Bonjour ma grande.

Que je suis contente de pouvoir enfin te faire part de mon sentiment !

Qu’est-ce que tu m’as donné du fil à retordre pour te faire grandir ! Remarque, grandir ce n’est peut-être pas le bon terme, car je ne sais ce qui s’est passé dans tes (nos) gènes pour que tu ne sois pas plus haute que 3 pommes, euh… ton père qui ne faisait pas dans la dentelle disait : pas plus longue qu’une crotte de chat ! et tes cousins, moqueurs invétérés, plus méchamment disaient eux, que tu étais la sœur de Baba Michelin. Bibendum, pour les puristes. C’est dire si tes bourrelets les inspiraient ! Mais soit dit en passant, tu ne faisais rien pour contrecarrer ces moqueries ! Tu bouffais tout le temps. Tout et n’importe quoi ! Mais je ne suis pas là pour te faire un procès. Je te parlerai plutôt de ton parcours. Je dois te dire que je suis assez satisfaite de ce que tu es devenue. Il t’en a fallu une sacrée dose de courage pour surmonter les écueils qui se sont élevés devant toi tout au long de ta vie ! Il t’en a fallu de la ruse pour éviter les pièges tendus. Il t’en a fallu de la patience pour supporter tous les outrages.

Un jour, il te faudra de la force pour porter la lourde cape de ton sacerdoce : garder des secrets que tu ne pourrais dévoiler à quiconque sous peine de provoquer un tsunami dévastateur autour de toi. Dépositaire malgré toi, des confidences des uns et des autres, tu n’échapperas pas à ta vocation, cette capacité d’écoute que possèdent peu d’êtres sur cette terre. Écouter et aider !

Tu n’exerceras jamais un métier en particulier, mais tu seras une manuelle accomplie : aucun ouvrage aussi barbare qu’il soit ne te fera peur. Tu relèveras tous les défis pour le fun ou, peut-être, juste pour prouver aux autres ce dont tu es capable, et plus certainement pour ne jamais faire mentir ton proverbe préféré : Pas capable est mort sans avoir essayé. Mais ton hyperactivité masquera la terrible vérité aux yeux de tous. Par ce moyen, tu compenseras ton manque affectif, la détresse et le désespoir qui t’habiteront jusqu’au bout du bout !

Ah ! tu mèneras une double vie palpitante ! Mais personne ne te jettera la pierre ! C’est la vie. Fais-en usage pour ton bien-être.

Tu te poseras tellement de questions sur l’humain que tu finiras par glisser sur les terrains minés de l’ésotérisme et ce serait un miracle si tu n’y perds pas ton âme. Rien ne te sera épargné : toutes les affres du mal, la douleur physique et morale ; une NDE, te laissera perplexe. Plus que jamais, elle te fera poser des questions sur ta capacité mentale : folle ? Pas du tout ! te rassurera la seule personne à qui tu oseras en parler, ton psy. L’expérience ne sera ni traumatisante ni douloureuse et elle te mènera à une meilleure compréhension de ta spiritualité. Tu en sortiras grandie et ainsi éclairée, la mort ne sera plus un problème pour toi.

Un AVC enfin, parachèvera ta quête. Tu deviendras définitivement une loque aux souvenirs déchiquetés, ta cervelle trouée ne gardera que des bribes de ton passé à ressasser. Que la mort te soit douce, ma grande ! Bientôt ! Ça ne saurait tarder à présent !

Ah ! j’allais oublier. Souviens-toi aussi qu’un jour, au journaliste qui te posera la question de ce que tu attendais de la vie, tu répondras que tu caressais le rêve d’avoir un trottoir à ton nom. Juste un trottoir. Parce que, à une écrivaine sans talent qui s’est dévergondée à écrire ses mémoires érotiques, voire plus que ça, ce serait un comble de lui offrir une rue, voire une impasse. Un trottoir te suffirait !

Souviens-toi surtout que je n’ai aucune honte de Moi ni de ce que je fus quand j’étais Toi !

Moi ou Toi, 50 ans après !