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La tête embrumée dans les nuées vaporeuses de ses rêves fantasques, Hanaé n'avait cessé de repenser à la promesse de sa maman durant toute la journée. De nature songeuse, elle échappa à la rudesse des leçons d'arithmétique et de grammaire pour retrouver la douceur de ses pensées. Un comportement qui ne passait pas inaperçu auprès de sa maitresse, Mademoiselle Léonor, et pourtant, celle-ci ne lui en tenait jamais rigueur, la laissant exprimer son imagination à sa façon. Cependant, elle n'était pas dupe ; elle connaissait intimement Sélène pour l'avoir vue fouler les cours de récréation à ses côtés, il y a plus d'une vingtaine d'années. Durant toute la journée, Léonor ne cessa de penser à cette enfant et à sa famille, le regard plein de tendresse posé sur Hanaé.

Lorsque la sonnerie retentit, la fillette se leva de sa chaise à la hâte, agrippa son cartable pailleté et se précipita vers la sortie, un "au revoir" soufflé du bout des lèvres. Puis, elle descendit avec témérité se laissant glisser sur la rampe des escaliers. Un vent de liberté souffla sur sa chevelure ambrée, une caresse lénifiante qui l'invita à poursuivre sa balade onirique. Cette journée promettait de se terminer en apothéose grâce aux bons soins de sa mère, partie cueillir cette fleur extraordinaire aux vertus miraculeuses.

Sur le chemin en terre battue qui la menait à sa maisonnée, Hanaé gambadait gaiement. Elle sautillait, enjambant les petits cailloux semés comme si elle jouait à la marelle et s'envolait jusqu'au ciel. Un sourire étiré à l'infini irradia son visage angélique d'un bonheur immense. Elle donnait cette impression de recevoir un présent inestimable, une manne de l'au-delà. Et pour cause, sa mère lui avait conté une histoire légendaire à propos de cette Pivoine étoilée, aussi, elle se prit à la détailler selon les descriptions mirifiques de sa maman.

"La Pivoine étoilée est de loin la fleur la plus fabuleuse que j'ai eu le plaisir de répertorier. De larges pétales immaculés dansent à petits pas chassés les uns derrières les autres. Ils se froissent délicatement sans pour autant se flétrir, et effectuent une ronde vaniteuse autour de longs et fins pistils qui s'étirent comme des rayons de soleil. En son centre, bat un coeur pur, tout aussi rouge que les pommes d'amour. Lorsque tu la tiens entre tes doigts, elle se suffit à elle-même tel un bouquet avec la prestance d'une reine. Une reine des neiges."

Hanaé aimait la poésie dont Sélène usait lorsqu'elle évoquait la Nature, comme si elle était issue elle-même de la Sylve. Elle se plaisait à croire que sa mère était telle une fée des bois qui s'était égarée dans les confins des terres des Hommes pour leur offrir un peu de bonté.

Du haut de ses huit années, la jeune enfant était déjà bien avancée dans ses réflexions et ne tarissait pas d'inventivité lorsqu'il s'agissait de conter des récits merveilleux. Dans son monde imaginaire, Hanaé était une princesse guerrière, prête à tout pour affronter les terribles méchants ; elle s'était attribuée des amis toujours prêts à l'aider dans ses quêtes impossibles, et c'est en ressassant l'une de ses dernières batailles magiques qu'elle arriva bienheureuse au seuil de son foyer.

La cheminée semblait éteinte et les volets clos, ce qui ne ressemblait guère aux habitudes de sa maman. Curieuse et toujours aussi impatiente, elle entra à pas de géant dans la maisonnette en bois, observant le silence des lieux circonspecte.

Sur le long canapé en velours, elle remarqua la présence de son père, calme et imperturbable. Elle sautilla avec bonne humeur jusqu'à Anton qui ne lui adressa qu'un faible sourire chargé de douleurs, l'une de ces expressions qui n'avait pas pour habitude de maquiller ses traits. Elle le chatouilla de ses petits doigts enfantins, dans l’espoir d'une réaction plus appropriée, plus ordinaire, cependant, le menuisier n'avait pas assez de force pour oser s'aventurer dans les folies de son enfant.

Inquiète, elle arqua un sourcil puis un second avant de questionner son père :

  • Où est maman ? A-t-elle trouvé la Pivoine étoilée ?

Face à cette mine toute émoustillée, Anton répondit, une pointe d'amertume au fond de la gorge :

  • Maman est partie. Elle est partie retrouver cette Pivoine étoilée, mais elle s'est perdue dans les confins de cette forêt...
  • Tu veux dire qu'elle s'est perdue dans la Forêt des secrets ? commenta-t-elle les yeux écarquillés offrant un mélange de peur, d'émotion et de curiosité.

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