Chapitre 47 : Effet miroir.

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Nice fixait ses mains jointes avant d’accorder un regard à Kimi. Cette dernière ressentit le malaise intense de sa copine, la petite Challen ayant rarement l’air aussi grave. Son rôle de déléguée l’incombait pourtant parfois de lourdes responsabilités, mais bien souvent, elle restait douce. Ici, elle ne savait comment exposer ce qu’elle avait appris, mais elle se lança tant bien que mal, ce lourd fardeau sur les épaules :

  • Je crois que tu l’as compris, mais c’est à propos de toi, Kimi, fit-elle en se tortillant les doigts. J’ai appris des choses ce week-end, et je ne sais pas comment te les dire… Donc, ne m’en veux pas… d’être crue, d’accord ?

La blonde déglutit, ne trouvant pas les mots pour ce qui lui tombait dessus. Qu’avait-elle appris ? Il y avait tellement de possibilités…

Elle cacha tant bien que mal le stress qui l’envahit, s’appuyant à la table, le cœur battant, pour montrer qu’elle en attendait plus, tout en jurant contre l’univers de toujours la placer au milieu des problèmes.

Nice poursuivit courageusement :

  • Ce dimanche, il y avait une émission à propos de ton frère, dit-elle en regardant Sky.
  • C’est possible, oui, répondit le brun, le poing enfoncé sur sa pommette.
  • Le clip dans lequel tu as tourné est passé…

Soulagée d’apprendre qu’il n’y avait aucun lien avec le Lycée Gordon, Kimi sourcilla tout de même, de nature méfiante.

  • Le truc, c’est que ma mère a jeté un œil et elle t’a reconnue… Enfin, pas toi, ta mère, dit-elle avec précaution.

Tout le monde se redressa sur sa chaise, pertinemment conscient qu’elle était décédée. Ils ne comprenaient pas ce qu’elle voulait dire. Encore moins Kimi.

Laure, qui la trouva en mauvaise posture, le souffle coupé, pris le relais pour sa meilleure copine.

  • Qu’est-ce que tu veux dire, Nice ? demanda-t-elle d’un ton avisé.
  • Papa est venu voir et lui aussi, il… il a reconnu que tu étais la fille de… Ils ont parlé de tes parents, d’Alicia et Louis.

En entendant le prénom de son géniteur, les traits de son visage se raidirent à l’appellation de “parent”. Elle ne le considérait en rien comme son père.

  • Ils t'ont reconnue, parce que tu ressembles beaucoup à ta mère, et apparemment ils étaient amis. Ils se sont connus ici, à Saint-Clair, poursuivit-elle tandis que Kimi fronçait de plus en plus les sourcils. Mais surtout...
  • Quoi ? demanda-t-elle rapidement, un peu agressivement.
  • Mon père à dit que tes parents, mais surtout Dossan, était un très bon ami de… - elle regarda Laure un instant, qui pencha alors la tête, prise d’un mauvais sentiment - … Chuck Ibiss, lâcha-t-elle enfin.

“Pardon ?”, dirent les deux filles en même temps.

***

L’homme en question se trouvait en mauvaise posture, foudroyé par les regards féminins.

Elles se sentaient toutes trahies, autant par Chuck que Dossan, incapables de trouver les mots justes pour exprimer leur réprobation.

  • Je suis… consternée… s’exprima finalement Eglantine qui regarda les deux hommes avec une grande tristesse. Ne méritions-nous pas de savoir ? Dossan… Tu m’as menti au téléphone, de sang froid, l’accabla-t-elle.
  • Je n’en suis pas fier, et même si c’est difficile à entendre, je m’en excuse, sincèrement.

Il ne pouvait pas l’exprimer plus franchement. Bien que déçue, Eglantine comprenait tout de même. Elle soupira, frustrée.

Les hommes, Elliot et Michael, ainsi que Chuck, qui était persuadé d’avoir fait le bon choix, laissèrent les filles digérer. Pas Dossan qui devait se justifier.

  • Écoutez, je ne pense pas avoir fait une erreur, mais je comprends que vous soyez blessés…
  • C’est simplement que… c’est toujours vous deux, lâcha Marry, appuyée dans le fond de son siège. Vous faites toujours égoïstement vos plans ensemble, sans nous tenir au courant.
  • Je suis bien d’accord, se prononça Elliot.
  • Tu aurais fait la même chose pour Michael, rétorqua Chuck.

“Sans doute”, traversa l’esprit du roux, l’empêchant de répondre.

