Vivre

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Le commandant Faillé était un homme d’un peu plus de 40 ans. Ses cheveux rasés poivre et sel étaient dégarnis sur les côtés. Sous son uniforme, on devinait un début de bedaine que les heures de sport ne pouvaient plus retenir, mais un corps bien entretenu. La capitaine Rondeau, elle, paraissait bien plus enrobée et sévère.

Liz et Nina savaient très bien que l’uniforme de police enlaidis­sait les femmes. Les cheveux tirés en arrière, les chemises larges et la ceinture d’où pendaient plusieurs armes, n’aidaient en rien à garder une silhouette féminine. Liz, elle, ne pouvait s’empêcher de jeter des coups d’œil à sa matraque, suivis de petits sourires en coin à Nina alors que le commandant leur expliquait la raison de leur venue si tardive, deux heures après leur départ du club 96 :

— Tout d’abord je vous remercie de nous recevoir si tard.

— C’est tout à fait normal, répondit Nina sur la défensive.

Le coup de téléphone de la police les avait bien refroidies. Rentrées à l’hôtel, elles avaient fêté cette soirée à coups de shooters de vodka enchaînés à une vitesse proche de la lumière. Si Nina avait commencé à paniquer, Liz l’avait tout de suite prise en main. Se retrouver devant la police était loin d’être ce qui lui plaisait le plus, mais si elle était sûre d’une chose, c’était qu’ils n’auraient jamais appelé avant s’ils comptaient les arrêter. Il n’y avait donc rien à craindre d’eux. Ils avaient simplement dû être obligés de venir s’assurer qu’elles n’avaient pas l’idée d’aller plus loin. Il suffisait de s’habiller un peu pour les accueillir et tout se passerait bien.

Mais une fois devant eux, tous les conseils de Liz n’arrivaient pas à la calmer.

— Vous savez sûrement suite à quels événements nous sommes venus jusqu’à vous, mesdemoiselles.

La bourgeoise et la punk hochèrent simplement la tête.

— Donc, vous ne niez pas avoir infligé cela à cet homme ? Plu­sieurs témoins vous ont vu sortir de la chambre.

— On nie pas, non, coupa court Liz sur un ton sec en prenant la main de Nina dans la sienne.

Ce geste fit doucement réagir la capitaine, qui semblait attendre son tour d’intervenir. Le commandant, lui, enchaîna sans ciller.

— Monsieur Lefranc a été transporté en état de choc à l’hôpital, mais il va bien. Dès que nous pourrons le voir, nous saurons s’il portera plainte ou non. Pour le moment, nous récoltons juste des informations.

Nina broyait la main de Liz en prenant une grande inspiration pendant qu’un ange passait entre eux. Chacun se regarda, tout le monde assis dans le salon. Et c’est la capitaine qui finit par briser le silence. Elle fut assez perspicace pour s’adresser à Nina plus qu’à Liz :

— Nous ne sommes pas passés à côté du... message gravé dans sa peau.

Liz retint un ricanement nerveux alors que Nina pâlissait de peur, les lèvres tremblantes. Elle ne savait pas par quel miracle elle ne s’était pas encore mise à pleurer en implorant leur pardon. Sûrement à cause de son cœur qui lui martelait les tempes au point de sentir une migraine carabinée faire son apparition avec violence. De loin, elle entendit la capitaine continuer :

— Nous savons que c’est difficile, et j’imagine que dans le milieu dans lequel vous vivez ça l’est peut-être encore plus, mademoiselle de Courcelles. Mais si ce qui a été écrit sur lui est vrai, je ne peux que vous encourager à porter plainte contre cet homme.

Sa voix était chaude et douce. Elle contrastait avec l’image sévère que lui donnait son uniforme, et Nina, tout comme Liz, ne put s’empêcher de l’imaginer nue et les cheveux détachés. Le commandant s’était mis en retrait mais Liz gardait un œil sur lui. La discussion allait se faire entre les deux femmes. Les deux observa­teurs se jaugeaient pendant ce temps-là, essayant, d’un côté comme de l’autre, de deviner les réelles intentions qui les animaient. Cette punk était-elle vraiment la soumise décrite par plusieurs des clients du club ou jouait-elle un rôle ? Son regard montrait une assurance qui tranchait un peu trop avec l’histoire qu’ils avaient entendue. Le chauffeur de taxi lui-même avait raconté par le menu combien la femme noire dominait l’autre. Et pourtant, le commandant Faillé n’arrivait pas à l’imaginer avec un collier. Peut-être que tout cela n’était qu’une mise en scène et que la torture de l’homme était préméditée.

