8 - Cueille chaque jour comme une fleur

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Titus était là, exactement où je l’attendais. Il faisait des efforts pour avoir l’air naturel dans le décor, mais un sourire s’étira sur mes lèvres quand il fit semblant, tout en sifflotant, de s’intéresser à un bouquet de fleurs. Le connaissant, il n’avait probablement jamais dû en offrir à qui que ce soit, ni même rentrer chez un fleuriste. Cueille chaque jour comme une fleur, et fie-toi le moins possible au lendemain.

Étant hors ligne depuis plus de 24 h et souhaitant le rester encore le temps que je fasse flasher ma Civ-Chip pirate pour plus de sécurité, je dus passer par un intermédiaire. Heureusement, je savais où en trouver facilement. J’avais filé quelques sesterces à un jeune junkie pour qu’il donne rendez-vous à mon ami, sans garantie de résultat. Mais apparemment Flora et Mercure avaient soutenus ma cause.

Je restai à distance et à couvert encore quelques minutes afin de m’assurer qu’il n’était pas surveillé. Le forum était assez animé. Des passants le traversaient machinalement sans même jeter un œil à l’immense statue du général Octavius Fidelis Plotius, ancienne gloire d’une lointaine bataille contre les Byzantins, trônant sur le faîte de la fontaine centrale. Les commerçants s’occupaient de leurs clients, fumaient au soleil les yeux rivés sur leur datapad ou discutaient avec leur voisin. Tout paraissait calme et normal. Peut-être que j’en faisais trop après tout.

Alors que j’entrais dans son champ de vision, Titus leva la tête vers moi, afficha un large sourire sincère, écarta grand les bras et fit quelques pas vers moi.

— Mon ami ! s’exclama-t-il. Enfin te voilà. Mais où étais-tu passé ? Je t’ai laissé une tonne de messages sur les réseaux… je commençais à m’inquiéter, tu sais.

Oui, je savais qu’il s’inquiétait pour moi. Titus s’inquiétait toujours pour moi. C’était comme ça depuis mon adolescence. Titus était plus vieux que moi de quelques années, et à cet âge cela fait une différence notable. Il m’avait pris sous son aile, me protégeant de son mieux des petites frappes teigneuses et m’aidant à naviguer au mieux entre les différents commanditaires des mafias locales. J’acceptai avec plaisir son accolade et lui glissai à l’oreille de baisser d’un ton. Son air jovial se renfrogna immédiatement.

— Je te remercie d’être venu, mon ami, dis-je d’un ton mesuré.

— Hé, les amis sont là pour ça.

Il me prit par l’épaule et nous marchâmes vers une ruelle moins fréquentée.

— Explique-moi ce qu’il t’arrive, Marcus. T’es dans la merde ? C’était qui dans le Transurb ?

— Écoute, je ne sais pas trop. Tu sais, l’interrogatoire de ces enfoirés de la Cohorte Urbana… Eh bien, ils ne se sont pas arrêtés là, ils m’ont fait suivre.

— Les bâtards…

— Ouais. J’en ai choppé un avant de les larguer.

— Mais que te veulent-ils, par Jupiter ?

— Il y a eu un vol dans les entrepôts de Quetzal, martis soir. Du matos de classe militaire et des prototypes de recherche.

Titus lâcha un long sifflement de surprise.

— Ils ont trouvé de l’ADN, enfin un putain de fragment. Le mien, repris-je.

— Quoi ? Mais qu’est-ce que tu es allé encore…

— Je t’arrête tout de suite. C’était pas moi. J’ai plus trop les idées claires sur la fin de soirée, mais je suis reparti complément fracassé. Impossible que ce soit moi.

— Hmmm

— Bref, je suis allé me planquer chez Argia, pour faire le point.

— La vieille maquerelle ?

— Putain mec, je t’interdis de l’appeler comme ça ! Tu sais que c’est comme une seconde mère pour moi.

— Ouais, d’accord, mais bon, c’est quand même une ancienne prostituée sacrée reconvertie en matrone pour amadouer les nouvelles…

— C’est une religieuse. Dévouée et serviable qui plus est. Tu devrais la respecter ! tranchai-je.

— OK, OK, j’ai compris, je m’excuse. Bon, les entrepôts de la Quetzal tu dis ? lança-t-il pour changer de sujet.

— Oui, pourquoi ?

— Ben, ton vieux Titus connait un gars qui connait un gars… mais avant, faut qu’on fasse un petit détour par la Cour des Miracles pour régler rapidement ton petit de problème de Civ-Chip.

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