  • Bref, fit Katerina en rangeant sa crinière noire d’un air sévère. La question, c’est… Moi, je… C’est ce qui me tient le plus à cœur, en tout cas, c’est de savoir si elle va bien ? Est-ce que Kimi est heureuse ? demanda-t-elle d’une grimace, car elle se forçait à mettre sa rancœur de côté.

De là à dire “heureuse”... Dossan eut un pincement au cœur en repensant à tout ce qu’ils avaient traversés ensemble, ce long chemin qui l’avait amené à remplir sa promesse.

  • Je crois que… Oui, souffla-t-il en réfléchissant.

Blear, qui se taisait depuis le début, se mit à balancer son pied de plus en plus sous la table.

  • Tu “crois” ? fit-elle d’un ton glaçant, sans même le regarder, le poing fermé sous son menton.

Il n’aurait cru qu’elle soit aussi froide.

  • Kimi et moi, nous… balbutia-t-il, ému de tous ses souvenirs qui remontaient. Je ne vais pas mentir, nous avons eu des moments très difficiles. Quand nous avons eu notre chez nous, elle a pris conscience qu’elle ne retrouverait plus ses parents, que sa mère était décédée. Et je ne vous laisse pas imaginer ce qu’elle peut penser de Louis. Il y a eu une période où elle s’est renfermée sur elle-même, où nous avons dû… prendre le temps de se connaître, de se…

Il s’arrêta pour encadrer son visage de sa main, laissant ses yeux larmoyants atteindre chaque Richess à la table.

  • C’était dur, d’accord ? dit-il la gorge serrée. Je serais de mauvaise foi si je ne disais pas que quelque fois… il ne m’est pas arrivé de penser qu’elle aurait été mieux avec l’un de vous, mais j’ai fait ce choix, se reprit-il d’un ton plus dur. Michael, l’appela-t-il en le regardant. C’est vrai, j’ai pensé à moi, et Chuck peut en témoigner… J’ai voulu la prendre sous mon aile pour honorer nos amis et parce que j’avais autant besoin d’elle qu’elle n’avait besoin de moi. J’ai été égoïste, c’est vrai, ajouta-t-il, cette fois en regardant Marry, et j’ai été horrible de ne pas vous l’avoir dit, de vous avoir laissés dans l’ignorance, fit-il à l’égard de Blear dont les lèvres tremblaient.

La plus puissante des Richess se forçait à garder les épaules hautes, mais elle avait été l’une des plus concernées par la “disparition” de Kimi. Tous les sentiments contradictoires à l’époque envers cette petite fille, héritée d’une amie compliquée, et d’un homme plus que gentil, lui remontaient à la figure. Elle avait souffert de ne pouvoir s’en occuper, parfois encore rancunière de l’épopée d’Alicia, qu’elle n’était jamais arrivée à détester, alors encore moins sa fille.

  • Je suis désolé, mais je ne regrette pas, avoua-t-il en les confrontant, parce que je l’aime tellement… C’est affolant, lâcha-t-il dans un murmure.

Cette déclaration toucha ses anciens compagnons.

  • Est-ce qu’elle est heureuse ? Merci, Kat, pour cette question. Je crois que ça n’a pas toujours été le cas, mais aujourd’hui… Depuis que je l’ai déposée à Saint-Clair, comme promis, bien que j’aie attendu la troisième…
  • Pourquoi avoir attendu jusque-là ? demanda cette dernière. Ce n’est pas un reproche, nous avons juste... besoin de comprendre.
  • Parce qu’elle n’était pas prête, tout simplement. Je connais ma fille, et je peux vous dire qu’elle n’aurait pas… Oui, j’ai attendu le bon moment. Maintenant, je la sens beaucoup plus épanouie depuis qu’elle…

Il hésita un instant, croisant le sérieux de Michael.

  • Depuis qu’elle est amie avec nos enfants, fit ce dernier, interpellant alors les filles qui n’étaient pas au courant, sauf Blear pour son amitié avec Sky.

***

  • Ils étaient amis ? reprit Laure. Donc, si je comprends bien… lorsque nous avons passé les fêtes chez toi, dit-il en jetant un œil à Kimi, il savait ? demanda-t-elle sur un ton de reproche.
  • Je ne savais pas, se justifia immédiatement cette dernière.
  • Attendez… Ça veut dire qu’en plus de n’avoir rien dit pour ton père, Nice, quand il a parlé du vin de mon père… réfléchit ouvertement Laure, les deux mains accrochées à son siège, n’en revenant pas.
  • Je peux pas le croire, lâcha Kimi, déboussolée. Il n’aurait pas… murmura-t-elle en se rappelant ce qu’il lui avait dit à propos de Saint-Clair, qu’il y avait connu “les meilleurs amis du monde”.