De son côté, Liz comprenait très bien les doutes de l’homme et elle en jouait. Sa coiffure et sa tenue “civile” retrouvées ne laissaient aucun doute sur ses opinions politiques. Une punk anarchiste, allergique à toute autorité. Ni Dieu ni Maître. Voilà ce que le policier avait en tête. Mais elle voyait aussi dans son regard que ce qu’il avait sûrement entendu à leur propos éveillait le désir en lui. Oui, elle en était sûre. Ce quarantenaire, tout en essayant de savoir si elles étaient victimes ou agresseuses, laissait une porte ouverte par où se faufilait le fantasme de dominer une femme telle qu’elle. Elle lui offrit un petit sourire en coin avant de le quitter des yeux pour s’intéresser à la réponse de Nina. Mais elle ne rata pas la gêne ressentie subrepticement par l’homme à ce sourire.

— Je ne pense pas le faire, madame, répondit Nina avec une voix qui se voulait plus assurée qu’auparavant. J’ai mes raisons, et ce qui s’est passé ce soir en est une. Je ne vais pas vous mentir, je ne ressens aucune compassion pour cet homme. Il méritait bien pire, il s’en sort bien.

— Vous vous doutez bien que s’il porte plainte, vous serez obli­gée de prouver qu’il vous a bien violée, mademoiselle. L’affaire serait bien plus délicate, malheureusement, si vous faites cette déclaration en tant qu’accusée et non en tant que victime.

Nina ricana nerveusement. Elle imagina rapidement ce que pourrait devenir sa vie si tout cela venait à se savoir. Les accusations de mensonge, sa famille et ses amis qui lui tourneraient le dos en apprenant que non contente d’avoir une aventure homosexuelle, elle pratiquait le libertinage et la domination. Malgré tout, elle prit une grande inspiration et se leva. Elle se tint bien droite face aux deux policiers et fit preuve d’un tel charisme que les yeux de Liz s’allumèrent de joie. Elle dut retenir l’envie de se jeter sur elle, de la couvrir de baisers et de caresses. Et elle se rendit compte à quel point cette relation entamée ce soir-là deviendrait de plus en plus leur façon d’être ensemble. Car à n’en pas douter, la punk mouillait sa culotte en la regardant ainsi. Même les deux policiers, assis sur le canapé face à elles semblaient pris par la puissance de cette femme qui s’avançait vers eux avec un sourire aux lèvres.

— Je vous remercie de votre sollicitude. À vous deux, comman­dant Faillé et capitaine Rondeau. Mais vous avez devant vous, ajouta-t-elle en désignant Liz, la femme grâce à qui j’ai réussi à surmonter l’épreuve que cet homme m’a fait subir. S’il porte plainte, qu’il en soit ainsi. Je peux vous assurer qu’il comprendra rapide­ment à qui il a affaire. Mais je suis persuadé qu’il n’en fera rien. Car la société est faite ainsi, n’est-ce pas ? Quand bien même je n’arriverais pas à prouver ce qu’il m’a fait, sa vie serait gâchée par ma simple accusation. Le monde dans lequel j’évolue aujourd’hui n’est plus celui dans lequel j’ai grandi. Je m’en remettrais, moi. Lui, non. Or, si j’en crois les vêtements qu’il portait, il s’agit d’un homme pour qui les relations publiques comptent beaucoup.

Dans un geste magistral qui étonna tout le monde même elle, Nina posa une main sur l’épaule de chaque policier et leur offrit un sourire rassurant. Son regard était celui d’une femme aimante, touchée par la bonté des policiers. Liz la vit, majestueuse, au-dessus de l’homme et de la femme, comme si elle leur donnait l’absolution. Sans aucune discrétion, elle s’en mordit la lèvre inférieure.

— Revenez nous voir lorsque vous en saurez plus. Vous êtes les bienvenus.

Liz ne put le voir, mais Nina, maintenant bien à l’aise dans ce rôle dominant, leur fit un petit clin d’œil coquin. Les deux policiers rougirent et attendirent que la femme noire enlève sa main de leur épaule et rejoigne Liz pour se réveiller de cet envoûtement et se lever.

— Bien, marmonna le commandant en scrutant Liz qui colla son visage à la cuisse de Nina avec sensualité. Nous ferons ainsi, donc, puisque tel est votre choix. Nous nous devions de vous faire savoir ce que pourrait engendrer une suite dans cette affaire. Il va sans dire que si monsieur Lefranc ne porte pas plainte et vous non plus, nous ne pourrons rien faire de plus.

— Sachez tout de même, enchaîna la capitaine qui avait repris ses esprits, que si vous ne portez pas plainte, vous lui laissez la possibilité de recommencer à tout moment, et de détruire d’autres femmes.

