Le soleil brille et je profite de ses doux rayons dans les jardins du palais. Je marche dans les allées entourées de rosiers aux fleurs écarlates. J'aime leur couleur qui rappelle celle des flammes ardentes. Ces roses sont mes fleurs préférées car elles sont celles qui symbolisent le mieux notre bel empire.

C'est alors qu'une voix masculine m'interpelle, interrompant ma contemplation :

- Votre Altesse !

- Qu'y a-t-il ?

Le nouvel arrivant s'agenouille devant moi et annonce :

- Sa Majesté l'empereur Apollon vous demande. Il souhaite vous voir sur le champ et vous attend dans la salle du trône en compagnie de l'impératrice Hélia.

- Je m'y rends de suite, déclaré-je en contournant l'homme.

Je reprends le chemin inverse pour retourner à l'intérieur du palais. Je traverse les longs couloirs dorés aux sols recouverts d'un doux et somptueux tapis rouge.

Arrivée devant les deux grandes portes en or massif de la salle du trône, les deux gardes qui se tiennent devant me l'ouvrent pour que je puisse entrer dans la pièce. Il s'agit d'une immense salle au sol recouvert d'un tapis rouge brodé d'or. Elle est éclairée par de grandes fenêtres qui laissent entrer la lumière de l'astre céleste et sur une estrade, au fond de la salle, se trouvent les trônes de l'empereur et de son épouse. Ce sont deux imposants sièges en or massif, ornés de rubis, sur lesquels sont assis les souverains de l'empire du feu.

Ces derniers sont en pleine discussion avec l'un de leurs hommes. L'empereur du feu lui ordonne :

- Rends-toi dans les Abîmes et apporte-moi ce fruit. Je veux qu'il me parvienne intact.

- À vos ordres, Votre Majesté !

Sur ces mots, l'homme s'incline respectueusement avant de quitter la pièce à reculons.

J'avance jusqu'aux pieds des marches qui permettent d'accéder aux trônes de mes parents et leur fait la révérence. Mon père, habillé de pourpre, me dit alors :

- Relevez-vous, Mademoiselle.

Je m'exécute. Il poursuit, en lissant sa moustache rousse :

- J'ai une annonce très importante à vous faire. Comme vous le savez, cela fait maintenant plusieurs années que la guerre oppose notre empire au royaume de l'eau. Seulement, je décide aujourd'hui d'y mettre un terme.

Je regarde mon père avec étonnement. Lui, abandonner sa volonté d'étendre notre empire au globe entier en cessant cette guerre ? Voilà qui me surprend !

Ce dernier m'explique :

- Ce matin, j'ai reçu un message de la part du nouveau roi de l'eau. Il m'a fait part dans sa lettre de sa volonté de mettre un terme à cette guerre sanglante. Il me propose même de sceller cette armistice par un mariage entre nos deux familles et j'accepte son offre. Vous épouserez donc le roi de l'eau Kaï.

Mes yeux noirs s'écarquillent à l'entente de cette annonce et je fixe mon père avec une expression de choc en m'exclamant :

- Comment ? !

- Calmez-vous, m'ordonne calmement ma mère en lissant d'une main sa longue chevelure dorée. Je comprends votre surprise, mais ce mariage est nécessaire pour le bien de notre empire et il est de votre devoir, en tant que princesse impériale et héritière de la couronne, d'assurer l'avenir de notre pays.

- Je ne vois pas en quoi mon mariage avec cet homme assurera l'avenir de notre empire.

- C'est pourtant simple, déclare mon père en plongeant ses yeux dorés dans les miens. Non seulement votre mariage avec le roi de l'eau assurera la paix entre nos pays, mais en plus, cela vous permettra d'hériter de la couronne de son royaume et d'en devenir la souveraine incontestable, ce qui permettra à notre glorieux empire de s'étendre. Nous atteindrons ainsi l'objectif que nous poursuivons depuis de nombreuses années.

- Ce n'est pas moi qui hériterai de la couronne de son royaume, mais son descendant.

- Sauf si ce roi décède avant que vous n'ayez eu le temps de lui en donner un . . . déclare ma mère sur un ton sournois.

- Oh, je vois . . . me contenté-je de dire.

- Bien, vous pouvez disposer à présent. Vous passerez à l'action quand nous vous en aurons donné l'ordre. Nous avons déjà tout prévu, vous n'aurez qu'à suivre nos instructions le moment venu.

- Bien, dis-je en leur adressant une révérence.

Je quitte ensuite la salle du trône à reculons, comme l'exige l'étiquette.

Une fois dans les couloirs, je tourne les talons et me dirige à grands pas vers mes appartements, sourcils froncés.

J'en pousse les portes et les referme violemment derrière moi, en hurlant à toutes les servantes qui s'y trouvent :

- Sortez immédiatement ! Je veux être seule !

Elles s'exécutent aussitôt, de peur de faire les frais de ma colère. Elles savent que je m'énèrve vite et que tous ceux qui me contrarient en payent le prix.

Dès que je me retrouve seule, je me mets à marcher de long en large, en serrant un éventail en plumes de phénix dans mes mains.

Comment osent-t-il me faire cela ? ! Me fiancer à un homme qui, pas plus tard qu'hier, était notre ennemi sans même me demander mon avis ! Tout cela uniquement dans le but d'accomplir leurs ambitions ! Bien sûr, en tant que princesse de l'empire du feu, je suis fière et heureuse de servir mon pays, mais la simple idée d'épouser le souverain de nos ennemis jurés me met hors de moi ! En plus, je ne sais rien de lui, je ne sais même pas à quoi il ressemble ! N'y a-t-il pas un autre moyen ?

J'en veux à mes parents de me sacrifier de la sorte en me jetant dans les bras d'un parfait inconnu que je n'aimerai probablement jamais !

C'est alors que je sens mon éventail brûler entre mes mains. Je baisse les yeux pour constater qu'il a été réduit en cendres par ma maitrise du feu. Oh, je me suis encore laissée emporter. Il faut vraiment que je me contrôle si je veux éviter que tout ce que je touche ne s'enflamme sous l'effet de ma colère.

Je prends une grande inspiration pour me calmer et m'installe tranquillement sur mon fauteuil en velours rouge, face à l'une des fenêtres. Je contemple le soleil qui brille dans le ciel bleu. Sa vue m'apaise. Je continue donc de l'observer en me laissant conduire par le fil de mes pensées.

J'appréhende beaucoup les noces, mais d'un autre côté, j'ai hâte qu'arrive le moment de l'éliminer afin de ne plus avoir à le supporter. Cela me délivrera sans doute du sentiment d'angoisse qui monte en moi depuis que mes parents m'ont annoncé mes fiançailles avec le roi de l'eau.