Chapitre 9 : Samy "Pas de panique."

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Une odeur âcre de fumée s’insinue dans mes narines, je me redresse d’un coup d’un seul et m’extirpe de mon sac de couchage. En sortant, je découvre avec horreur le brasier au loin, le monstre marche dans notre direction. Tout à coup, le camping s’agite, des cris, des pleurs d’enfants et des bousculades se mêlent au brouhaha venu de toute part. Je songe à ce que mon père dirait dans cette situation d'urgence : surtout ne pas paniquer. Il ajouterait : garder son calme pour échapper à l'appétit du monstre qui attise le bûcher. Sans réfléchir, je plie ma tente, et l'attache à mon sac. Heureusement, hier soir, avant de me coucher, j’avais tout rangé.

Je donne un dernier coup d'œil autour de moi. Je pousse mon vélo. Une voix m’interpelle :

  • Samy, viens vite, suis-moi. Les propriétaires nous conseillent d’évacuer au plus vite,
  • Emily attends et mon vélo ?
  • J’ai demandé à papa, tu peux l’accrocher. Nous avons encore une place sur le porte-vélos.

Aussitôt dit, aussitôt fait, nous nous faufilons entre les colonnes de voitures. Les vacanciers ont pris l'essentiel de leur affaire. Ils se dirigent vers la seule issue de secours accessible pour fuir le feu. Le monstre consume tout sur son passage. La chaleur se fait plus vive, les cendres se répandent sur le sol. Un scénario catastrophe prend corps. Les gyrophares des camions de pompiers zèbrent l’obscurité. Les hommes du feu, équipés de leur combinaison, guident les gens en les extirpant rapidement du piège qui se referme sur eux. Ils forment un couloir sécurisé pour faciliter leur exfiltration. Les chevaliers sans peur luttent contre le scélérat qui se dresse dans la nuit. La colonne de fumée s’élève dans le ciel, les flammes se tordent, le foyer n’est plus qu’à quelques kilomètres.

Le père d’Emily accroche mon vélo et charge mes sacs dans le coffre de toit. Il me propose de m’accompagner jusqu’à la sortie de la ville. Je suis reconnaissant pour cette aide providentielle. Mon portable sonne.

  • Réponds vite, c’est peut-être tes parents.

Emily ne pense pas si bien dire, Sarah crie à l’autre bout du fil :

  • Sauve-toi avant que le grand méchant te mange tout cru.
  • Ne t’en fais pas, je ne risque rien. Il est encore loin.

Après avoir pris le temps de rassurer ma famille, je poursuis ma conversation avec ma nouvelle amie et remercie ses parents pour le coup de main. Il nous faut plus d'une heure pour quitter la zone en voie de sécurisation. Nous nous retrouvons à une vingtaine de kilomètres du camping, le jour devrait s’être levé. À cette heure, seule l'obscurité nous enveloppe. De là où nous sommes, c'est toujours aussi impressionnant. Soulagés d'être loin, nous pouvons enfin respirer à plein poumons.

Je descends de la voiture, récupère mon vélo et mes sacs pour poursuivre mon périple. Je salue une dernière fois mon amie Emily. Elle se rapproche pour me serrer dans ses bras. Tendrement, je l'embrasse sur la joue avant de m'éclipser.

Je me retourne une dernière fois, hésite à faire demi-tour, après tout rien ne presse. Évidemment fuir le feu, pour ne pas me mettre en danger, je dois rester loin de ce que je ne peux maîtriser. Je réalise alors que cette fille que je viens de laisser derrière moi en ce matin de juillet restera dans ma vie quelle que soit la distance. J’ai croisé sa route et je me suis livré comme je ne l'avais jamais fait jusque-là. Tout naturellement un lien de cœur s'est tissé entre nous.

Après une heure et demie à rouler, mon attention se porte sur le panneau m’indiquant la promenade fleurie de Mimizan. Je m'approche de l'accès où je découvre un sentier aménagé dans une anse du lac. Je pose mon vélo, une pause dans un espace empli de végétation sera un doux refuge pour me ressourcer après cette fuite non programmée. J’emprunte la passerelle en bois et me sens revivre, en sécurité, entouré de plantes aquatiques, de fleurs vivaces et de rosiers. Ce lieu est un appel aux doux souvenirs, je me revois avec ma mère dans son jardin d'aromatiques où elle aime rêvasser tout en cueillant ses plantes au pouvoir guérisseur. J’entame ma balade accompagné par des aigrettes, des hérons et des canards. À cette heure matinale, je suis un invité privilégié. Mes yeux s'émerveillent devant la beauté simple que le promeneur souhaite retrouver.

Je m'installe sur le banc face à l'étendue d'eau. Je sors un paquet dans lequel Sarah a glissé, avant que je ne parte, nos madeleines préférées. Nous avons appris à les cuisiner ensemble. Celles-ci nous les avons confectionnées la veille de mon départ. Quand mes doigts se posent sur le petit gâteau encore moelleux, une caresse se dépose sur mes lèvres. Je ferme les yeux, savoure la douceur sucrée. Le chant des oiseaux accompagne ma dégustation, le temps s'arrête. Je saisis mon carnet et dessine mon tout premier personnage : Emily la Nymphe du lac.

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