— Croyez-moi, lui répondit Liz avec un air que le commandant définirait plus tard de diabolique, il ne recommencera pas. Il a compris la leçon. À chaque fois qu’il aura de telles pensées, il pensera à nous et comment il pleurait comme un bébé. À moins qu’il n’ait aimé ça...

Nina sentit la main de sa punk remonter le long de l’intérieur de sa cuisse alors qu’elle prononçait ces derniers mots, le regard bra­qué sur le commandant. La capitaine elle-même sembla amusée du petit jeu de Liz. Elle allait pourtant y couper court lorsque le téléphone du commandant sonna. Il sortit de sa torpeur et s’excusa d’un geste de la main avant de s’éloigner pour répondre, leur tournant le dos pour ne pas être déconcentré par cette satanée punk.

Pendant ce temps, Nina passa une main dans la crête de Liz, le cœur battant, espérant au fond d’elle que son violeur ne porterait pas plainte. Cette main caressante fut comme une incitation, pour Liz. Sa main remonta encore jusque sous sa jupe, où elle ne portait aucun sous-vêtement. Le bout de ses doigts frôlait sa vulve chaude et la capitaine devint écarlate, faisant semblant de n’avoir rien vu et reportant son attention sur son commandant.

— Faillé... hum... Ah ! Bon... Certain ?... Bien reçu... Merci brigadier.

Il raccrocha et se retourna vivement. Nina surprit son regard. Elle était la victime, elle était celle qui s’était faite violée, celle à qui il devait s’adresser, mais son premier réflexe en se retournant fut de chercher le regard de Liz. Et en le trouvant, il ne put manquer sa main plongée sous la jupe. Il ne marqua presque pas d’arrêt avant de relever les yeux vers Nina :

— Il semblerait que vous aviez raison, mademoiselle. Monsieur Lefranc ne souhaite pas porter plainte. Toutefois, je dois m’assurer une dernière fois que vous ne changerez pas d’avis, le concernant. Le fait même qu’il ne porte pas plainte prouve en partie sa culpa­bilité.

Nina se détendit d’une seconde à l’autre. De sa main, elle plaqua encore plus la joue de Liz contre sa cuisse et sourit largement aux policiers. Au lieu de répondre au commandant, elle s’avança vers lui, roulant du cul d’une façon qui rendait folle sa punk et déclara :

— Vous buvez quelque chose ? Je veux vous remercier pour votre sollicitude. Vue l’heure avancée, je suppose que vous pouvez bien prendre un peu de bon temps. Il y a aussi des jus de fruit, si vous ne buvez pas pendant le service.

Elle avait frôlé l’homme en se dirigeant vers le bar et servait déjà un verre de rhum et un autre de champagne en attendant une réponse des policiers qui fut coupée par la voix de Liz, survoltée :

— Et vous me montreriez comment vous commandez, com­mandant, souffla-t-elle d’une voix suave.

Nina elle-même en fut bouche bée. Qu’elle provoque un policier était une chose. Qu’elle soit aussi sérieuse la fit marquer un temps d’arrêt. L’homme, pourtant était devenu écarlate. Nina pouvait deviner que son cerveau était en train de lui transmettre des images plus perverses les unes que les autres. Et même la capitaine semblait suspendue à ses lèvres, attendant de voir ce qu’il allait répondre à ça. Pourtant, c’est elle, une fois encore, qui brisa le silence. Et ce fut elle qui surprit finalement tout le monde :

— Si vous avez du jus de goyave, lança-t-elle à Nina en se dirigeant à son tour vers le bar.

Il ne fallut qu’un échange de regards pour que Liz obtienne le consentement de Nina. La punk se leva en ondulant comme une vipère, un regard enflammé posé sur le commandant qui tentait de bafouiller :

— Je... On est en service, ce serait... Et nous sommes collègues, c’est...

— Collègues célibataires, lança la capitaine Rondeau en attra­pant son verre.

Le commandant écarquilla ses yeux marrons sur sa collègue comme s’il ne la connaissait pas. Le visage tourné ainsi, il ne vit pas Liz venir se coller à lui. Il sursauta en sentant les doigts fins de la punk dans son cou, cherchant à défaire les boutons de sa chemise.

— Si vous voulez avoir une chance de nous faire porter plainte, il va falloir être très convaincant, commandant, lui murmura Liz sous les regards amusés de Nina et la capitaine. Et nous convaincre, ça prend du temps.

L’homme se crispa de tout son être lorsque la punk posa sa main sur son entre-jambe. Il déglutit difficilement et lui répondit, d’une voix peu assurée :

— Je suppose que si c’est pour la bonne cause...

