Enfer sur Terre

de Image de profil de Antony MoissetAntony Moisset

Avec le soutien de  Mac Aroni 
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L’hiver était froid. Tous les hivers l’étaient, mais celui-ci me paraissait particulièrement glacial. Les trois couches de vêtements ainsi que la paire de gants bien rembourrée que je portais ne suffisaient plus à me tenir chaud. La météo avait annoncé -20°C pour ce soir. L’hiver au Canada ne nous donnait pas vraiment un accueil chaleureux.

Je marchais donc dans la ville d’Ottawa à la recherche d’un bar où je pourrais me réchauffer avec de la vodka en guise de consolation. La journée avait été pourrie. Je m’étais réveillé en retard pour la deuxième fois de la semaine, et on était mardi. Je m’étais couché la veille avec la forte intention de demander une augmentation à mon patron pour ma fidélité envers l’entreprise depuis 15 ans. Ce connard m’a rappelé ma fidélité aux retards plus que courants ces derniers temps. « C’est la dernière fois que j’accepte votre retard, sinon je serais obligé de me passer de vos services » m’a-t-il dit avec tous le mépris et la supériorité de tous ces rois qui prennent les autres pour leurs larbins, en oubliant que nous sommes humains, comme lui. J’ai donc du tirer un trait sur mon augmentation et sur ma pause déjeuner pour manger les dossiers empilés sur mon bureau à la place de mon sandwich jambon beurre.

Travail terminé, je suis rentré chez moi à 19h30 en pouvant déguster mon premier repas de la journée, un fish and chips fraichement préparé par le traiteur du coin. « Bonne chance pour cette nuit » m’a-t-il souhaité. Je l’ai remercié en ne sachant pas de quoi il parlait. Repas terminé je suis sorti et me voilà maintenant sous la neige épaisse d’Ottawa, en train de me diriger vers mon bar habituel, BAR BA PAPA. Je ne m’en étais pas rendu compte jusqu’à maintenant, mais le quartier était beaucoup plus calme que d’habitude. Aucun enfant en train de faire une bataille de boule de neige dans le parc d’à côté, ni aucune voiture circulant sur la route verglacée. Les petits commerces du coin étaient également tous fermés. Il faut dire qu’habituellement, je sortais aux alentours de 18h, et non pas 20h.

Une fois arrivé devant le bar, je me rendis compte que j’avais oublié de souhaiter l’anniversaire de ma soeur bien aimée. Je sortis mon téléphone pour l’appeler. Plus de batterie. « Décidément, les Dieux sont contre moi aujourd’hui ». Je rentrai dans le bar, personne. Il était entièrement vide. Cela me fit tout drôle de voir le calme régner, à la place des bruits de verres qui s’entrechoquent, des discussions et des rires rauques des anciens du coins, tous ces éléments qui donnaient à cet endroit un charme digne des plus grands bar de cow-boy. « Bar Man! ». Aucune réponse. « Tommy, c’est Jacob, et j’ai soif! ». Au bout de quelques instants, la porte qui se trouvait derrière moi s’ouvrit brusquement et Tommy apparu. C’était un géant de 2m05 et pas moins de 120kg dont 110kg de muscles. Il avait dans la quarantaine mais en faisait 60, probablement à cause de sa barbe grise et de son absence partielle de cheveux.

-Salut Jacob, je ne pensais pas que quelqu’un viendrait ce soir.

-Comment ça, qu’est ce qui se passe, et pourquoi tout le quartier est désert?

-Arrête, tu plaisantes j’espère?

Mais voyant que mon regard était on ne peut plus sérieux, il se mit à rire.

-Tu n’a pas entendu les rumeurs?

-Quelles rumeurs?

-Tu veux un verre avant que je t’explique tous ces ramassis de conneries que les religieux essayent de nous faire gober? C’est offert par la maison ce soir.

-Tu m’en vois ravi !

-Comme d’habitude ?

Je répondis en acquiesçant.

Il parti derrière le bar et sorti la bouteille de vodka qu’il versa dans un verre. Il disparu quelques instants en dessous du bar et réapparu un citron à la main qu’il pressa dans le verre.