Nice se mordit les lèvres en passant son regard sur tous ses amis qui recollaient les premiers morceaux. Selim se bouffait le poing, tandis que Faye fixait le plafond et Alex restait stoïque. Tout le monde avait des choses à dire. Sky et Loyd restaient calmes jusqu’ici.

  • Vous savez, fit la petite, je crois que… Ce n’est pas la seule chose dont nous devrions parler, dit-elle en lançant un tout petit sourire à Selim qui enferma immédiatement son visage entre ses deux mains. Faye, je n’ai pas encore eu l’occasion de te le dire, mais… Mon père… est venu à l’enterrement, tu le sais, non ?
  • Non, je ne savais pas ? se redressa-t-elle, n’en revenant pas de pouvoir encore être surprise.
  • Ah, bon sang… souffla sa meilleure amie.

Elle lui expliqua la façon dont Michael avait parlé de son père, de comment il avait avoué ne pas être en si mauvais terme avec la famille qu’étaient les Fast.

  • Il a dit ça… mais…
  • Je crois que non seulement vos pères étaient copains, dit-elle en observant Laure et Kimi qui se décomposaient de plus en plus, mais avec tout ça, je crois que c’était aussi le cas des nôtres.
  • Putain, lâcha Selim avant de rire, excédé. C’est le bordel. Faye, on leur dit ou pas ? demanda-t-il à sa copine rousse, qui restait la bouche béante, comme s’il en avait plus rien à faire de tout.
  • Nous dire quoi ? fit Loyd qui refermait ses bras tout doucement.

Selim fit la moue, dégouté de tout ce qu’il apprenait avant de regarder ailleurs.

  • Son père, commença-t-il en pointant la rousse, et ma mère, sont sortis ensemble du temps de Saint-Clair.

“C’est une blague ?” résonna cette fois dans les bouches des Richess.

***

Michael venait de lâcher une nouvelle bombe qui n’aurait de toute manière pas tardé à exploser. Dossan ne pouvait plus mentir, au pied du mur.

  • Je leur avais promis de ne rien dire, mais il semble que ce soit trop tard. En effet, Kimi est copine avec Nice, et… pas seulement. Comment puis-je dire ? Lorsqu’elle est arrivée à Saint-Clair, j’ai cru comprendre que vos enfants l’ont accueillie. Notamment, Laure, annonça-t-il, Chuck souriant à pleines dents.
  • Je les ai vus le jour de la cérémonie, elles avaient l’air en bons termes, oui, confirma-t-il fièrement.

Avec Dossan, ils partagèrent un moment de nostalgie. Leurs filles étaient meilleures amies, comme ils avaient été les deux doigts de la main.

  • Mais Kimi est assez discrète, donc je ne sais pas tout. Je savais aussi qu’elle connaissait Sky, puisqu’il y a eu un échange.
  • Un échange ? s’étonna Marry qui se pencha en avant pour obtenir une réponse.

Blear secoua la tête. Pour ça aussi, elle lui en voulait.

  • Je ne l’ai appris que très tard, prit-elle les devants, mais le temps d’un week-end Sky et… Kimi, dit-elle difficilement, ont changé de maison.
  • Qu’est-ce que c’est que cette idée ? lâcha Elliot en pouffant.
  • Encore aujourd’hui, j’aimerais bien le savoir, répondit Blear, fâchée.

Sur ce reproche, Dossan raconta comment il avait accepté la drôle de requête de sa fille, ne sachant pas que le garçon concerné serait Sky Makes.

  • Il est venu chez toi, le coupa-t-elle dans ses explications. Tu ne penses pas… que tu aurais pu nous prévenir à ce moment-là ? Que penses-tu que j’ai ressenti quand je vous ai vus à l’aéroport ? Je… Peu importe, s’empêcha-t-elle de dire le fond de sa pensée. Tu as franchi plus d’une limite, fit-elle en pinçant deux doigts ensemble, que ce soit en acceptant de recevoir mon fils chez toi ou en ne prévenant pas pour le clip avec Billy…
  • Moi aussi, s’avança Michael, j’ai été très choqué lorsque je l’ai vue ce week-end à la télévision. C’est comme ça que j’ai su, s’adressa-t-il aux autres qui ne comprenaient pas de quoi ils parlaient.