Aussitôt, Liz lui sourit en coin et lui prit la main pour le guider vers la partie piscine de l’appartement. Il se força à ne plus jeter un seul coup d’œil vers le bar et sa collègue. Il savait qu’ils auraient une sérieuse discussion, mais en même temps... Son métier lui avait fait perdre sa femme, qui était retournée vivre dans sa ville d’origine avec ses enfants qu’il ne voyait plus qu’un week-end sur deux. C’était à peine s’il les connaissait. Trois ans qu’il en était ainsi et ils avaient quatre et sept ans. Et depuis, c’était à peine s’il avait pris du plaisir une fois ou deux. Alors tout commandant en service qu’il était, il ne put résister à une telle tentation, malgré les remords qui commençaient déjà à le ronger.

— Ça lui fera pas de mal, dit la capitaine à Nina après avoir bu une gorgée et s’être assurée que son commandant ne l’entendait plus.

Nina, elle, s’enfila cul-sec le verre de rhum qu’elle avait prévu pour Liz. Le coup de fouet ressenti lui permit de garder encore sa stature qu’elle avait prise depuis quelques minutes. Scrutant la capitaine, l’imaginant sans son uniforme qui l’enlaidissait, elle ricana :

— Je ne m’attendais pas à ce que cette entrevue se termine ainsi. Vous semblez plus habituée à ce genre de situation que votre chef.

— Je peux vous le dire à vous, puisque vous êtes pas du coin et que je pense pas que ça va vous choquer. Mais cette soirée. Si j’avais pas été de garde, j’y serais allée. Masquée, pour ne pas qu’on me reconnaisse à l’entrée. Puis je me serais faite baisée dans le noir le plus possible et serais repartie avant que les lumières ne soient remises. Ça doit bien faire trois mois que j’ai rien connu d’autre que mes doigts et mon gode.

Elle devint pivoine et s’enfila le reste de son verre d’un trait. Mais elle dut s’avouer que ça faisait du bien de pouvoir le dire aussi directement. Et Nina ne semblait pas la juger, alors elle continua :

— Vous voulez que je vous dise ? Vous avez bien fait de lui faire ce que vous avez fait. Il a dû falloir vous contenir pour ne pas lui couper les couilles, à cette ordure.

— Ahah ! s’exclama Nina maintenant bien détendue. Ça m’a bien traversé l’esprit ! Mais il y a Liz. Je ne veux pas être séparée d’elle. Je ne peux pas. Vous savez, sans elle, je ne ressemblerais pas à ce que je suis aujourd’hui. Même lui l’a remarqué. Je l’aurais juste laissé attaché s’il n’avait pas remarqué ça. Mais il s’en est vanté, il a voulu tenter d’avoir une fois de plus le dessus sur moi, en me disant que c’était cet acte qui m’avait façonnée telle que je suis. Il avait sûrement un peu raison, mais je n’ai pas supporté de l’entendre s’en vanter. Le reste... Vous le connaissez.

Elle but une gorgée de champagne en se surprenant elle-même d’en parler avec un tel recul. Elle soupira d’aise, une douce pensée qui la caressa : tout ceci était définitivement derrière elle. Il n’y avait plus que Liz et l’avenir. Liz qui elle aussi avait laissé ses démons dans son dos. Infaillibles, irrésistibles. Les jours et les années à venir ne seraient plus que d’autant de raisons de jouir de la vie. Pleinement.

— Vous devriez vous mettre plus à l’aise, capitaine. J’ai dans l’idée que Liz en a pour un moment avec votre chef.

Nina fit le tour du bar en reluquant la capitaine qui se délestait déjà de sa ceinture et la posait sur le comptoir. Sans un mot de plus, elle tendit sa main vers elle pour l’accompagner jusqu’au salon. Au passage, elle ne manqua pas de voir Liz, près du jacuzzi, qui terminait déjà de mettre le commandant à nu, à genoux devant lui en train de défaire les boutons de son pantalon. Mais elle ne s’attarda pas trop sur cette délicieuse vision.

La curiosité l’emportait. Arrivée au salon, elle vint se plaquer contre la capitaine qui respirait déjà de façon désordonnée. Nina surprit le regard de la policière qui allait de son visage au jacuzzi. Mais tout en lui coulant des mots qui, elle l’espérait, finirait de la rendre lascive à souhait, la belle bourgeoise déboutonnait un bouton par un de sa chemise bleue.

— Montrez-moi ce que cet uniforme cache, capitaine. Il ne vous met pas en valeur.

La femme tremblait. D’envie et de crainte. Nina ne connaissait que trop bien cette sensation, l’ayant elle-même vécue quelques mois plus tôt. La première fois avec une femme. Mais contraire­ment à elle, Nina crut déceler dans son regard le fantasme en train de se réaliser. Elle ouvrit son décolleté et caressa la peau entre ses seins, douce et blanche. Son soutien-gorge de sport les écrasait au point qu’on aurait pu croire qu’elle n’avait pas plus de poitrine que Liz.

