Chapitre 10 : Victor "Tu es trop drôle."

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Au petit matin, j'ouvre un œil. Une frimousse penchée sur moi me dévisage avec tendresse. Son regard plonge dans le mien et une petite voix me chuchote à l'oreille :

  • Victor, tu veux venir avec nous, on va chercher le lait pour le petit déjeuner. Papi nous autorise toujours à traire Rosalie, c'est la plus gentille. Tu verras, c'est facile.

Je consulte mon portable quand je réalise l'heure, je me demande si le soleil est levé. Il est à peine six heures et quart. Une lumière douce traverse les persiennes. Une main se glisse dans la mienne et je l'attrape essayant d'émerger de ma nuit. Quand je réalise que je suis en caleçon, je demande à Louis et Paul de m'accorder cinq minutes pour me préparer. J'enfile un short et un polo pour être un minimum présentable.

Je les rejoins dans la cuisine, où ils sont déjà équipés de leurs bottes rouges. Jacques arrive à son tour avec un tabouret. Il me le tend et me précise qu'ainsi je serai plus à mon aise pour la tâche qui m’attend. Je le questionne du regard, je n'obtiens pour seule réponse qu'un sourire rassurant. Je prends la direction de l'étable le pas léger. Les garçons m'interpellent. Je dois rebrousser chemin si je ne veux pas faire chou blanc. Les belles laitières dégustent leur petit déjeuner dans les prés l'été. Louis ouvre l'enclos avec prudence. Les vaches curieuses avancent dans notre direction. Paul me donne son seau et me fait comprendre qu'aujourd'hui je me colle à la traite. Je m'approche de ... d'ailleurs c'est laquelle Rosalie ? Quand je vois arriver vers moi un beau spécimen. Je m'assois sur mon siège et dit avec assurance :

  • Bon allez, je me lance. Soyez indulgents avec moi, c'est ma toute première fois.
  • Oui c'est bien gonflé, me dit Louis en pouffant de rire.

Je le regarde incrédule. De quoi me parle-t-il ? Je ne sais même pas ce que je dois faire.

  • Bah quoi ?
  • Tu es trop drôle Victor, c'est le taureau que tu veux traire ... Ce ne sont pas les pis... Ceux sont ses c.....es !

Par réflexe, je recule et termine les fesses par terre. Les garçons éclatent de rire. Comment ai-je pu être aussi bête ? Moi, je ne connais que la publicité " Dis comment on fait les bébés ? Dis c'est quoi cette bouteille de lait ? " En dehors de Paris, je suis une vraie quiche. Paul me conduit vers une belle vache blanche, avec un tatouage autour de l'œil. Mon imagination vagabonde, je vois une demi-lune. Louis passe ses mains sur le cuir de l'animal. Il me montre la façon dont je dois attraper les pis. Dans un premier temps, tout me semble difficile. J'ai peur de lui faire mal. La sensation étrange passée, l'instant devient magique. Quand j'arrive enfin à faire gicler du lait, je suis aux anges. Nous récupérons notre butin crémeux. Je caresse Rosalie pour la remercier. Avec son museau humide, elle pousse délicatement ma main. Avec les garçons, nous retournons sur nos pas. Je suis satisfait d'avoir réussi ma tâche avec brio en ce matin de juillet.

Nous rentrons dans la cuisine, la télé est allumée, Marthe regarde les informations. Elle ne nous a pas entendus. Les images défilent, des bruits de sirènes les accompagnent. Je m'approche et fait sursauter bien malgré moi la grand-mère. La vieille dame s'empresse de prendre Paul et Louis dans ses bras. En les voyant ainsi, je rêve de participer au câlin collectif. Mes yeux se portent sur l'écran, je vois des gens fuir une zone d'incendie. J'entends le journaliste préciser les conditions dans lesquelles le feu a démarré. Je suis hors de moi en pensant à la bêtise humaine. Les gens sont inconscients.

Marthe nous prépare un chocolat chaud. L'odeur délicieuse du pain frais m'ouvre l'appétit. De belles tartines avec du beurre et une bonne confiture de rhubarbe sont posés sur une assiette. Je salive à l'idée de les croquer. Je m'installe avec les garçons. Avant qu'elle éteigne la télévision, j'aperçois sur l'écran un jeune homme qui pousse son vélo en direction d'une voiture. Pourquoi a-t-il attiré mon attention ? Je réalise que dans une telle situation, j'aurais paniqué. Lui semble serein et sûr de lui. Il m'impressionne.

Une heure après, je fais mes adieux à cette famille. Elle m'a donné bien plus que je n'en aurais espéré. Marthe a glissé dans un sac en tissu des douceurs pour agrémenter mon parcours. Louis, Paul et Jacques m'accompagnent jusqu'au croisement. Louis et Paul m'attrapent et m'offrent un gâté. Je ne suis pas prêt d'oublier ce cocon où j'ai passé une formidable journée. Je grimpe sur mon vélo. Le ciel face à moi est empli de petits moutons blancs, je me sens pousser des ailes. Dans un coin de ma tête, j'imagine déjà cette histoire que j'écrirai après mon passage dans cette ferme près de Chartre. Le titre pourrait être : Paul et Louis, les petits fermiers.

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