***

  • Et à aucun moment, vous n’avez pensé à nous le dire ? s’énerva Laure contre Faye et Selim qui fixaient intensément la table pendant que Sky soufflait, dépassé.
  • Je ne pouvais pas trahir ma mère, répondit le plus bronzé de tous.
  • Moi non plus, ils nous ont demandé de garder le secret, parce qu’il n’y a encore rien de concret, expliqua la rousse.
  • Visiblement si, fit Kimi qui boudait également dans son coin.

Le silence qui suivit fut lourd, mais ouvrit une brèche à Alex qui n’avait toujours pas pu s’exprimer. Tapotant ses doigts sur la table, il marqua son envie de parler, attirant l’attention de tous, pourtant déjà gavés de toutes ses révélations.

  • Laure… l’interpella-t-il d’un ton très sérieux.
  • Oh pitié… Quoi ? dit-elle en se pinçant l’arête du nez.
  • Je t’en ai voulu quand tu as critiqué ma mère, et j’ai compris pourquoi, mais ici, si tu lui en veux, je ne pourrais que le comprendre aussi.

Le cœur de la jeune Ibiss se mit à galoper à toute allure. Alex hocha plusieurs fois de la tête avant de déposer sa propre grenade sur la table.

  • Ce week-end, j’ai appris que…
  • C’est pas vrai, mais c’est pas vrai, lâcha Selim en panique, se tirant les cheveux.
  • Que nos parents ont couché ensemble…

Le galop s’arrêta en un coup.

  • Tu rigoles, là ? lâcha Faye, choquée.
  • Et pas qu’une fois, puisqu’ils étaient aussi ensemble à Saint-Clair. Ton père… a été son premier amour, dit-il presque romantiquement.

La main sur la poitrine, Laure lâcha une grande exclamation avant de s’armer d’un sourire crispé.

  • Je vais le… s’arrêta-t-elle pour rire nerveusement, mais quelle bande de…
  • Menteurs, fit Faye, blessée.
  • Mais si… mon père était ami avec le tien, tenta Kimi de comprendre, et que les vôtres étaient en bons termes, continua-t-elle en pointant Nice puis la rousse de la main, alors… il devait le savoir. Dossan devait… Et quand vous êtes venus à la maison… Il savait… ?

Sa voix cassée et plaintive atteignit l’ensemble de la table, tous mal en point.

***

Du côté des adultes, un long moment de réflexion s’était installé également. Les phalanges croisées, Katerina se bouffait de plus en plus la lèvre inférieure. Quand Eglantine le remarqua, la belle brune craqua.

  • Ce n’est pas tout… dit-elle en tremblant légèrement.

Elle revint sur l’histoire du gala, de comment elle avait été choquée pour Alice et sur le fait qu’elle avait pleuré devant son fils.

D’autres secrets s’apprêtaient donc à éclater.

  • Mon fils et la fille d’Elliot… Ils sont amis, meilleurs amis même, selon Selim. Et la preuve, c’est que tous les deux, ils nous ont joué un mauvais tour...

La nouvelle du divorce qui avait suivi le plan de leurs enfants offrit un tout autre sentiment à l’ensemble. Parce qu’en plus de se connaître, ils étaient capables de faire de telles choses.

  • Sans compter que Faye, sort avec Alex… N’est-ce pas ? dit Elliot, toujours les bras croisés, en cherchant l’approbation de Marry qui inspira profondément.
  • Donc… C’est bien officiel ? lui renvoya-t-elle la balle.

Tout deux hochèrent de la tête en se comprenant avant d’apporter de nouveaux éléments. Kat avait envie de mourir sur place, se sentant obligé de trahir la confiance de son fils. Dans un geste vif et désespéré, elle abandonna, aux bords des larmes :

  • Kat, qu’est-ce qu’il y a ? s’inquiéta Elliot tandis qu’elle regardait Michael.
  • Katerina ? répéta celui-ci, comprenant que quelque chose lui pendait au nez.
  • Mais c’est nos enfants… Ils… ils sortent ensemble, et ils en souffrent, lâcha-t-elle en récupérant une larme à son doigt, bouleversée.