— Embrassez-moi, mademoiselle Rondeau, vous en mourez d’envie.

Après une longue hésitation où Nina fit remonter ses doigts jusque dans le cou de la policière pour terminer leur course à son menton, elle se lança et ferma les yeux en avançant la bouche vers cette femme à la peau sombre qui se sentait irrésistible. Nina lui offrit un baiser doux, long, langoureux. Elle prit bien son temps, guettant de voir si elle allait finir par ouvrir les yeux, plonger ses prunelles brunes dans les siennes pendant qu’elle enroulait sa langue habile autour de la sienne. Mais elle ne le fit pas. Elle recula doucement son visage en passant sa langue sur ses lèvres, un fin sourire illuminant son visage. Lorsqu’elle ouvrit enfin les yeux sur une Nina radieuse, cette dernière lui demanda, tout en lui caressant la joue :

— Aussi bon que dans vos fantasmes, capitaine Rondeau ?

La policière prit une grande inspiration en se mordant la lèvre, à la fois étonnée et excitée que Nina ait pu deviner cela.

— Bien meilleur... Et appelez-moi Salome, je crois que je ne vais bientôt plus être capitaine.

Nina ricana en reprenant son ouverture de boutons. Elle tira sur la chemise pour la sortir du pantalon et venir à bout des dernières attaches. Elle l’ouvrit en grand et découvrit un ventre plat et musclé. Si elle avait les hanches larges, ce n’était que pour rajouter de la sensualité à ses formes. Timide, Salome la laissait la regarder en faisant glisser sa chemise au sol. Elle devait bien avouer qu’elle était subjuguée par cette jeune femme qui avait subi un viol et avait réussi à se relever et même se hisser à cette hauteur-là.

Celle qui allait d’ici peu devenir sa première amante passa dans son dos avec un chaloupé à damner un Saint et lui embrassa la nuque en lui détachant les cheveux. La policière ferma encore les yeux alors qu’elle sentait les douces mains de Nina sur son ventre, remonter avec une sorte de paresse jusqu’à sa poitrine. Ses doigts passèrent sous l’élastique, et bientôt elle levait les bras pour aider Nina à lui enlever ce soutien-gorge oppressant. Aussitôt, elle se plaqua contre Salome et prit ses seins à pleines mains, tirant doucement sur ses tétons pour les faire durcir.

La capitaine gémissait déjà et Nina jeta un coup d’œil par-dessus son épaule, vers le jacuzzi. Liz s’était déshabillée à son tour et offrait au commandant Faillé une pipe qu’il n’était pas prêt d’oublier. Le mâle dominant qui l’avait sûrement poussé vers ce métier com­mençait à reprendre possession de lui et il ne se gênait pas pour l’agripper par la crête et lui enfoncer son dard au fond de la gorge, menant Liz à chaque fois au bord du vomissement.

Cette vision l’excita au plus haut point et elle décida de la partager avec Salome.

— Ouvre tes yeux, Salome, regarde, lui souffla-t-elle à l’oreille.

Elle tourna légèrement la policière pour qu’elle ne puisse rater la scène.

— Tu t’es déjà imaginée le sucer comme ça, hein ? lui demanda-t-elle en redescendant ses mains pour s’attaquer à son pantalon.

— Peut-être une fois ou deux, j’avoue, répondit Salome en ricanant. Mais j’aurais jamais cru qu’il soit aussi...

— Bestial ? termina Nina en faisant glisser le pantalon de la policière d’un coup sec jusqu’à ses chevilles.

Celle-ci en fut surprise, d’abord. Mais les dents qui vinrent aussitôt se planter dans ses fesses qui, à son goût, étaient bien trop pourvues de graisse, la firent grimper dans les tours. Sans même s’en rendre compte, elle se cambra et offrit ses rondeurs à Nina.

— Tu aimes ça, qu’on soit bestial avec toi, Salome ? lui demanda une Nina qui se découvrait de plus en plus dans son élément en tant que dominatrice.

Elle lui claqua la fesse pour appuyer sa question et attendit la réponse qui fut soufflée presque dans un soupir :

— Oui...

Avec un grognement de plaisir, Nina lui mordit la deuxième fesse et se releva pour se défaire à son tour de sa jupe et de son débardeur. Pendant ce temps, Salome ne quittait plus son collègue des yeux. Il ne regardait pas vers elles et ne savait pas qu’il était épié. Elle voyait son sexe tendu baiser la bouche de Liz qui, à genoux, les mains croisées dans le dos, se laissait faire comme la dernière des putes. Et elle aurait aimé être à sa place. Aimer sentir son chef avoir autant de désir pour elle. Et même lorsqu’il se pencha après que Liz lui ait dit quelque chose et qu’il lui gifla les seins à plusieurs reprises, elle l’envia. Elle ne le supporterait sûrement pas, mais elle aurait aimé que quelqu’un le fasse, qu’un homme lâche tout sur elle, quitte à lui faire mal.

