Plage de South Pointe, 8 h du mat’.

Le soleil tape encore doux, les gosses de l’école de surf traînent leur planche comme des valises.

Hugo, lui, debout dans l’eau, short trempé, lunettes sur la tête, la voix un peu éraillée par le café et les désillusions.

Il crie :

— Bon ! Aujourd’hui, les enfants, on va parler de philosophie maritime et de cul, donc tenez bien vos leashs.

Petit silence. Les ados gloussent.

— Là-bas, vous voyez ? Cette vague qui casse direct, sans prévenir. Le shorebreak.

Ça, c’est la meuf de boîte. T’as rien demandé, elle te saute dessus, te roule, et quand tu rouvres les yeux, t’as du sable dans le slip et plus aucun souvenir précis.

Mais tu te sens vivant, hein ! Un peu comme après une tequila : t’as mal, mais t’en redemandes.

Il désigne le large.

— Ensuite, là-bas, la grande, la belle, la psychorigide du fond. Celle qui tube parfaitement, mais qui t’éjecte si t’oses respirer de travers.

Tu crois surfer l’amour éternel, mais t’as signé pour un audit de performance affective.

Tu veux l’impressionner ? Mauvais plan. Elle t’évalue. Et à la fin, elle t’envoie valser comme un stagiaire en retard.

Les élèves rient. Hugo hausse les épaules.

— Et puis y’a celle du milieu. Ah… celle du milieu.

Elle te teste un peu, te fait douter, puis t’offre un petit creux, juste assez pour jouer.

Pas la vague parfaite, non. La vague honnête. Celle qui sait être douce sans devenir molle, et imprévisible sans te noyer.

La femme parfaite, donc.

Sauf qu’elle, elle t’attend pas. Faut la lire, la suivre, la respecter.

Il se tourne, attrape sa planche.

— Alors, choisissez : la folle, la juge ou la joueuse.

Mais souvenez-vous : dans tous les cas, les vagues, c’est comme les femmes, si tu veux les garder longtemps, apprends à tomber avec style.

Un gosse ose :

— Et toi, coach ? Tu prends laquelle ?

Hugo sourit, se passe la main dans les cheveux.

— Moi ? Celle qui m’fait oublier que je suis prof.

Et il rame, tranquille, vers la vague du milieu.