J19 Ni désir, ni attachement.

6 minutes de lecture

11/12/18 8H02

«Bonjour Noël

En me couchant hier soir, je me suis dit qu'il fallait que je vous demande quelque chose.

Vous vous rappelez la leçon de sagesse du Dalaï Lama que vous m'aviez écrite: éprouvez pour autrui de la bienveillance, de l'altruisme et de la compassion et le tout sans attachement.

Comment gérer-vous le "sans attachement"?

Vous allez me répondre que vous écoutez votre cœur!

Mes deux compagnes à 4 pattes sont des mélanges de labrador, bouvier bernois, boxer pour l'une et labrador et bouledogue anglais pour l'autre. Vous savez ce qui est formidable: elles sont toujours de bonne humeur, me font la fête quelque soit la situation!!

Bonne journée à vous

Sophia»

11/12/18 8H43

«Bonjour Sophia

Quelle plaisir de vous lire! Ce matin, je suis vraiment vernis. Déjà une longue conversation pleine de bulles frétillantes avec ma benjamine. Et cerise sur le gâteau, votre courriel en guise de couronnement!
Je suis béni des dieux, ou aimé de Dieu, ou né sous une bonne étoile...ou juste planant sur un nuage de bonheur, et c'est déjà beaucoup.

Votre interrogation demande une longue maturation pour trouver réponse. L'idée du Bouddhisme se base surtout sur la suppression de la souffrance. Et la séparation qui suit l'attachement à un être aimé et chéri est non pas une source de souffrance mais un torrent si ce n'est un fleuve de souffrance. Alors la solution serait d'intégrer d'emblée la notion d'amour à la notion de séparation. Aimer en se disant que l'on peut perdre l'objet de notre amour demain va nous inciter à aimer d'une manière débordante. En n'oubliant jamais que cela prendra fin à un moment donné, car rien ne dure ad vitaem eternam. Même les montagnes finissent par s'éroder, même les planètes finissent par mourir, même les étoiles finissent par exploser...et la continuité n'est jamais le néant mais toujours une autre forme de vie.

Ainsi le Bouddhisme nous propose d'aimer tous les enfants comme s'ils étaient nos propres enfants. Projet idéalement parfait vers lequel on devrait tendre si on aspire profondément à l'essence du divin qui est en nous...Noël»

Aimer tous les enfants comme nos propres enfants nous semblent bien utopiste au premier abord! Mais ne serait ce pas réaliste, nous qui souhaitons l’égalité des chances pour tous. Nous qui nous révoltons à l’idée que l’un naisse avec une cuiller d’argent dans la bouche, alors que l’autre sera d’emblée voué à la galère. Je ne restais avec Sophia que sur le plan spirituel. Mais cela réveillait en moi le sociologue qui imagine abolir l’héritage pour distribuer les mêmes avantages à chaque enfant entrant dans le monde. Irréalisable diront ceux qui possède, souhaitable diront ceux qui n’ont rien. Et voilà un glissement du spirituel vers le politique pour affirmer que le rêveur doit crier fort ce qu’il rêve pour espérer bannir les souffrances de tous. Gramsci me vient en aide lorsqu’il disait qu’ «il faut allier le pessimisme de l’intelligence à l’optimisme de la volonté». L’intelligence nous dit que c’est difficile à réaliser, alors que la volonté nous fera déplacer des montagnes.

11/12/18 10H53

«Noël,

Nos échanges hier m'ont donné des ailes! et avec votre soutien voilà que mon dossier est validé!

Nos partages d'émotions, d'expériences, de réflexion me remplissent de bonheur. Cela fait vraiment très longtemps que je n'avais plus ressenti ce pétillement de joie intense au fond de mon cœur.

Je ne sais pas comment vous remercier: vous mettez de la lumière et de la chaleur dans mes journées

Je prendrai le temps ce soir de répondre à votre réflexion de ce matin».

Sophia»

Comment rester de marbre avec une telle déclaration lorsqu’on attache une grande importance aux sens des mots! Comment rester l’esprit détaché face à «nos partages d’émotions, d’expériences, de réflexion me remplissent de bonheur», j’avais donc cette aptitude à la rendre pleine de bonheur. Mon estime personnelle venait de gonfler à en rougir. «ce pétillement de joie intense au fond de mon coeur» m’élevait au dessus des nuages. Etait il possible de garder la tête froide face à ce «vous mettez de la lumière dans mes journées». Il y avait bien de quoi flatter l’égo de même celui qui a errer aux confins du Bouddhisme avec l’intention d’étouffer cet égo ou encore de celui qui tenait compagnie chaleureuse aux soufis qui lui proposaient de maîtriser cet égo! S’agissait il d’un basculement dans cette relation? D’une élévation ou d’un anéantissement...

