureusement banale :

« À ma connaissance, le programmateur horaire est devenu obligatoire depuis 2018 avec la norme éco-conception. »

C’est donc tant pis pour la vieille dame, qui risquera de ne pas pouvoir se chauffer durant l’hiver. À quelle époque sommes-nous retournés ?

Le virage technologique doit nous faire admettre, sans ciller, que nous obtenons de meilleurs appareils, plus économiques, plus performants, mais est-ce forcément le cas, surtout si les pannes elles-mêmes risquent de se cumuler avec l’obsolescence programmée des multiples composants électroniques de la machine ?

De plus, impossible de compter sur le bricoleur du dimanche pour obtenir une réparation. La plupart des machines ou objets s’avèrent irréparables. Ainsi, pour le consommateur, l’obligation de jeter et de venir grossir les amas des déchetteries, quand les appareils ne sont pas purement et simplement jetés dans la nature.

Sur le site Quora, un mécanicien auto donne son avis au sujet des derniers modèles de voiture. Son discours est loin de ressembler à un message publicitaire :

« (…) Rien n’est fiable à 100%, et vu que tout est interconnecté (multiplexage) et que le nombre de calculateurs explose [avec une] quantité astronomique de câbles (…) les causes de pannes et de plantage informatique se multiplient aussi. Par exemple un défaut de mise à jour du boîtier télématique autonome (anciennement l’autoradio) peut faire grésiller un haut-parleur. Votre écran tactile déconne ? vous n’avez plus de chauffage, de radio, de gps ! Votre super tableau de bord 3D a planté ? Vous n’avez plus de compteurs, plus une jauge, rien ! (…) »

Ajoutons à cela qu’aupravant il suffisait de quelques connaissances en mécanique pour permettre aux conducteurs un peu bricoleurs de réparer eux-mêmes leurs véhicules. Ce n’est désormais plus envisageable et les frais de garage, très onéreux, peuvent rapidement plonger un individu ou une famille dans un engrenage de difficultés.

Le discours ambiant est de prétendre que la technologie permet d’avantage d’autonomie et de confort de vie. Force est de constater que c’est parfois l’inverse. Qui ne s’est pas, déjà, fait raccrocher au nez par un automate de la communication peu courtois, parce que le robot ne parvenait pas à comprendre la demande vocale ? Quant aux machines de paiements automatiques, elles savent, elles aussi, rappeler aux usagers que ce sont bien des machines : les écrans sont parfois à peine lisibles, surtout pour des mal-voyants ou à cause de reflets lumineux et la disparition des éléments sélectionnés, trop rapide, oblige souvent à renouveler l’opération.

Dans Le Télégramme de Brest, du 19 avril 1917, un usager a eu l’idée de chronométrer le temps passé devant une borne d’horodateur : « Montre en main. Nous étions quatre, l'autre jour, place Wilson à 9 h, à faire la queue quand je voulais payer à l'horodateur. Cela a pris huit minutes, soit deux par personne en moyenne. » Il ajoute : « En plus, vous devez connaître votre numéro de plaque d'immatriculation. Souvent, vous ne le connaissez pas, vous devez aller voir sur votre voiture et vous perdez votre place dans la file ».

Le citoyen du futur doit être high teck, ou il ne sera pas. Les populations actuelles s’avèrent désormais dressées, disciplinées et formatées à cette doctrine du progrès. Aucun choix, car la technologie s’impose, non seulement dans les loisirs, mais dans les obligations du quotidiens, quand il y a nécessité de communiquer, de se déplacer, de travailler, de payer…

Ainsi s’explique le développement extravagant des filières des sciences appliquées, de l’ingénierie et de la technologie, au détriment de d’autres disciplines telles que les lettres, la philosophie et les sciences humaines. Or, cette prolifération d’une science technologique qui amoindrit les sciences littéraires et humaines, n’est-elle pas caractéristique d’un déséquilibre et ce déséquilibre entre les disciplines n’est-il pas, quelque part, le signe que notre société moderne, dans son ensemble, menace de chavirer ?

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