Douleur que Liz, de son côté, recevait avec délice. Cet homme-là, c’était presque un défi pour elle. Le pousser dans ses derniers retranchements, lui faire comprendre qu’à ce jeu-là, il n’aura jamais le dessus sur elle, qu’il n’osera pas aller jusqu’où elle pourrait l’emmener.

— Défoncez-moi pour de vrai, commandant, lui assénait-elle régulièrement.

Alors il plantait sa queue tendue au fond de sa gorge, lui enfonçait le visage dans son bas-ventre jusqu’à être lui-même gêné par ses haut-le-cœur sur son gland. Alors il lui rejetait la tête en arrière, la voyait pleurer, baver abondamment et lui sourire. Il giflait ses petits seins et la faisait crier de douleur, mais elle continuait de le provoquer :

— Encore, commandant.

Il n’osait même pas lui répondre, même pas l’insulter. Peut-être savait-il que ça ne ferait qu’attiser encore la dépravée à ses pieds. La tirant par la crête, il la dirigea vers le jacuzzi et la fit se mettre à quatre pattes sur le bord. Aussitôt, la punk se cambra à son maximum, remuant sa croupe devant lui :

— Peut-être que cette matraque pourrait servir à faire du bien, pour une fois, lui lança-t-elle en ricanant.

Elle ne le regarda pas, quand il la lâcha pour aller la récupérer. Elle attendait simplement, jetant des coups d’œil vers le salon. Elle vit Nina nue debout derrière la policière, une main plongée dans sa culotte, l’autre sur son cou. Serrait-elle au point de lui obstruer un tant soit peu la respiration ? Était-elle en train de travailler à mettre la capitaine à ses pieds ? Ou n’était-elle que douceur et sensualité ? Liz n’avait pas réussi à avoir de réponse à ses questions lorsqu’elle se crispa sous le coup qui s’abattit sur sa fesse droite. Elle manqua plonger dans le jacuzzi mais se rattrapa au dernier moment et s’agrippa au bord de toutes ses forces pour recevoir les suivants.

— Ça t’excite, hein ? souffla Nina à l’oreille de Salome. Et en même temps, tu te demandes comment elle peut aimer ça...

Les gémissements continus de la capitaine de police sonnaient comme une victoire aux oreilles de la dominatrice qu’elle était deve­nue pour de bon. Elle serra le cou de la policière vigoureusement en branlant son clitoris aux proportions inattendues.

— Pas la peine de répondre, je le sens au bout de mes doigts. C’est un joli clitoris que tu as l’air d’avoir là, Salome, lui fit-elle en le tapotant sèchement d’un doigt.

Celle qui était devenue son jouet se crispa mais n’eut aucun mouvement de recul. Elle était subjuguée par ce qu’elle voyait et entendait. Comment ces deux femmes avaient-elles réussi à les rendre ainsi, elle comme lui ? Au loin, elle voyait son chef et collègue augmenter la force de ses coups de matraque sur le fessier de la punk dont les cris de douleur de plus en plus perçants dégageaient une sensualité presque insoutenable. Oui, ça l’excitait, oui elle sentait son gros clitoris bander comme jamais.

Même le ricanement de Nina dans son dos lui fit l’effet d’un puissant aphrodisiaque. Bien qu’elle retira sa main de sa culotte, la belle femme noire ne lâcha pas son cou.

— Après avoir goûté aux lèvres de ma bouche, tu dois avoir envie d’en goûter plus, hein ?

Sans attendre une réponse qui ne viendrait sûrement pas par des mots, Nina la relâcha et lui prit la main pour l’attirer vers le canapé. Elle choisit celui qui lui permettrait de garder un œil sur sa soumise, autant par excitation que par précaution et s’y assit en ouvrant grand les cuisses. Salome plongea son regard sur son sexe dégoulinant. Nina attendit quelques secondes, appréciant ce regard posé sur elle, avant de l’inviter à la rejoindre :

— Tu es belle, Salome. Tu es une femme magnifique. Viens et oublie tout le reste.

Elle ne savait pas trop pourquoi, mais ces mots la firent tomber à genoux. Hésitante encore, elle approcha doucement son visage de cette chatte. Rapidement, son odeur épicée l’enivra et elle ferma les yeux pour parcourir les derniers centimètres. Avec délicatesse, elle y déposa quelques baisers qui firent ronronner sa propriétaire. Celle-ci glissa une main dans ses cheveux et la caressa avec tendresse, l’incitant de quelques ondulations du bassin à continuer.