***

  • Ma mère sait pour nous, avoua Selim à Nice qui resta aussi ébahi que son père.
  • Mais pourquoi… ?
  • Parce que je suis incapable de lui mentir !
  • Que j’y pense… C’est pour ça que ton père n’a rien dit, se prononça enfin Loyd en récupérant l’attention de Laure.
  • Ah… Ce n’est vraiment pas juste… souffla cette dernière, dégoûtée.
  • Nous aussi, nos parents savent, dit Alex.
  • C’est vrai, l’accompagna Faye. Ils savent depuis un moment maintenant, et puis, Marry a fait la robe de ma mère pour son… enterrement, j’imagine que ce n’est pas pour rien. C’est clair que mon père et la tienne s’entendent très bien, fit-elle alors remarquer.

Depuis le début de la réunion, Sky ne s’était pas vraiment senti concerné, bien que désolé pour ses amis. Il se rappela juste d’une chose en déposant son regard sur Kimi qui paraissait vide d’énergie.

  • Dossan… n’avait pas dit que nos mères étaient en conflit ? amena-t-il aussi cette information sur la table.

La blonde se réveilla du coma dans lequel elle s’était plongée pour lui répondre avec une grimace.

  • Oui… Il m’avait dit qu’elles… s’étaient déjà battues…
  • Sauf que si ton père était ami avec tes parents et qu’elles ont été en contact, ça veut pas dire que…
  • Mais bien sûr que oui ! les interrompit Laure d’une exclamation. Dossan savait. Ils savaient tous. On s’est fait rouler ! Ah, je vous jure… les amis… gronda-t-elle, qu’il est hors de questions qu’ils s’en sortent de cette manière. Je vais les faire payer de tous ces mensonges.

L’expression de haine sur son visage ramena le silence au sein du groupe.

***

Michael était resté inerte pendant trop longtemps.

  • Nice et… ton fils ? Ils sont… ensemble ? bégaya-t-il en venant déposer une main sur son cou, sous le choc. Elle ne m’a jamais…

Une étincelle naquit dans son superbe cerveau, déplaçant son regard immédiatement sur Dossan. Celui-ci se prépara à se faire incendier.

  • C’est ça que tu voulais dire ? Quand tu as dit que tu en savais plus sur ma fille que moi-même ? Tu savais ?! s’énerva-t-il, se levant de sa chaise.
  • Oui, répondit-il calmement en fermant ses yeux le temps d’une seconde pour marquer sa désolation.
  • Mais bon sang, Dossan !! À quel moment est-ce que tu comptais nous le dire ?! Kimi, c’est déjà… Mais Nice, ma propre fille !
  • Michael, calme-toi, se leva Katerina à son tour, je peux t’assurer que Selim l’aime de tout son cœur…
  • Ce n’est pas le problème ! la coupa-t-il, tant vexé que blessé par le fait qu’elle ne lui ait rien dit, à l’inverse des enfants de Marry et Elliot. Je… Elle a préféré se confier à quelqu’un d’autre que moi… alors que…

Il se laissa tomber à nouveau sur sa chaise. Eglantine, qui n’avait pas apprécié de le voir s’énerver, ressentit une profonde tristesse. Elle ne l’avait jamais vu aussi triste, même lorsqu’ils s’étaient séparés. C’était une autre forme de peine. Un échec.

  • Elle n’a aucune confiance en moi… Suis-je… un si mauvais père ? craqua-t-il à son tour.
  • Bien sûr que non. Je l’ai su malgré moi, essaya de le rassurer Dossan. Quand ils sont venus chez moi, je n’étais pas au courant. Je savais que Kimi amenait des amis, dont… Sky, ça oui, je le savais, je dois bien l’avouer, mais pas pour les autres. C’est à ce moment-là que j’ai su qu’ils étaient déjà tous amis, avant même que Kimi débarque à Saint-Clair. Je n’ai pas eu le choix de voir Selim et Nice ensemble, ainsi que Faye et Alex…
  • Ils étaient déjà ensemble à ce moment-là ? pensa tout haut Marry. Mon Dieu, ils ne sont pas si différents de nous, ajouta-t-elle avec un rictus partagé entre la joie et la tristesse. C’est certain qu’ils sont amis, pensa-t-elle alors, mais cette fois dans sa tête, au fait qu’Alex avait acheté une robe à la fille de Chuck.
  • Michael, l’interpella doucement Eglantine, je ne crois pas que ta fille ait voulu te mentir. Comme Marry le dit, ils sont en fait en train de vivre ce que nous… avons vécu, n’est-ce pas logique qu’ils n’aient pas osé ?
  • Apparemment, ce n’est pas le cas pour tous…

Elliot avait de la peine pour lui.

