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La journée avait été longue pour Stella. Ses yeux la piquaient et elle bâilla en s’appuyant contre le dossier de son fauteuil de bureau. L’horloge de son ordinateur portable indiquait 00h15.

— L’heure d’aller dormir, murmura-t-elle en se frottant les paupières.

Minuit à Sumatra correspondait au début de soirée à Londres. Elle espérait recevoir une réponse d’Andrew le lendemain. Techniquement, il aurait le temps de lire son message et d’y répondre avant qu’elle ne s’endorme — mais elle n’y comptait pas trop.

Prends ton temps pour réfléchir, Andrew, pensa-t-elle.

Stella était zoologue. Depuis trois mois, elle dirigeait une campagne d’observation des grands mammifères sur l’île de Sumatra. Elle avait su tisser des liens de confiance avec la communauté scientifique locale, notamment avec Dewi Hutabarat, un biologiste de l’Université de Lampung. Ce dernier, spécialiste des primates, lui apportait un soutien précieux. Il avait fait sa thèse sur le gibbon de Sumatra, un animal que Stella trouvait fascinant.

Elle se leva, quitta le salon-bureau de la maison de location et se dirigea vers la cuisine.

— Un verre d’eau et au lit, se dit-elle en bâillant de nouveau.

Dans un coin du plan de travail, les trois cartouches cylindriques du filtre Nazava se dressaient côte à côte, comme de petits monolithes au garde à vous. Le tuyau d’arrivée d’eau de ville était branché sur le tube de gauche. Stella imaginait l’eau s’écouler lentement à travers les couches de charbon et de céramique, déposant au passage ses impuretés et ses microbes invisibles, avant de ressortir par un mince tuyau de plastique qui menait jusqu’au petit robinet chromé installé sur l’évier.

Elle se versa un grand verre d’eau filtrée.

— Pas terrible, se dit-elle en goûtant, mais c’est toujours mieux que les bouteilles de Cleo qu’on utilisait au début de la mission.

Elle continuait à emporter de l’eau en bouteille lors des sorties sur le terrain, mais plus jamais lorsqu’elle était à la maison de location. Le temps qu’elle et son équipe passaient là, entre deux expéditions, était bien trop long pour ne pas chercher une solution plus durable.

Il y avait beaucoup de travail à faire en rentrant du terrain : classer les images, consigner les observations, organiser les informations collectées dans la base de données. Un peu trop de choses aux goûts d’une amoureuse de la nature, qui ne se sentait jamais aussi bien que lorsqu’elle se tenait dans la fraîcheur d’une forêt, jumelles en main, à l’affût du moindre bruissement.

Elle s’estimait chanceuse d’avoir trouvé une grande maison à louer dans un quartier résidentiel du nord de Pagar Alam. De sa fenêtre, elle voyait des bananiers aux larges feuilles vert foncé et toute une palette de plantes tropicales luxuriantes. Au loin, les plantations de thé alternaient avec les parcelles de caféiers qui partaient à la conquête des pentes du Mont Dempo. Ce petit côté « carte postale » lui semblait parfois surnaturel et même inquiétant.

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