Chapitre XXXV : Une sacrée chute

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Avril 2023

- Reeve rejoins-moi, allons faire un tour. J'ai envie de prendre l'air et de discuter et finalement je me dis que tu es la seule à pouvoir me comprendre.

- Laisse-moi un moment, je préviens Étienne, je ne voudrais pas qu'il s'inquiète. Je sais qu'il se fait un sang d'encre depuis quelque temps si je disparais trop longtemps.

- Rassure-toi je ne vais te kidnapper. Je veux juste marcher un peu. Après tout, on peut s'accorder une pause. On bosse depuis trois mois pour remettre cette bicoque, là j'en ai ma claque. Une virée entre filles dans la garrigue, ça pourrait être sympa.

- Allez tu as raison. Je prends mon chapeau et un panier pour ramasser du thym et des morilles.

Les deux jeunes femmes prirent le sentier encadré d'un muret de pierre qui longeait la rivière en direction du château. Reeve virevoltait tel un papillon butinant de fleur en fleur. Sarah la suivait en admirant l'insouciance dont sa nouvelle amie faisait preuve. Elle ne savait pas comment Reeve avait pu lui pardonner toutes ses vacheries et pourtant à aucun moment elle ne semblait lui en avoir été autrement. Le ciel en cet fin avril était magnifique. Elles s'installèrent sur une couverture au milieu de bruyères. Allongées l'une contre l'autre regardaient les nuages qui jouaient à sauter moutons dans un somptueux ciel bleu. Le soleil pour la saison les enveloppait d'une douce chaleur, une légère brise soulevait leur chemisier. Ce petit air coquin faisait se dresser leur téton. Sarah souriait quand Reeve transformait les cumulus en dragon, chien poisson et bien d'autres animaux.

- Tu sais Reeve, je suis heureuse d'avoir croisé ta route. Je ne crois pas au hasard pourtant je pense que notre rencontre devait se faire. Je voulais te remercier de m'avoir accepté tel que je suis. Tu es une des rares à ne pas me juger.

- Arrête, tu vas me faire rougir. Ne dis pas de bêtises, je n'ai rien fait d'exceptionnel. - Oh tu m'as tendu la main et ça c'est bien plus que personne n'a jamais fait.

Reeve se redressa et attrapa la main de Sarah et ajouta :

- Suis-moi on va aller voir ce que cachent ses ruines. Etienne m'a interdit d'y aller toute seule. - On va peut-être s'abstenir alors.

- Pourquoi je ne suis pas seule. Tu es avec moi donc c'est bon.

- Tu plaisantes je compte pour du beurre. S'il t'arrivait quoi que ce soit il me tuerait.

Sarah n'eut pas le temps de finir sa phrase, Reeve avait déjà franchi le seuil du premier rempart et avancer en direction du donjon. Quand elle entendit un cri.

- Putain Reeve, où es-tu ? Je t'avais dit que c'était pas une bonne idée.

Elle cherchait de tous les côtés et écoutait pour percevoir un appel à l'aide. Dans sa tête, ça fusait dans tous les sens. Et si elle était inconsciente. Et si elle s'était quelque chose. Ou pire si elle était tombée sur un détraqué... Un fantôme. Elle balayait l'espace à la recherche d'un indice, pour seule réponse : un silence. Sarah s'en voulait, elle imaginait déjà les yeux remplis de fureur d'Étienne.

- Reeve, répond-moi. Ne déconne pas. J'ai besoin de toi.

- Bou.

- Mais tu joues à quoi ?

- A cache-cache forcément.

- Tu es une vraie gamine.

- C'est bien non ?

- Oui j'adore mais là tu m'as fait une belle frayeur.

- À ton tour, je compte et tu te caches.

- Si tu veux, après tout pourquoi pas.

Reeve se tourna vers le mur de la tour, Sarah s'éclipsa en direction de la suivante et entendit son amie.

- Cachée ou pas j'arrive.

Elle l'observa Reeve qui jouait le jeu à fond et quand elle la vit assez proche, elle commença à reculer. Reeve allait la toucher quand la terre se dérobait sous leurs pieds. La chute fut terriblement longue et rapide à la fois. Elles terminèrent leur course les fesses dans la terre battue. Elles étaient tombées dans un tunnel....