Bientôt, Salome osa sortir sa langue et en glissa juste le bout entre ses lèvres. Ses mains posées sur le canapé coulèrent jusqu’aux cuisses de Nina et les caressèrent alors qu’elle gagnait en assurance dans chacun de ses gestes. Nina lâcha un gémissement en tournant la tête sur le côté. Le commandant avait laissé tomber sa matraque et dévorait littéralement la croupe de Liz qui jouissait sur le bord de la piscine. Ses petits cris aigus caractéristiques la berçaient autant que la langue de Salome.

Nina sourit.

Elle revint sur sa policière qui s’occupait maintenant exclusi­vement de son clitoris. Elle le coinçait entre ses lèvres et l’aspirait franchement, lançant des décharges de plaisir à Nina qui raffermit sa prise sur ses cheveux.

— Oh oui, tu aimes ça, hein... Que c’est bon, ne t’arrête pas.

Alors que la policière tendait sa langue pour se faufiler entre ses lèvres et venir récolter à la source son nectar devenu abondant, Nina lâcha un cri. Le premier d’une longue série. Les yeux mi-clos par l’ivresse et la luxure, elle remuait ses reins sur le visage de Salome en revenant sur sa punk qui tendait visiblement une capote au commandant.

Elle posa une deuxième main sur la tête de la capitaine qui prenait apparemment goût au lesbianisme et la plaqua violemment contre elle. Le regard braqué sur le jacuzzi où le policier se mettait à pilonner son amour, elle se branla contre le visage de Salome qui se mit à gémir de plaisir à son tour.

Mais avant de se laisser aller à la jouissance, Nina se releva, une main fermée sur la tignasse de la policière. Elle lui posa la joue contre le coussin du canapé et lui releva la croupe qu’elle fessa à plusieurs reprises :

— Belle de partout... Un si beau fessier que personne n’a tenu dans ses mains depuis si longtemps.

Elle lui baissa la culotte aux chevilles et planta illico deux doigts dans sa fente qui était déjà grande ouverte et bien lubrifiée de cyprine. Elle les tourna en elle, les avança, les recula, jusqu’à trouver l’endroit où Salome lâcha un cri plus fort que les autres. Un ricanement obscène résonna dans la pièce et Nina se concentra sur ce point, le malaxant, le triturant, le griffant même, tout en lui fessant et lui mordant le cul.

La capitaine ne tarda pas à jouir. Violemment. Une véritable implosion qui la remua au point que Nina dut retirer ses doigts. Malgré tout, l’orgasme continuait de secouer le corps de Salome. Lorsqu’elle se calma et qu’elle se mit à chercher son air, Nina se fit plus câline, plus féline. Elle caressait et embrassait sa croupe et le bas de son dos le temps qu’elle reprenne ses esprits.

Plus loin, Liz criait d’un plaisir qui sonnait légèrement plus belliqueux qu’à son habitude. Elle avait posé un pied au sol pour plus de stabilité et allait et venait au même rythme et avec la même violence que le policier. Chaque fois que leurs reins s’entrecho­quaient, ils lâchaient un cri mêlé de désir et de douleur. Liz se retourna pour le regarder, un sourire provocateur aux lèvres :

— Je vais te faire gicler... Han !!! Quand je veux je te fais gicler ton foutre !

La fessée qu’elle reçut en réponse ne pouvait valoir dire qu’une chose, pour elle : elle avait raison et il le savait. Elle accéléra brutale­ment la cadence de leurs va-et-vient, balançant ses reins avec une dextérité incroyable. Au loin, elle entendait la capitaine jouir comme une folle sous les doigts de sa Maîtresse et fut traversée d’une vague de fierté. Sans quitter sa noire amoureuse des yeux, elle stoppa son bassin au moment où les bourses du commandant lui fouettait le clitoris et creusa ses reins à s’en faire mal dans le même mouvement.

— Aaaaahhhh !!! Put...

Les capotes avaient cela de décevant qu’on ne sentait que les contractions violentes de la verge sans le délice du sperme qui tapissait vos parois internes. Mais elle l’avait eu. Et ce plaisir-là valait tous les jets de foutre du monde. Elle avait laissé ce flic la baiser violemment, même la frapper de sa matraque, mais elle était restée tout du long maîtresse de lui. En nage, haletante, les fesses douloureuses comme rarement, Liz trouva tout de même la force de lui offrir quelques contractions vaginales qui le firent encore lâcher plusieurs râles, avant qu’il ne se retire d’elle.

