Des champs de roche et de poussière...
Le voyageur continue sa route dans les champs où ne poussent que roche et poussière. Exposé au vent, il lève son bras pour protéger son visage des grêlons secs qui s’abattent sur lui.
Plusieurs fois il trébuche mais à chaque fois il trouve la force de se redresser. Il trouve alors une crevasse assez large et profonde pour s’en servir d'abri. Lorsqu’il s’enfonce dans ce couvert de fortune, il s’abaisse pour éviter que son visage ne soit fouetté par les bourrasques et ce qu’elles emportent. Dans ce renfoncement, il sent ses pieds s’enfoncer dans l’épaisse couche de sable et de poussière qui y a trouvé refuge.
Cette lutte pour avancer, il l’a menée tout au long de cette dernière année. Il n’a fait que chercher de la nourriture, de l’eau, et des abris de fortune. Désormais, il avait l’objectif qui lui permettait de donner un sens à toutes les douleurs qui le tenaillaient.
Il avance, replié sur lui-même, malgré les tensions dans le bas de son dos et dans ses cuisses, il poursuit.
Lorsque les vents s’apaisent, il pose le pied sur le bord de la tranchée et se hisse à l’extérieur.
Autour de lui désormais, il aperçoit d’autres vestiges.
Des carcasses de voitures, à perte de vue. Il y a encore la trace de quelques grillages qui servaient d’enclos à ces vestiges du passé.
Il se tourne vers les usines qui se trouvent à l’autre bout de la décharge de voitures. Elles sont sur son chemin.
Lorsqu’il a remonté les files de carcasses, il découvre un large champ industriel où des tapis conduisaient les véhicules dans des industries. Il lève les yeux pour lire les sigles inscrits sur la devanture des grands ensembles :
I.C.A.R.
En avançant le long des tapis, il regarde le flux entrant, rempli à ras bord de morceaux de voitures.
Du côté du flux sortant, une vision le ramène à ce qui a précédé l’effondrement.
Ils se tiennent par dizaines sous des pergolas, debout sur un tapis, à attendre que la production achève son travail et les laisse prendre vie animés par l’énergie.
Mais là ils ne sont que des mannequins d’acier recyclé, en attente de vie.
Ils ont des articulations caoutchouteuses, liant des couches d’aciers mates et claires qui recouvrent l’armature des machines. Leurs visages ont des structures étranges, qui essayent de maintenir une certaine distance entre les traits des hommes et une impression de familiarité. Ils ne seront jamais des hommes, mais ils ont été conçus pour susciter une forme de sympathie.
Ils étaient sur le point d’envahir son monde lorsque tout s’est effondré. Ils étaient l’ultime étape de l’automatisation. Mais ils n’ont pas eu l’opportunité d’arriver dans tous les domiciles.

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