  • Tu sais, ils nous ne l’ont jamais dit très clairement jusqu’à récemment, précise-t-il.
  • Et chaque enfant est différent, insista Eglantine. Par exemple, je sais que mon fils supporte beaucoup tout seul...

Le gloussement de Chuck qui assistait calmement au spectacle depuis le début arracha un mauvais regard à la jolie Richess, n’appréciant pas qu’il se moque ouvertement, sans savoir non plus pourquoi. Se balançant sur sa chaise, Chuck pinça les lèvres.


  • Aurais-tu... quelque chose à dire ? lui demanda Eglantine, soudainement sur la défensive.
  • Je ne voulais pas rire, excuse-moi, répondit-il sincèrement. Simplement, tu ne crois pas si bien dire...
  • De quoi parles-tu ? se redressa-t-elle, les deux mains à plat sur la table.
  • C’est intéressant, réfléchit-il à haute voix, d’apprendre que vos enfants sortent ensemble, s’adressa-t-il d’abord à Michael et Katerina qui se sentirent un peu plus liés que dans le passé, puis à Marry et Elliot, qui n’étaient pas plus surpris. Il ne manquerait plus que les deux vôtres soient amoureux, dit-il avec ironie en parlant de Sky et Kimi, ce qui ne fit, pour le coup, pas rire du tout les deux parents. Voyez-vous, je suis allé récemment à Saint-Clair pour… J’avais envie de revoir notre cher Monsieur Xavier, tout simplement.

Marry comprit qu’il avait quelque chose derrière la tête vis-à-vis de leur ancienne école. Elle connaissait par cœur son petit air de comploteur. L’index déposé sur ses lèvres, Chuck fit durer le suspens.

  • Les enfants ont fêté Halloween, il y avait du monde dans les couloirs…
  • Qu’est-ce que tu foutais à l’internat ? s’agaça Elliot.
  • Peu importe, chassa-t-il la question d’un geste de main, et je suis tombé, par hasard, sur un petit groupe d’adolescents…
  • Chuck, ça suffit et dis-moi ce qui te fait tant rire, s’il te plaît, l’obligea Eglantine.
  • Eh bien, disons que j’ai surpris ton fils en train de déclarer sa flamme à ma fille et c’était… Très prenant, dit-il en levant un sourcil.
  • Est-ce que tu es en train de te moquer de moi et de Loyd, parce que je ne tolérerai pas…
  • Pas du tout. Il était très convaincant, si bien que… je lui ai peut-être dit de ne pas abandonner. C’est aussi ce que lui a dit ma fille, d’ailleurs.
  • Je ne comprends pas, secoua-t-elle la tête.
  • Il l’aime tellement, Eglantine, qu’il ne savait plus comment l’aimer, et devant moi, dit-il en amenant ses doigts sur son torse, elle lui a demandé de continuer à l’aimer. Ils sont amoureux, conclut-il en haussant les épaules comme une évidence.
  • Ils s’aiment… souffla-t-elle, les yeux dans le vague. Nos enfants sont amoureux… C’est…

Elle ne savait si elle était effrayée ou émue.

  • Ça signifie donc que notre promesse de réunir nos enfants aura abouti à quelque chose de plutôt surprenant, déclara-t-il à l’attention de tous, jetant un petit clin d’œil à Dossan.

Ce dernier fut interpellé par la lumière de son téléphone qu’il tenait en mains, puis par la sonnerie de celui de Blear qu’elle porta tout de suite à son oreille. L’appel tombait à pic pour que chacun reprenne un peu son souffle.

Dossan écoutait la voix de Blear devenir de plus en plus froide à mesure qu’elle hochait de la tête.

  • Je vais venir tout de suite, Monsieur, répondit la belle brune. Oui, merci de m’avoir prévenue. C’était l’école, enchaîna-t-elle immédiatement. Tu as reçu un appel aussi, non ? Ça aussi, tu étais au courant ? demanda-t-elle en ne lui laissant pas le temps de répondre. Que nos enfants sèchent les cours ensemble ?

Effectivement, l'appel venait du directeur.

  • Sky et Kimi ? C’est… possible ? répondit-il, sur le cul.
  • Non, pas eux. Je te parle de Lysen et Leroy ! s’exclama-t-elle en serrant férocement son téléphone, le criblant d’un regard très énervé.
  • Non, ça… je… bégaya-t-il, très surpris. Ça, je ne le savais pas.

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