E.Y

  • Oh cette chute, ça va Reeve, rien de cassé
  • Non, non, je ne crois pas..
  • Ouf, moi non plus...Mais....tu
  • Quoi ?
  • T'as pas un peu pris…
  • Comme toi en fait !
  • Tu es observatrice.
  • Oh ça va, tu ne mets jamais de robes
  • J'espère qu'il ne sera ni de Marc ni de.... de toute façon je vais le garder celui là
  • Pourquoi tu espère qu'il soit de qui

Sarah se tue , compta, recompta dans sa tête, elle ne savait vraiement pas, elle répondit néamoins :

  • On peut parler d'autre chose...tu crois que...qu'il...
  • Oh on a joué au toboggan, ça ne risque rien ! Puis, on verra bien ! Moi je n’ai pas peur, je suis née optimiste !
  • Bon madame l'optimiste, tu as du réseau toi !
  • Euh non !
  • Et toi ?
  • Non plus
  • Il faut qu'on marche alors, je me vois mal remonter
  • Si on reste là...Etienne va nous trouver, il le sait que je m'intéresse aux vieilles pierres et aux cathares
  • Ah mais oui, tu as vu les environs, c'est pas les ruines qui manquent, je te dis on marche, on verra ou nous mène ce passage
  • En tout cas Sarah, on te laissera jamais tomber Etienne et moi
  • Je ne vois pas de quoi tu parles, j’ai de l'argent moi aussi, madame Reeve bientôt de Pallières va pas me prendre de haut ! je ne suis plus la racaille du pont neuf qui va te faucher ton homme
  • Mais il faut pas prendre mal...
  • Marche, c'est tout !
  • Pourquoi tu es dure comme ça, je ne t'ai rien fait, je te tends la main, je t'ai toujours tendu la main, j'ai pas envie de marcher, je suis fatiguée, j'ai peur…Étienne, Étienne, Ééééétieeeennne !
  • Et voilà, elle pleure ! bon on s'assoit et on prie ?
  • Non tu as raison, on marche, il doit y a voir une sortie !
  • et au fait, Sarah, tu nous le présente quand ?
  • Le pére de mon futur bébé, enfin si l'enfant est de lui ?

*A.R*

Reeve suivait Sarah, elle était passée devant soi-disant pour ouvrir la route parce qu’elle maitrisait mieux les terrains escarpés dans lesquelles elle avait errés toute sa vie. Trois mois étaient passés depuis ses déconvenues successives à Paris, depuis que Marc avait décidé que sa vie serait ailleurs et sans elle ou plutôt dans les bras de son double. En caressant son ventre comme pour se rassurer que tout allait bien, elle savait que cet enfant deviendrait son étincelle de vie pour laquelle elle se battrait sans relâche. C’était sa chance de devenir une meilleure personne et elle voulait à présent c’était vivre en paix. Un doute l’envahit tout à coup, n’entendant plus de bruit derrière elle, elle se retourna et vit Reeve à genoux en larmes.

– Putain Reeve qu’est-ce qui t’arrive ?

– ça va pas. J’ai la tête qui tourne. J’ai peur. Si je venais à perdre l’enfant.

– Dis pas des conneries, tu es bien plus forte que tu le laisses paraître. Je peux te dire que derrière tes airs de midinette se cache une vraie tigresse qui nous porte tous à bout de bras.

– Tu le penses vraiment, tu ne dis pas ça juste …

– Pour te faire plaisir, tu rigoles. Tu sais que je dis toujours ce que je pense. Pas besoin de s’emmerder par passer par quatre chemins pour aller droit au but.

– C’est toi la plus courageuse de nous deux, j’ai toujours su que derrière cette tristesse qui te poursuivait se cache une belle âme.

– Ne commence pas avec tes mots gentils qui dégoulinent comme du miel. Arrête de vouloir toujours nous protéger, de nous mettre dans du coton.

– C’est ce que tu penses que je suis trop gentille, trop sentimentale et trop conne à vouloir que les autres soient heureux.

– Là, je pense surtout que ces saloperies d’hormones nous mènent par le bout du nez.

– Tu as conscience que je ne veux pas changer, je veux voir le monde de toutes les couleurs.

– Ouais, c’est bien beau tout ça mais quand une merde te tombe dessus tu fais quoi, l’autruche.

– Ben non, j’essaie de trouver une solution pour que les choses ne s’enlisent pas.

– Eh bien madame la rêveuse, tu as un génie à sortir de ton sac parce que là on est dans un beau bordel. Il ne manquerait plus que ça s’écroule sur nous.

Reeve ne peut plus contenir les larmes qui débordent.

– Eh voilà quand ta putain d’hypersensibilité se met en action. Bouge-toi, il faut qu’on sorte de là parce que je pense qu’on va frôler l’inondation.

– Mais…

– Laisse tomber, tu m’épuises et puis finalement je n’aime pas te voir pleurer. Allez, t’a gagné, je chouine. Tu dois me déteindre dessus. Finalement, c’est une fille comme toi que j’aurai voulu avoir pour sœur.

– Tu sais les liens du cœur sont tout aussi forts que les liens du sang et pour nous deux peut-être qu’il en est ainsi.

– Bon en attendant tu te sens de continuer, ou tu préfères attendre ici pendant que j’appelle les secours.

Sarah lui tendit la main pour l’aider à se relever, Reeve posa ses doigts sur l’arrondi qui se dessinait sous le tee-shirt de son amie et lui dit avec douceur :

– Tu sais qu’ici se cache un ange.

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