-Tiens.

-Merci.

L’alcool me réchauffa la gorge et l’estomac. Enfin un peu de soulagement et de détente dans cette journée merdique.

-Bah mon vieux, tu verrais ta tronche, t’es sur que t’aurais pas vu ces sois disant « Gorgognes » sur le chemin?

-Gorgognes?

-Ce sont les religieux qui leurs ont donnés ce nom. Ce seraient des créations du diable pour tourmenter la vie des Hommes. Ils disent qu’une fois par siècle, elles remonteraient les profondeurs de l’enfer pour venir jusqu’à nous. Pendant toute une nuit, elles tueraient tous ceux qu’elles trouveraient sur leur passage.

-Et tu y crois?

-Quel genre de personne avaleraient ces conneries?

-À peu près tout le monde dans la ville apparemment.

-Et bien tu peux être sûr que je n’en crois pas un mot.

-Moi non plus. Mais j’imagine que c’est normal, on est les deux seuls con non croyants par ici.

Le silence régna dans le bar. Je restai là à regarder mon verre vide, perdu dans mes pensées.

Je me sentais bien, pour la première fois de la journée, ce qui était certainement dût aux effets de l’alcool. Ce silence dura cinq bonnes minutes. Cinq bonnes minutes de relaxation. Mais Tommy le brisa en laissant tomber un verre sur le sol. L’impact me fit sursauter.

-Merde!

-Rappel moi où sont les toilettes.

-Après tant d’années à venir dans mon bar, tu arrive encore à oublier où sont les toilettes?

-Faut croire que l’alcool fait des ravages.

Il lâcha un petit rire.

-Au fond a droite.

-Merci Tommy.

-Tu peux y aller tout seul où tu risques d’oublier en chemin?

-T’en fais pas , je pense pouvoir m’en sortir.

Tommy ria de nouveau et je parti en quête des toilettes

Des Gorgognes. Cette histoire était l’une des plus folles que j’avais entendu de ma vie.

Une fois soulagé, je me lavai les mains et retournai voir Tommy.

Une fois dans le couloir, perdu dans mes pensées, un bruit d’éclat de verre me fit de nouveau sursauter.

-Et bien mon salaud, t’as deux mains gauche aujourd’hui. Plaisantai-je.

Un instant plus tard, j’entendis un hurlement venant du bar.

-Tommy ?!

-Qui êtes vous, qu’est ce que vous voulez ?!

Pas de doute, c’était Tommy qui avait hurlé. Sans réfléchir, je courus jusqu’au bar afin de lui porter secours, mais ce que je vis me glaçai le sang. Deux…créatures, deux monstres se tenaient face à moi. Ils étaient rouge comme le feu, recouverts de cendres et faisaient pas moins de 2 mètres de haut. Mais le pire, c’était leur visage. Ils n’avaient pas de nez, des trous béants noirs à la place des yeux. Et leur bouche…mon dieu leur bouche ! Elle se prolongeait sur toute la largeur de leur visage. Ils n’avaient pas d’oreille ni de cheveux. Leur doigts avaient l’air de longues fourches prêtes à vous planter.

L’une des créatures tenait Tommy par le col et l’avait soulevé dans les airs.

-Ne me faites pas de mal, pitié…

La créatures poussa un cri aigu qui me perça les tympan, attrapa sa tête et l’arracha avec une facilité effrayante. Le sang gicla partout sur le comptoir. Après quoi, la créature ouvrit la bouche, laissant découvrir des dents qui avaient l’air de scies, et avala la tête inerte de mon ami. J’aurai voulu courir, mais j’en étais incapable. Mon corps était paralysé. Un flux incalculable de pensées se bousculaient dans mon esprit. La terreur avait envahi mon corps tout entier. C’est alors qu’elles me virent. Elles me regardaient, avec leurs « yeux » qui n’inspiraient rien d’autre que le néant. L’une d’entre elles s’approcha de moi avec une vitesse déconcertante, m’asséna un coup à la nuque, puis plus rien. Le noir complet. Je m’étais évanoui.

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