Tombe la neige

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Hier, il a assez neigé pour réaliser de jolis bonhommes de neige. C'est assez rare là où je vis pour qu'il s'agisse d'un événement. J'avoue, j'aime bien ces "bonzommes", je trouve qu'ils proposent de partager un sourire, un petit instant de presque poésie. J'ai profité de ma pause pour en réaliser un : deux boules superposées, deux graviers pour les yeux, une paille pour situer et évoquer la bouche. Rien de prétentieux. Un peu inutile puisque la terrasse est très peu fréquentée, mais j'aime ces petits plaisirs, et même pour un ou deux hypothétiques sourires passants, ça me suffit pour enrichir mon propre plaisir enfantin. Le bonhomme est à l'écart du chemin, je le laisse à sa solitude et je repars heureux. Ensuite, je l'oublie.

Pause ce matin, terrasse ensoleillée, la neige a totalement fondu sauf là-bas — « Ah mais oui, mon bonhomme au fait ! » me dis-je en regardant cette pauvre petite chose qui ne ressemble plus guère à ma créature de la veille.

Il est devenu borgne, un des cailloux est tombé sur le côté. La paille reste fichée de manière ridicule dans cette boule difforme qui naguère était une tête. Le corps quant à lui a rétréci de moitié, et gît dans une flaque d’eau sale. Mon petit bonhomme n’a plus fière allure. Il me regarde de son unique œil dont on ne sait s’il s’agit d’une bouche mal placée ou d’une oreille. J’ai l’impression qu’il implore mon secours. Mais autour, la neige a disparu, je ne pourrai pas lui donner les soins qu’il réclame, sous un soleil qui le réchauffe, impitoyable, de ses rayons meurtriers.

Je fixe mon bonhomme droit dans l'œil, et je comprends enfin ce que son petit air triste veut me dire. Il est heureux d’avoir vécu, une journée, certes, mais l'important n'est-il pas d'avoir vécu pleinement ? Il souffre trop de se voir ainsi diminué. Je vois en lui la peur de ne plus devenir que l’ombre de lui-même à la lumière du ciel, de perdre sa paille et voir son gravier tomber au sol. Aucun mot ne sort de sa bouche, mais je comprends qu’il demande à en finir. D’un geste rapide, j’abrège ses souffrances de ma semelle 42. C’est mieux ainsi.

À la prochaine neige, je le ferai naître à nouveau, et tout sera pardonné.

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Table des matières

En réponse au défi

À la trace… [ ou la violence anodine ]

Lancé par - - -

Bonjour à tous.

Ceci est le premier défi que je lance. L'idée m'en est venue en faisant ma pause quotidienne il y a peu. Récit.

Hier, il a assez neigé pour réaliser de jolis bonhommes de neige. C'est assez rare là où je vis pour qu'il s'agisse d'un événement. J'avoue, j'aime bien ces "bonzommes", je trouve qu'ils proposent de partager un sourire, un petit instant de presque poésie. J'ai profité de ma pause pour en réaliser un : deux boules superposées, deux graviers pour les yeux, une paille pour situer et évoquer la bouche. Rien de prétentieux. Un peu inutile puisque la terrasse est très peu fréquentée, mais j'aime ces petits plaisirs, et même pour un ou deux hypothétiques sourires passants, ça me suffit pour enrichir mon propre plaisir enfantin. Je bonhomme est à l'écart du chemin, je le laisse à sa solitude et je reparts heureux. Ensuite, je l'oublie.

Pause ce matin, terrasse ensoleillée, la neige a totalement fondu sauf là-bas — « À mais oui, mon bonhomme au fait ! » — une tache blanche sur le goudron humide. La densité de la neige fait son effet congélateur, bien sûr. Par contre, du bonhomme, il ne reste en fait que des débris. Une grosse trace de pied d'adulte s'affiche au milieu de la bouillie.

La violence en général, la violence extrème, je ne suis pas équipé pour la comprendre, je n'essaye pas. Mais là, cette "petite" violence, je devrais pouvoir. Même pas. C'est un handicap dans mon écriture parce que passer son temps à raconter les aventures des gentils, ça limite beaucoup le registre.

Aussi me suis-je dit que vous pourriez peut-être me montrer ? Histoire que je me regarde en partant de vos réponses, si je me découvre une aptitude, même petite, à entrer en empathie, comprendre comment ça se déroule dans un cerveau "normal" ? (Oui, je dis "normal" parce que je pense qu'à ce niveau là, c'est moi qui ai un problème. Shooter dans une boule de neige, ce n'est pas un crime.)

Voilà donc la consigne : en utilisant le "je", imaginez la scène vue par le "coupable".

Pas d'autre consigne. Pas de genre, bien sûr. Essayez, si vous voulez-bien, de toucher juste, sans carricature ni manichéisme. Sur le pouquoi, comment l'idée arrive, la sensation, l'émotion ressentie.

Et si vous avez l'imagination visuelle, vous pouvez jetter un œil sur la scène de non-crime, ici :

http://ftp.i10.fr/_agence/_didier/_drop/b.jpg

Merci de m'avoir lu jusqu'ici. Je suis impatient de vous lire.

Commentaires & Discussions

Tombe la neigeChapitre7 messages | 6 ans

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