11/12/18 11H06

«Toujours en lutte avec mon logiciel de compta qui insiste dans ses caprices...je vous imagine avec vos joies à 4 pattes gambadant dans la nature pour me détendre!
Et on ose encore dire que nos animaux sont bête, avec tout le réconfort qu'il nous procure. On devrait les payer plus cher qu'un psy! Vous savez qu'au Japon il existe des maisons qui proposent des chats à caresser contre rétributions...moi ma chatte Charlotte compte sur moi pour son ventre et ses besoins certes, mais pas que! Il y a comme un fluide ou une onde qui passe de la l'un à l'autre lorsqu'il y a échange de tendres effleurements...et comme vous dite si bien sans jugement et sans condition…»

11/12/18 11H41

«Ouf, je suis arrivé à soumettre le logiciel...sans m'énerver grâce à vous...mille merci.»

11/12/18 12H56

«Ah oui je vous avais envoyé la petite fée!!

Je suis bien contente pour vous!!

Je vais me poser 10 minutes et faire quelques respirations pour reprendre de l'énergie! les enfants sentent l'excitation de Noël à moins que ce soit la neige.

A très vite»

11/12/18 19H17

«Bonsoir Noël,

Je partage tout à fait ce que vous avez écrit ce matin. L'amour est corrélé, pour la plupart d'entre nous à la perte. Lorsque j'aime, j'ai peur de perdre l'être aimé et cela a pour conséquence que je ne suis pas totalement libre pour vivre pleinement cet amour.

Je pense qu'en étant, une fois de plus, dans l'instant présent, et en acceptant que la peur fasse partie de la vie je peux me consacrer à vivre cet amour.

Bien sûr si je suis amené à vivre la perte de ce qui me tient tant à cœur je vais souffrir, mais mieux vaut souffrir quand il se doit que trop longtemps à l'avance.

Sophia»

11/12/18 20H21

«Bonsoir Sophia, ravi de vous retrouver!
L'acceptation de la peur est également une souffrance. Et le souhait du Bouddhisme est vraiment d'éradiquer toutes les souffrances. C'est plutôt l'acceptation de l'impermanence qui nous libère. En intégrant l'idée qu'on va perdre ce qu'on aime un jour ou l'autre, d'abord on va magnifier cet amour dans le présent. Et lorsqu'il ne sera plus là, on aura déjà été préparé parce qu'on savait que c'était inéluctable. On ne sera pas indifférent de perdre mais psychologiquement on sera mieux armé.
Pas facile à mettre en application! J'imagine des fois perdre mes filles, ou perdre l'amour qu'elles me porte, ou même pire qu'elles me renient...et j'avoue ne pas savoir si j'aurai la force de surmonter une telle épreuve!!!

C'est toujours un plaisir d'échanger et d'approfondir ce qui donne sens avec vous chère Sophia. Noël»

Elle l’avait déjà employé, mais après vérification, c’est la première fois que moi j’utilisais le qualificatif «chère» pour Sophia. Certains parlerons d’un nouveau palier dans cette relation épistolaire. L’instant où l’on prend conscience que l’on tient à la personne à qui l’on s’adresse, le moment où la chérir s’impose comme ce qui va de soi. Comme une évidence qui tombe sous le sens et qui n’a donc pas besoin d’explication!

Donnais-je le sentiment du «monsieur je sais tout» ou juste celui qui avait durant de longues années mûri ses réflexions? Il y a ce goût pour la littérature, cette appétence pour la qualité de l’expression écrite. Ce besoin de faire appel à la raison du philosophe pour peser le questionnement en cours. Et lorsque le chemin doit se prolonger dans des méandres d’incompréhensions sur le visible, nous reste alors l’option d’entrer en spiritualité pour trouver des réponses que nous suggérera l’invisible. En physique, ne sommes-nous pas en train de basculer vers la suprématie de l’invisible ? Avec les ondes vibratoires que constituent la lumière, l’importance des trous noirs dans l’univers, ou encore l’effet de l’énergie noire sur l’expansion accélérée du cosmos...Ne sommes-nous pas déjà dans l’ère de la physique quantique qui ne conçoit que l’invisible pour ses conjectures! Ne voyons-nous pas poindre l’intuition du mystique à la table du quantique?

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Shams Rumi ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0