La punk vint tout de même lui offrir quelques baisers sur le torse. Après tout, elle avait quand même pris son pied à baiser un commandant de la police ! Elle le laissa se rhabiller et repartit, grimaçant lorsque ses pas réveillaient ses douleurs fessières. Elle savait qu’après ça, elle aurait des bleus. Peut-être demanderait-elle à Nina de les prendre en photo, pour se rappeler de ce soir-là où elle avait réalisé un de ses fantasmes.

Salome rattachait sa ceinture près du comptoir lorsque Liz vint se lover contre Nina dans le canapé. Elles s’embrassèrent lon­guement sans un mot, sous le regard de la capitaine, jusqu’à ce que le commandant Faillé revienne. Nina se leva alors et se dirigea vers lui, toujours nue. L’homme se rinça l’œil volontiers avant de commencer les adieux :

— Je crois que malgré notre insistance, vous ne porterez pas plainte, dit-il avec un sérieux qui déconcerta les trois femmes.

Liz éclata de rire, mais l’homme ne fit que rougir encore plus qu’il ne le faisait déjà.

— Non, répondit doucement Nina en retenant un ricanement. Mais puisque ce monsieur Lefranc semble habiter non loin d’ici, vous pourrez peut-être prévenir vos collègues de l’avoir à l’œil. Et s’ils veulent des détails sur mon histoire, qu’ils n’hésitent pas à m’appeler, rajouta-t-elle avec un clin d’œil qui dérida la policier.

— Vous êtes...

Il ne termina pas sa phrase mais soupira d’aise et se tourna vers l’ascenseur en appuyant sur le bouton d’appel.

— Nous vous souhaitons une bonne fin de soirée, mesdemoi­selles, lança-t-il en s’engouffrant à l’intérieur de la cabine.

Salome, elle, vint vers Nina, à qui elle tendit une carte de visite, le visage rouge de honte :

— Au cas où vous... changeriez d’avis... pour la plainte.

Puis elle suivit son commandant dans l’ascenseur. Juste avant que la porte ne se referme, elle aperçut entre les deux policiers un échange de sourires complices. Elle regarda la carte et vit que la femme avait griffonné son numéro personnel avant de la lui donner. Cette carte glissée dans sa main n’avait donc rien à voir avec une quelconque plainte.

Elle se retourna vers le salon mais remarqua l’absence de Liz. Elle ne tarda pas à la repérer près du lit, dos à elle, qui s’agitait sur quelque chose dans sa nuque.

Lorsque la punk se retourna et se mit à quatre pattes, Nina vit qu’elle s’était mit elle-même son collier. Liz avança dans cette position, un large sourire pour sa Maîtresse.

— J’espère que ta chienne t’a fait honneur, ce soir, Madame, lui annonça-t-elle fièrement une fois à genoux à ses pieds.

— Je t’aime mille fois plus après cette soirée, Liz, lui répondit-elle avec les yeux humides.

— Je t’aime tellement moi aussi, Nina.

La punk posa sa tête, rêveuse, contre la cuisse de Nina. Elle sentit la douce main de sa Maîtresse caresser sa crête et ferma les yeux dans un soupir. Une larme de joie perla sur sa joue, que Nina ne vit pas. En esprit, la punk revoyait sa belle Cécilia. Elle lui souriait. Son esprit échauffé par cette journée aux multiples rebondisse­ments mêla les mots du violeur de Nina à cette image. Cécilia qui lui disait : « Tu devrais me remercier. Tu as touché le fond à cause de moi, et le chemin sur lequel je t’ai mise a croisé le sien. Je ne t’ai pas détruite, je t’ai préparée à cette rencontre ».

Liz frissonna en sentant les larmes couler à flot malgré elle. Elle renifla et Nina se pencha pour la regarder :

— Qu’est-ce qui se passe, ma belle ? lui demanda-t-elle d’une voix douce comme un nuage blanc dans un ciel bleu.

Liz rouvrit les yeux et vit le visage noir de Nina, qui s’était agenouillée à son tour, tout près du sien. Elle renifla à nouveau et ricana devant la coiffure encore plus en pétard que d’habitude de sa Maîtresse qu’elle n’avait pas remarquée jusque là. En la voyant ricaner ainsi, le visage de Nina s’illumina. Elle lui séchait les larmes de ses pouces avec une délicatesse que seul l’amour peut faire naître. Liz se mit à pleurer de plus belle, les épaules secouées par ses propres ricanements nerveux. Elle fut envahie de cet amour, celui incontrôlable, dont la puissance vous bloque la respiration, cet amour qui dépasse de loin l’adoration et vous propulse au fond de vous-mêmes, vous fait voir enfin ce qu’il y a de plus beau en vous.

— Merci ! cria-t-elle dans un sanglot en se jetant dans les bras de sa Maîtresse.

FIN

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